Mali: Fonctionnariat et Commerce : La fraude généralisée
Nombre de fonctionnaires maliens exercent frauduleusement des activités commerciales à travers lesquelles, ils détournent marchés et contrats publics et finissent très souvent par se retrouver au centre de nombre de conflits d’intérêts.
Un fonctionnaire ne doit point exercer des activités commerciales ou du moins avoir d’intérêt dans des structures menant des activités liées à son service. Du contraire, il se trouve au centre d’un conflit d’intérêt qui est toujours une procédure judiciaire à rebondissement.
A Bamako, il n’est un secret pour personne qu’un grand nombre de voitures de transport public (Sotrama et taxi) appartiennent à des fonctionnaires. De même, les fonctionnaires ont soit créé eux-mêmes ou pris des parts sociales dans des agences immobilières. Le nombre de plus en plus croissant de sociétés immobilières se justifie par la prolifération des immeubles appartenant à des agents de l’administration qui auraient fait de grande fortune.
Aussi, les établissements privés poussent comme des champignons à Bamako et même une enquête la moins poussée permettrait d’en démasquer les initiateurs.
Les agents de l’administration scolaire sont pour la plupart initiateurs ou actionnaires dissimulés dernière un prête-nom de ces écoles qui ne respectent aucune règle en matière de création et de gestion d’établissement à vocation scolaire.
Les maisons, les voitures de transport en commun et les écoles ne sont pas les seules matières de cette fraude commerciale, mais elles suffisent à montrer l’ampleur et les conséquences de la pratique.
Les voitures de transport en commun sont connues pour leur non-respect du contrôle technique et de tas d’autres règles. Quand bien même elles n’échappent pas à la vigilance des agents de la sécurité routière, ceux-ci les laissent circuler librement. Le contraste est révoltant, mais tout de même, admissible quant on sait que telle ou telle Sotrama appartient à tel ou tel haut cadre de l’Etat !
Ainsi, le statut du propriétaire devient une garantie contre tout contrôle policier. Aussi, pour les immeubles, la situation est identique. Non seulement, le propriétaire de la maison, haut placé dans l’administration, ne déclare pas la maison au service du cadastre tirant ainsi le profit de se dérober à la taxe, mais il pousse le culot pour obtenir un bail portant sur ladite maison avec l’Etat. Le comble ! Sans rien gagner en retour comme l’exige le code domanial et foncier, l’Etat verse pour le bail des millions par mois. A y fouiner de près, on se rend compte illico, que la maison abritant le service appartient au chef de ce même service, dissimulé derrière un notaire ou un prête-nom ou au mieux des cas, à son épouse ou à un parent proche.
Et dire qu’il faut sensibiliser le citoyen lambda à s’acquitter de son impôt ! Et vouloir que la transparence soit une vertu !
Aussi, dans le domaine des BTP, la pratique est légion. Les marchés publics sont accordés à des sociétés qui souvent, n’existent que sur papier.
Les dirigeants entrent dans toute sorte de manœuvres pour obtenir des pièces requises afin de soumissionner à tel ou tel appel d’offres. Le marché obtenu au moyen de gros subterfuges, la société adjudicataire a du mal à honorer son engagement. Cela n’est guère surprenant d’autant que son choix pour octroyer le marché ne résulte que d’un affairisme inavoué. C’est pourquoi d’ailleurs, les entreprises de BTP sont constamment défectueuses dans l’exécution des travaux. Mais, malgré tout, aucune sanction.
Ces pratiques sont monnaies courantes dans l’administration malienne, connues de tous mais tolérées. Il urge alors pour réussir la réforme des institutions, d’entamer le combat par là. Car la meilleure des réformes a besoin d’une administration d’abord moralisée. Cela éloignerait les conflits d’intérêt qui sont comme une pègre nationale !
Malick Camara