Au Burkina Faso, au Mali et au Niger, les groupes terroristes multiplient les attaques et les enlèvements dans les mines d’or industrielles et artisanales, depuis quelques mois. Source de financement du terrorisme, avertissent l’OCDE et l’Autorité du Liptako-Gourma – organisation de coopération qui réunit ces trois pays, l’or du Sahel pourrait surtout faciliter le blanchiment des revenus illégaux de ces groupes, si les activités d’orpaillage ne sont pas mieux encadrées.
L’extraction artisanale d’or fait vivre 10 % de la population du Burkina Faso, du Mali et du Niger réunis. Notamment des jeunes, que cette source de revenus permet d’éloigner des groupes terroristes du Sahel. Mais cet effet positif de l’extraction aurifère pourrait être gommé si les groupes terroristes s’engouffrent dans les failles de la filière, trop largement informelle dans les pays du Sahel.
« Le mécanisme est assez simple en fait, explique Louis Maréchal, conseiller de l’OCDE sur les industries extractives, tous les revenus générés par l’ensemble des activités illégales de ces groupes transnationaux doivent être intégrés dans le ” circuit légal “. Et l’or est un vecteur parfait pour ça, parce qu’il permet de blanchir de l’argent de manière assez simple. Donc on récupère des dollars en vendant des cigarettes ou de faux médicaments ou des drogues. Avec ces dollars, on achète de l’or sur le marché illégal et on peut ensuite revendre l’or assez facilement, soit dans la région, soit dans d’autres centres de négoce internationaux. »
L’or illégal déjà dans les circuits commerciaux
Le risque est d’autant plus important que la vente illégale d’or est déjà couramment pratiquée dans les pays du Sahel pour financer l’import-export. Une façon de contourner la difficulté d’obtenir des devises auprès des banques de la région. « Les grands commerçants, dans les grands centres de commerce des trois pays, qui achètent de l’or, parfois à un prix même supérieur au prix du marché international, exportent cet or de manière frauduleuse, non déclarée, détaille l’expert de l’OCDE. L’or est ensuite revendu dans un pays frontalier en échange de devises et c’est avec ces devises, en fait, que des biens de consommation sont achetés et ensuite réimportés, en général en sous-déclarant la valeur des biens importés, de telle sorte que l’opération dégage au global un profit. »
Urgence à légaliser le commerce de l’or
Ce circuit illégal, mais très utilisé, qui aboutit souvent à Lomé au Togo, d’où l’or est réexporté, pourrait être utilisé par les groupes terroristes du Sahel, d’où l’urgence, estiment l’OCDE et l’Autorité du Liptako-Gourma, de rendre plus transparente cette filière aurifère, avec l’aide des pays importateurs d’or et des bailleurs.
RFI