Dans un rapport de 22 pages intitulé : Observations de Soumeylou Boubèye Maïga sur le Rapport Provisoire du Bureau du Vérificateur Général (BVG) relatif à la vérification de conformité et de performance de l’acquisition d’un aéronef et fournitures aux Forces Armées Maliennes de matériels d’habillement, de couchage, de campement et d’alimentation (HCCA), ainsi que de véhicules et de pièces de rechange, l’ancien ministre de la Défense et des Anciens combattants est sans équivoque : les accusations de surfacturations du Végal ne sont fondées sur aucune preuve. Nous vous proposons ici le rapport en question.
Observations de Monsieur Soumeylou Boubèye MAÏGA Ancien Ministre de la Défense et des Anciens Combattants sur le rapport provisoire du Bureau du Vérificateur Général (BVG) relatif à la vérification de conformité et de performance de l’acquisition d’un aéronef et fournitures aux Forces Armées Maliennes de matériels d’habillement, de couchage, de campement et d’alimentation (HCCA), ainsi que de véhicules et de pièces de rechange
Le rapport provisoire du BVG relatif à l’objet susmentionné, relève un certain nombre de points de non-conformité de son point de vue portant essentiellement sur :
· L’utilisation et le contenu de l’Article 8 du code des Marchés Publics au Mali ;
· Le choix de l’intermédiaire dans les acquisitions en vue ;
· Les modalités de Financement du Marché.
Les observations formulées ici portent sur chacun des points de non-conformité indiqués dans le rapport y compris les détails qui y sont liés.
Toutefois, compte tenu du secret qui doit entourer les affaires militaires, je m’en tiendrai à la réserve qui s’impose sur tout ce qui en relève.
Contexte
Il paraît nécessaire de rappeler le contexte dans lequel la convention entre le MDAC et GUO-Star a été élaborée et exécuté.
A l’entrée en fonction de notre Gouvernement en septembre 2013, la situation des Famas se résumait comme suit :
· Un profond traumatisme et une crise de confiance, y compris dans la relation avec le reste de la nation, consécutifs à la défaite et à l’humiliation subies dans les régions du Nord ainsi qu’aux évènements liés au putsch du 22 mars 2012.
· Un engagement dans les opérations militaires pour consolider la reconquête des régions du Nord, y combattre les forces terroristes et séparatistes, protéger les populations, sécuriser le redéploiement de l’administration et s’intégrer dans des opérations conjointes avec nos partenaires régionaux et internationaux.
· La taille et les exigences du théâtre d’opération ont été démultipliées à partir de janvier 2013, passant d’une ligne d’environ 300 km Kona-Diabali où les FAMAS avaient essentiellement une mission statique de « garde-frontières » à un théâtre couvrant l’ensemble des 3 régions du Nord, toutes les villes comprises entre Kona et Tessalit d’une part et celles comprises entre Diabali et Kidal d’autre part ainsi que le secteur de Nara (cf. le décret créant l’opération Maliba)
· Le niveau de l’équipement de nos forces était notoirement insuffisant et inadéquat (le ratio en armement individuel tournait autour de 45% dans le Nord, c’est à dire en zone opérationnelle, et de 20% dans le reste du pays).
· Les conditions de vie et de travail des militaires étaient globalement infrahumaines en matière d’habillement (les dernières dotations en tenue remontaient à deux voire trois ans pour certains), de couchage et d’alimentation.
De plus, les déserteurs qui ont rejoint les rangs adverses continuent de porter leurs uniformes des FAMAS dans les actions contre celles-ci ou dans les actions et violences perpétrées contre les populations.
· Certains de nos partenaires ne sont pas favorables à un équipement renforcé de nos Forces Armées.
· Des ressources financières insuffisantes en dépit des efforts consentis par l’Etat depuis début 2012.
Faire la guerre, reconstruire les capacités opérationnelles et œuvrer à la réhabilitation et au réarmement moral des FAMAS, telles étaient les tâches qu’il fallait mener simultanément et dans l’urgence afin de garantir l’intégrité du territoire, la souveraineté de l’Etat, la sécurité des populations et la stabilité des nouvelles Institutions issues des élections de 2013.
Tous ces éléments nous ont conduit à :
· Trouver les voies et moyens pour relever le niveau d’équipement des FAMAS par le biais des dispositions réglementaires existant, notamment l’article 8 du Code des Marchés Publics garantissant les exigences de secret, de diligence et des modalités convenables en cette période de crise ;
· Faire face aux besoins croissants des opérations dans l’environnement spécifique qui est le nôtre en en surmontant les contraintes financières par des accords de paiements pluri annuels adossés aux ressources prévisibles de l’Etat.
Ces options ont été confortées par le mandat donné le 5 novembre 2013 par le Président de la République , Chef Suprême des Armées, à un intermédiaire qui était disposé à mobiliser le financement nécessaire à l’acquisition de nos besoins et procéder au règlement des fournisseurs à la livraison , tout en acceptant, sur la base d’une convention, d’être payé sur une durée de deux ans avec un différé d’un an.
Pour ce qui concerne l’aéronef, c’est une expertise qui a conclu à la vétusté et au peu de fiabilité de l’ancien appareil présidentiel, contribuant ainsi à renforcer la décision et le choix du Gouvernement à acquérir un nouvel appareil.
I. De la légalité de la Vérification :
1.1 La vérification d’informations relevant du Secret Défense.
La Loi n° 2012-009 du 08 février 2012 instituant le Vérificateur Général lui oppose le « secret-défense » dans le cadre de ses missions quand il dit à son article 15 que « Dans l’accomplissement de leur mission, à l’exclusion du secret de défense, aucun secret professionnel ne peut être opposé aux vérificateurs… ».
Or, il a accepté la mission de vérification de l’acquisition d’un aéronef et fournitures aux forces armées Maliennes de matériel d’habillement, de couchage, de campement et d’alimentation (HCCA), ainsi que de véhicules et de pièces de rechange.
Des opérations que la législation nationale considère comme relevant du secret-défense.
Ainsi, une limite objective se trouve être posée aux missions du Vérificateur, les transactions effectuées sous le statut du secret-défense étant exclues de son champs d’investigations, en ce qu’il ne peut pas et ne doit pas avoir accès aux informations y ayant trait.
A cet égard, pour mieux clarifier l’interprétation de l’application de l’article 8 du CMP, le Vérificateur Général aurait dû, avant d’entamer ses investigations, consulter la Cour Suprême ou tout autre organisme pour interprétation et clarification aux fins de savoir s’il pouvait mener la mission sur des opérations que la législation nationale considère comme exclues.
En effet, l’article 8 du Décret n °08-485/P-RM du 11 août 2008 portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service du Code des Marchés Publics dispose « le présent décret ne s’applique pas aux marchés de travaux, de fournitures et de services, lorsqu’ils concernent les besoins de défense et de sécurité nationales exigeant le secret et pour lesquels la protection des intérêts essentiels de l’Etat est incompatible avec des mesures de publicité».
Cette disposition est une reprise de l’article 9 de la Directive n° 04/2005/CM/UEMOA du 09 décembre 2005 portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marches publics et des délégations de service public dans l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine qui dit que :
« La présente Directive ne s’applique pas aux marchés de travaux, de fournitures et de services, lorsqu’ils concernent des besoins de défense et de sécurité nationales exigeant le secret ou pour lesquels la protection des intérêts essentiels de l’Etat est incompatible avec des mesures de publicité».