La justice malienne a ordonné, le 28 janvier, la remise en liberté provisoire de l’ex-putschiste Amadou Haya Sanogo et de ses coaccusés, qui attend depuis près de sept ans son procès dans l’affaire dite des « bérets rouges » retrouvés dans un charnier près de Bamako en 2013.
En attendant un jugement, Amadou Haya Sanogo et ses quinze coaccusés sont remis en liberté. La décision prise par la Chambre d’accusation de la cour d’appel de Bamako ne fait l’objet d’aucune opposition de la part de la partie civile ni du parquet. « Sanogo et ses quinze coaccusés ont été remis en liberté, en attendant leur procès », s’est réjoui Cheick Oumar Konaré, l’un des avocats du chef de l’ex-Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE).
« Aucun contrôle judiciaire n’a été instauré. Sanogo est libre de ses mouvements », a précisé l’avocat, pour qui cette décision est « une victoire et une grande joie après sept ans de détention ». Sanogo se trouvait mardi dans la capitale malienne, selon son avocat, mais il n’a pas pris part à la rencontre au palais de justice.
En mars 2012, Amadou Sanogo est alors capitaine. Il est placé à la tête de l’État, par des sous-officiers, après un coup de force. Obligé de quitter rapidement la présidence de la République, il reste néanmoins l’homme fort du système.
Fin avril, lors d’une tentative de contre coup d’État, une vingtaine de militaires parachutistes, appelés aussi « bérets rouges », sont arrêtés. On les retrouve morts dans une fosse commune en décembre 2013, près de Bamako. Le capitaine Sanogo, entre-temps bombardé général, est alors arrêté avec une quinzaine de militaires, et inculpé d’« assassinat » et de « complicité d’assassinat ».
Une première tentative de procès dans la ville malienne de Sikasso s’est soldée par un échec en novembre 2016. Les audiences devaient reprendre en janvier avant d’être une nouvelle fois reportées. Amadou Haya Sanogo et ses coaccusés n’ont pas assisté aux délibérés, mais ils sont très contents, selon maître Cheick Oumar Konaré.
Déception, en revanche, dans le camp des familles des victimes. Aboubakar Maïga est le frère de l’un des soldats bérets rouges. Pour lui, la décision de libérer Amadou Haya Sanogo avant son jugement est incompréhensible. « On s’attendait à une justice équitable, que le coupable soit puni, que la justice soit rendue. Mais il n’y a pas eu de justice ! Cette libération, ça fait plus de mal que de bien pour la mémoire des victimes », s’insurge-t-il.
L’avocat des familles de victimes, Moctar Mariko, comprend cette décision de libération provisoire. Mais il ne transigera pas sur la tenue du procès : « Tant que ce dossier n’aura pas pris fin, nous serons là pour appuyer l’accusation à aller dans le sens de la tenue d’un procès pour vraiment clôturer ce dossier. La lutte contre l’impunité repose sur deux principes : l’application de la loi et la réparation pour les victimes. »
L’audience était initialement prévue le 13 janvier mais avait été reportée. En cause : la convocation à la barre de l’actuel ministre de la Défense, le général Dahirou Dembélé. Le ministre avait annoncé qu’il présenterait sa démission s’il devait comparaître devant la cour d’assises. Le report lui a donc permis de conserver son poste dans une période sécuritaire très tendue. Une décision nécessaire, selon le porte-parole du gouvernement, pour « maintenir la cohésion au sein des forces armées ».