A chaque fois qu’un des 200 terroristes tuerait un malien innocent, Soumaila Cissé devrait s’en vouloir. Quel lourd fardeau à porter de façon permanente ?
Après plus de six mois de « captivité », le président de l’URD, Soumaila Cissé a recouvré la liberté le mois dernier. Les conditions de M. Cissé et de trois autres otages français et italiens ont été étalées sur la place publique en ce sens que la presse en a fait son chou gras. Oui, l’ancien député de Niafunké a retrouvé la liberté. Passé six mois aux mains de terroristes dans les conditions de vie intenable, normalement cela devrait se sentir sur le visage de notre ex-otage. Or, c’est un Soumaila Cissé plus jamais ragaillardi tant dans son physique que dans son mental qui est apparu. Qui l’aurait cru ? L’homme a passé plus de jours à donner des interviews aux médias. Seule un politicien du calibre de Soumi peut s’adonner à ce genre d’exercice.
Revenons sur les conditions de la libération de l’opposant. 200 djihadistes dont certains ont tué des chefs de familles, des femmes, des enfants. Bref des bandits ont été lâchés dans la nature. Interrogé par un confrère, du commentaire qu’il fait de sa libération contre 200 terroristes, Soumaila Cissé, très gêné de la question voir fâché, n’a pas voulu s’appesantir sur elle. Même s’il s’est préoccupé de sa libération, Soumi sait bien que les 200 terroristes vont certainement faire couler le sang de d’autres innocents.
Même s’il ne veut pas le dire, il aura sur sa conscience le sang de maliens qui sera versé par les 200 djihadistes libérés. Et, cela pourrait être considéré comme du sang qui souilleraient ses mains. D’où l’idée de Soumaila Cissé qui serait tombé dans le piège de la culpabilisation permanente. Pour la simple raison qu’à chaque fois qu’un des 200 terroristes tuerait un malien innocent, Soumaila Cissé devrait s’en vouloir. Quel lourd fardeau à porter de façon permanente ?
Et, pour ne pas arranger les choses, depuis la libération des 200 djihadistes, les attaques se multiplient dans le pays dogon et dans la zone de Niono avec des morts d’innocents.
On se souvient d’ailleurs que lors de la libération d’un otage, le Français, Serge Lazarevich, contre 20 djihadistes, des partis politiques maliens, parmi lesquels l’URD, avait fustigé cette transaction et décrié le fait que l’Etat se dépouille de cette façon. Ces partis avaient hurlé et dénoncé le fait que 20 djihadistes arrêtés soient libérés sans concertation de l’Assemblée nationale, sans procès, finalement au mépris des militaires morts.
Là, ce sont 200 djihadistes qui sont remis dans la nature. Le montant financier payé n’est pas déterminé, mais, à en juger par les festins organisés par Iyad, il devrait être conséquent. Que disent les partis politiques ? Rien !
Le plus insupportable de mon point de vue est le fait que Soumaila Cissé semble faire de sa libration une victoire. Après avoir fait le « tour du Mali », l’on a vu un Soumaila Cissé à Paris, comme s’il venait de remporter une grande victoire ou s’il était déjà président de la République. Les morts ? Le trésor public qui a été saigné ? Aucun sacrifice n’est trop grand pour la liberté de Soumaila Cissé. Pendant que les autorités mettaient tout en œuvre pour la libération de Soumaila, les autorités n’ont pipé mots sur le cas de deux administrateurs civils en mission commandée détenus par leurs ravisseurs depuis plus d’un an. Deux poids, deux mesures ! Personne n’a entendu une compassion des formations politiques.
Avec cette libération de Soumaila Cissé contre 200 terroristes, Amadou Kouffa, Iyad Aghaly et tous les autres groupes terroristes savent désormais qu’ils n’ont plus à craindre tant qu’ils auront un « autre Soumaila » sous la main. Autrement dit, ils vont continuer à tuer et après négocier la libération des tueurs mais aussi avec des billets de banque en poche.
Cela fait des jours que les syndicats des administrateurs civils ont interpellés l’Etat sur la situation de leurs camarades pris en otage, apparemment rien n’a bougé. De là, l’Etat démontre qu’il faut être Soumaila Cissé pour qu’il s’implique dans ta libération. Pauvre administrateurs civils.
Hamidou Sissoko
Source : Arc en Ciel