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Maraîchage : UN FILON POUR LES FEMMES

L’activité  permet à certaines femmes du District de Bamako de contribuer aux dépenses de la famille .Une rivière traverse le quartier de Missabougou en Commune VI du District de Bamako pour se diriger vers le fleuve Niger. Un espace maraîcher s’étend à proximité de ce cours d’eau. Grâce à ce vaste périmètre, fruit de la coopération entre le Mali et le Luxembourg, des femmes laborieuses essayent tant bien que mal d’échapper à l’oisiveté. En cette après-midi, Sitan Cissé, une quinquagénaire,  marche, pieds nus, entre ses parcelles. Elle cultive l’épinard et les tiges d’oignons.

Elle se baisse, par moment, pour vérifier l’état des légumes. «Ont-t-ils besoin d’eau ? Ont-ils mûri ? Il y a-t-il la présence de quelques insectes nuisibles ?», s’interroge-t-elle, avec un brin d’inquiétude. Après examen des trésors maraîchers, elle laisse entendre ceci:«Il leur faut une semaine de plus. L’impatience me ronge».  L’activité génère-t-elle des revenus suffisants ?  À cette question, elle sourit et confie timidement : «Je ne suis point nantie. Mais, ce travail m’aide beaucoup. Il me permet de contribuer aux dépenses de la famille, comme l’achat des fournitures scolaires des enfants, par exemple». Auparavant, elle allait chercher du bois sur la colline pour le vendre. Une fois revenue de cet itinéraire exténuant, elle devait aussi exécuter les nombreuses tâches ménagères.

Un peu plus loin, d’autres parcelles humides se dessinent. Des maraîchères semblent être en plein dynamisme champêtre. Il y en a qui cueillent des légumes. D’autres sèment pendant que d’autres encore répandent avec précaution de l’insecticide sur les cultures. Aminata Samaké est l’une d’elles. Malgré sa corpulence massive, elle exerce avec entrain cette activité. Courbée et tenant un pic à la main, elle se redresse subitement pour vociférer contre un garçon qui a failli marcher sur ses légumes. Il s’en n’est fallu de peu qu’elle ne le frappât. «Ce jardin est mon lieu de refuge, après mes occupations familiales», déclare-t-elle. Elle ajoute que la place de la femme n’est pas seulement à la maison. Mais, les choses vont bientôt se durcir, car la fin de la saison pluvieuse entraîne la précarité chez les maraîchères. Une fois sevrées de la pluie, présent du ciel, elles devront se contenter des eaux pleines d’immondices de la rivière d’à côté, qui seront, d’ici peu, stagnantes, puantes et impropres aux cultures jardinières.      Pendant la saison sèche, elles sont obligées d’utiliser, très souvent, l’eau du robinet, dépense qu’elle juge trop coûteuse. En puisant dans la rivière pour l’arrosage, les gens évitent leurs productions au marché, par crainte des risques sanitaires, regrette-t-elle.
Par ailleurs, elles prétendent que les premières heures de leur activité avaient été productives. Elles bénéficiaient encore de l’aide des partenaires européens. A partir du fleuve, un groupe électrogène garantissait journellement une quantité suffisante d’eau pour le jardinage. Mais, à l’entame des travaux de construction de l’autoroute menant à l’Hôpital du Mali, le tuyau qui reliait leur jardin au fleuve a été enlevé. Elles estiment que cela a porté préjudice à leur activité. «À cause de ce problème d’eau, on ne peut pas varier les cultures. On ne cultive que l’épinard et les tiges d’oignons, les autres légumes étant trop difficiles à entretenir», déplore une maraîchère.
Un manguier s’élève au milieu du jardin. C’est le lieu où se tiennent les conciliabules et les discussions récréatives. On y parle, entre autres, sujets, de la récolte prochaine des cultures, de la cherté des produits utilisés pour le labeur, ou du mariage de la fille d’une telle. Deux femmes sont présentes à l’ombre. La plus jeune, assise à même le sol, chantonne et amasse des légumes pour les mettre dans des sacs. A l’entendre, ses efforts ont porté leurs fruits, car elle a eu des acheteurs. Elle est sur la même longueur d’onde que les autres maraîchères : «La saison sèche sonne le glas de la prospérité. Nous n’avons pas les moyens de nous procurer une eau saine pour notre travail». Sa voisine occupe un escabeau. D’une humeur joviale, elle confesse qu’il faut garder espoir malgré les difficultés. Il est environ 18h 30. Tout s’estompe progressivement. C’est le crépuscule à Bamako. Par ci, par là, nos braves femmes se préparent pour rentrer au logis. Elles ramassent, çà et là, des instruments de travail. Demain, leur activité va certainement continuer.
Lassana NASSOKO
L’Essor

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