Après un déplacement forcé, il est difficile de se sentir chez soi. Cependant, grâce à la pratique du diatiguiya, une valeur ancestrale d’hospitalité et de respect de l’étranger, de nombreux déplacés parviennent à s’adapter. Cet article se penche sur l’intégration sociale des femmes déplacées au Mali et leur ressenti au sein des communautés d’accueil.
Nous avons rencontré Assa Guindo en février. Originaire de Dialassagou, elle vit actuellement à Bankass, dans la région de Bandiagara. Lorsque nous sommes arrivés chez elle, elle s’apprêtait à aller aux champs. Ses enfants aiguisaient les houes et nettoyaient le matériel agricole.
Assa Guindo a été chaleureusement accueillie par la communauté qui l’a reçue. Elle décrit des personnes bienveillantes et solidaires. Assa s’est intégrée sans problème et se félicite de cette opportunité. « Nous avons eu la chance de rencontrer des gens adorables. Ils nous ont logés, nourris, et nous avons même pu obtenir des terres pour faire du jardinage et de l’agriculture », témoigne Mme Assa.
Même constat à Sikasso, des femmes déplacées se disent soulagées de l’attention que leur portent les communautés d’accueil. Elles affirment « être intégrées aux événements sociaux ». Une femme déplacée témoigne : « Nous n’avons pas souffert, nous avons été bien accueillies. Nous vendons du lait, et les gens viennent l’acheter chez nous. » Elle ajoute que « leurs enfants vendent aussi dans les quartiers, et que les gens apprécient ».
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Le Mariage, preuve d’une intégration réussie
Boubacar Dicko, un notable de Bamako, affirme avoir facilité « le mariage entre une femme déplacée et un jeune Bamakois ». Selon lui, « l’esprit de solidarité et de vivre-ensemble est profondément ancré dans la culture malienne ». Il explique aussi que « plusieurs communautés ont accueilli des déplacés internes qui, avec le temps, ont noué des liens solides, parfois jusqu’au mariage, avec les populations locales. Il s’agit d’une tradition ancestrale au Mali ».
Amadou Diallo, traditionaliste, renchérit : « les Maliens considèrent l’accueil des étrangers comme une valeur sacrée de leur culture ». Il affirme que « les populations locales ont le devoir moral d’aider les déplacés, souvent dépourvus de tout, qui arrivent dans leur pays »
Tiéfing Sissoko, sociologue, estime que cette intégration est un facteur essentiel de bien-être pour les femmes déplacées interne. Elle leur permet de s’épanouir, de retrouver confiance, et de renforcer leur moral. « Dans la plupart des cas, ce sont les femmes qui restent avec les enfants pendant que les hommes cherchent de quoi subvenir aux besoins de la famille. Lors des déplacements, cette charge devient encore plus lourde pour elles. Elles doivent s’occuper des enfants tout en essayant de reconstruire leur vie », explique-t-il.
Une priorité pour le développement durable
La Coordination des associations et ONG féminines du Mali (CAFO) estime que l’intégration des femmes déplacées interne ne doit pas être perçue comme une simple initiative humanitaire, mais bien comme un droit fondamental.
Sa présidente, Goundo Sissoko, appelle à la mise en place de programmes de formation, d’emploi et de soutien financier afin de garantir une intégration durable.
« L’autonomisation des femmes déplacées interne ne doit pas être un simple volet humanitaire, mais une priorité pour le développement », s’exclame-t-elle.
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Il convient de rappeler que le nombre de déplacés internes continue d’augmenter au Mali, non seulement à cause de l’insécurité, mais également en raison des catastrophes naturelles comme les inondations. Selon la matrice de suivi des déplacements (DTM), la majorité de ces déplacés sont des femmes.