Deux Magots avec Sartre, tandis que le grand père Maki (farfelu mais génie des math) était disciple d’Henri Cartan père des Bourbakistes. La France que l’on dit raciste acceptait ces intellectuels de haut niveau qui pourtant la combattait à travers la FEANF et le RDA. Non seulement elle les acceptait, mais les respectait. C’est ainsi, que Senghor, Houphouêt-Boigny, Mamadou Konaté et leurs compagnons ont pu conduire pacifiquement, mais énergiquement l’Afrique vers les indépendances.
Je suis quant à moi arrivé en France 14 ans après l’indépendance du Mali. La France malgré la perte de ses colonies n’était ni plus revancharde, ni plus raciste qu’une autre nation. Au contraire, le baby boom n’ayant pas encore crée le chômage, elle recherchait auprès de l’Afrique la main d’œuvre et les ressources lui permettant de reconstruire sa grandeur.
Les années 70 et 80 ont déstructuré l’Afrique avec les dérives autocratiques de la plupart des dirigeants, la démission des élites et l’aide sournoise des ajustements structurels.
Aujourd’hui, l’Africain semble avoir perdu toute forme de considération dans le concert des nations. Pourquoi ? D’aucuns se refusant à une autocritique parleront de racisme, de néo-colonialisme, d’impérialismes et d’autres « ismes ».
Pourtant la réalité est que nous africains avons nous même dégradé nos valeurs et n’avons su maintenir le rythme de respect que les pères des Indépendances (lorsqu’ils n’ont pas sombré dans le culte de la personnalité) ont initié.
Nous avons transformé (peu importe que nous ayons été induits en erreur par d’autres) nos moteurs de croissance en vecteurs d’enrichissement illicites et les individus ont primé sur la nation. L’apparat sur le réel.
Oui nous ne contrôlons pas le cour des matières premières, ni n’avons de siège au Conseil de Sécurité de l’ONU. Mais franchement le vrai problème est que l’on se contente de se plaindre de ceux qui utilisent leur puissance pour nous dominer, au lieu de nous organiser pour devenir puissants nous mêmes. Cela que l’agresseur soit externe ou interne.
Or pour cela, la volonté ne suffit pas, il faut également travailler, organiser, se renforcer moralement et intellectuellement, planifier, produire, partager.
Lorsque l’esprit partisan aura fait place au véritable patriotisme, lorsque la compétence primera sur le népotisme, que la productivité primera sur le réseau relationnel, que l’on acceptera le savoir de l’autre et lorsque la vision primera sur l’instant, alors nous parviendront à nous faire respecter.
Rappelons-nous cette réponse de Jean Baptiste Belley premier député noir à l’Assemblée Nationale Française aux colons qui refusent de voir un Noir avec un poste de pouvoir : « quand on sait sauver les Blancs et les défendre, on peut bien les commander ».
Cela est valable dans les deux sens car aujourd’hui c’est nous qui sommes constamment sauvés par les autres, alors pourquoi s’étonner de leur commandement ?
Comment prétendre à autre chose lorsque l’on est perpétuellement assistés et constamment irresponsables de notre propre déchéance ? Sans être Nietzschéen rappelons-nous simplement que le noble crée ses propres valeurs. Et tant, que notre Afrique n’aura pas remis à jour ses valeurs d’humanisme, d’honneur et de travail en les rendant compatibles avec la nécessité d’inventivité du 21e siècle, elle demeurera le maillon faible de la terre des hommes. Pour l’heure saluons le peuple du Faso sur la voie de l’intégrité. Dieu veille.
Madani Tall, chevalier de l’ordre national du Mali