Dans un entretien à l’AFP, le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en RDC, le diplomate allemand Martin Kobler, avertit aussi que le désarmement des rebelles rwandais présents dans l’est reste l’une des priorités de la mission de l’ONU dans le pays (Monusco). »
Tout le monde, les Congolais, la communauté internationale (…) a un intérêt à avoir un président très très fort et légitime », déclare M. Kobler dans son bureau du quartier général de la Monusco à Kinshasa. « Il faut avoir une légitimité dans le processus électoral et le respect de la Constitution comme partout dans le monde », souligne-t-il.
Arrivé au pouvoir en 2001, le président Joseph Kabila a été élu en 2006 lors des premières élections libres depuis l’indépendance du pays en 1960. Il a été réélu pour cinq ans en 2011, mais la communauté internationale avait dénoncé des fraudes massives et l’opposition n’a jamais accepté le résultat du scrutin. Aux termes de la Constitution de 2006, résultat de la transition politique ayant permis de mettre fin à la deuxième guerre du Congo (1998-2003), M. Kabila ne peut pas se représenter en 2016 pour un troisième mandat.
Mais, depuis plusieurs mois, une question monopolise le débat politique: le président et son clan sont soupçonnés de vouloir modifier la Constitution pour rester au pouvoir au-delà de cette date. Cette idée est défendue ouvertement par des membres de la Majorité présidentielle (MP) et l’opposition craint qu’elle ne soit mise à exécution au cours de la session parlementaire qui a débuté lundi. A l’ordre du jour de cette session figure un projet de révision constitutionnelle, destiné à permettre d’organiser avant 2016 certaines élections en retard du fait de la crise politique ouverte en 2011.
Lundi, le président du Sénat, Léon Kengo wa Dondo, a averti qu’il ne fallait « pas tirer prétexte de la révision constitutionnelle pour aboutir à un changement de Constitution » en faisant sauter ses « articles intangibles », en particulier celui qui interdit toute révision destinée à modifier le nombre et la durée des mandats présidentiels. A la question de savoir si M. Kabila perdrait de sa légitimité si une telle modification était introduite, M. Kobler répond: « c’est un processus qui est discuté ici, j’ai entendu que le chef du Sénat (…) en a parlé. Je crois qu’il faut respecter la Constitution ».
Ces conditions remplies, pour que l’ONU puisse soutenir financièrement l’organisation des élections de 2015-2016 (locales, sénatoriales, provinciales, puis présidentielle et législatives), le chef de la Monusco souhaite la publication de leur calendrier complet « le plus vite possible ». « Je sais de ma propre expérience que si on nous demande de soutenir les élections, il faut avoir huit mois de préparation », explique celui qui fut représentant spécial de l’ONU en Irak avant de prendre ses fonctions à Kinshasa en juillet 2013.
Mais l’ONU se soucie aussi de la situation sécuritaire dans l’Est, où pullulent encore des dizaines de mouvements armés: « le groupe armé le plus important à combattre, ce sont les FDLR » (Forces démocratiques de Libération du Rwanda), tranche M. Kobler. Le désarmement des rebelles rwandais présents dans l’est de la RDC depuis le génocide des Tutsi de 1994 au Rwanda, auquel un certain nombre des chefs des FDLR sont accusés d’avoir participé, passe pour être l’une des conditions d’un règlement des conflits qui secouent les Grands Lacs depuis vingt ans.
Les FDLR ont entamé fin mai un processus de reddition volontaire et ont jusqu’au 2 janvier pour déposer les armes. Ce « processus est bloqué » et n’enregistre aucun progrès depuis la mi-juin, regrette M. Kobler, qui veut malgré tout « leur donner la chance » de se rendre avant que la Monusco « puisse vraiment les combattre » avec le soutien de l’armée congolaise.