L’affaire devrait créer des remous au sein de la communauté catholique malienne. Des documents révélés par Le Monde montreraient l’existence de sept comptes bancaires en Suisse, appartenant à des responsables de la Conférence épiscopale du Mali. Ces éléments sont issus des « SwissLeaks » qui avaient dévoilé en février 2015 l’existence d’un système international de fraude mis en place par la banque britannique HSBC. Au Mali, l’affaire mettrait en cause de très hautes personnalités religieuses.
Les comptes auraient été ouverts en 2002 au Crédit lyonnais de Monaco avant d’atterrir chez HSBC Genève, en Suisse. Ils appartiendraient à Mgr Jean Zerbo, archevêque de Bamako et chargé des finances de la Conférence épiscopale du Mali (CEM) à l’époque. Mais aussi à Jean-Gabriel Diarra, évêque de San, à l’ouest de Bamako, et ex-président de l’organisation ainsi qu’à Cyprien Dakouo, nommé secrétaire général de la CEM en 2004.
En 2007, les comptes rassemblaient 12 millions d’euros répartis à parts égales entre les trois hommes. Dans les documents, on trouverait la trace de rencontres entre les trois ecclésiastiques et deux banquiers suisses, notamment pour se mettre d’accord sur un taux de rémunération de 5%. L’enquête affirme que ces fonds seraient toujours actifs sans être jamais apparus dans la comptabilité de la Conférence épiscopale.
Pas de compte personnel à l’étranger
La CEM est réunie en ce moment en session extraordinaire pour préparer un voyage au Vatican. Mgr Zerbo y sera en effet officiellement ordonné cardinal le 28 juin. Sans doute que cette affaire embarrassante sera évoquée.
Interrogé par Le Monde, Mgr Zerbo avait expliqué qu’il s’agissait d’un vieux compte, hérité de l’Ordre des missionnaires d’Afrique – « les Pères blancs » – qui gérait l’Eglise dans le passé. L’archevêque avait ajouté n’avoir jamais ouvert de compte personnel à l’étranger. Or selon une bonne source, il s’était exprimé alors qu’il n’était pas encore nommé cardinal. Il avait même dit qu’avoir un cardinal au Mali était impossible, car la communauté était trop petite.
« Nous ne sommes pas des truands »
Jean-Gabriel Diarra, président de la CEM au moment des faits, est aussi visé par les allégations de détournement de fonds. « Nous ne sommes pas parfaits. S’il y a des choses, des imperfections qu’on a découvertes chez nous, on va chercher à les assumer, mais nous ne sommes pas des truands », assure-t-il.
Le ministre des Affaires religieuses et du Culte, Thierno Ass Diallo, a fait le déplacement pour apporter son soutien au cardinal Jean Zerbo. Lui ne veut pas entendre parler de ces questions financières. « Je suis croyant et je pense que c’est sale, et que cette question ne doit pas se poser. Franchement c’est un article qui n’a pas sa raison d’être. Le ministre de tutelle que je suis est navré. Est-ce qu’il n’y avait pas d’autre moment pour raconter ces idioties ? » S’indigne-t-il.
Aucun autre évêque n’a souhaité s’exprimé. La conférence épiscopale a publié tard mercredi soir un communiqué laconique et n’apportant aucune réponse concrète. Notamment à qui appartient cet argent et où se trouve il désormais.