Avec les réseaux sociaux, tout le monde semble devenir journaliste. Plus qu’une passion, l’activisme, la défense de causes, est devenue un métier. L’information, qui, est une denrée indispensable au développement et à la démocratie, n’est pas toujours le guide de ces activistes. Les activistes contribuent-ils à la démocratie ou sont-ils de grands manipulés ou manipulateurs ?
Selon Tiona Mathieu Koné, journaliste, ancien directeur de Radio Klédu, “le phénomène a pris corps au Mali comme dans la plupart des Etats africains dans le sillage du multipartisme, qui a été l’ouverture de la prise de parole. De même que le monde des médias est devenu très pluriel et s’est libéré à la suite du pluralisme médiatique est venu se greffer de plus en plus dans divers Etats, ce qu’on appelle l’activisme. On a commencé à voir des éléments se manifester dans les années 2000”.
Djimé Kanté, syndicaliste dans la santé, très actif sur les réseaux sociaux par rapport à toutes les questions de la vie nationale ajoute pour sa part, que l’activisme existe au Mali depuis bien avant l’indépendance. “Il y avait des gens comme Modibo Keita, Fily Dabo Sissoko, qui dénonçaient le colonialisme. Son évolution au Mali est liée au développement de médias sociaux avec la démocratie qui a permis la liberté d’expression”, ajoute-t-il.
Les mouvements activistes sont un phénomène quasi mondial, dans tous les pays où l’expression est libre, où la démocratie est libre.
Djimé Kanté, activiste
Ils ont connu un succès et une explosion avec l’émergence de nouveaux moyens de communication, pense Yaya Traoré, politologue. Pour lui, “les causes défendues pour les activistes sont multiples. Il faut tout de même souligner que l’activiste vit dans une société. Il s’empare des préoccupations de sa société et s’en fait une sorte de porte-parole”. Pour le politologue, l’activisme n’est pas forcément un métier, même si selon lui, certains en ont fait un gagne-pain. “Mais je le définirais plus comme une nouvelle activité, une nouvelle forme d’expression sur la place publique, fait par de nouveaux acteurs, qui ne sont pas forcément des professionnels de médias”.
Yaya Traoré, politologue
De son côté, Nouhoum Keita, activiste, situe au début des années 1990, lors des grands mouvements politiques qui ont secoué le continent africain, en pleine quête de démocratie et du multipartisme, le début de l’activisme au Mali. “Mais, c’est véritablement à partir des années 2000, Qu’on assiste à la naissance de véritables courants d’idées“.
Nouhoum Kéita, journaliste et activiste
“L’activiste a pour mission fondamentale de mettre à jour les incohérences et les disfonctionnements du système politique. Proposer des solutions et alternatives“, pense pour sa part, El Khalil Mohamed, sociologue.
Pour lui, l’activiste, c’est le fait d’adhérer à un concept, à un principe de vie ou à un mode de vie, mettre les choses dans leur contexte et défendre la justice, l’équité, le respect de l’humanité. “Au Mali, malheureusement on a que des activistes politiques parce qu’ils traitent que les questions politiques. Alors qu’il doit y avoir des activistes environnementalistes, des activistes qui luttent pour la cause de la biodiversité, pour la cause du respect des institutions”.
Selon le sociologue, un activiste, son rôle c’est d’être le rapporteur de la proie, c’est-à-dire de la justice et doit toujours être un homme libre et équitable. Un homme, qui résiste devant l’argent, qui résiste devant les faits devant les promesses, mais qui se tient toujours aux côtés des opprimés, c’est ça l’activiste. Souvent c’est de donner le signal. Son rôle c’est aussi encore d’alerter.
El Khalil Mohamed, sociologue
Tiona Mathieu Koné, lui, définit l’activiste comme un “comme un défenseur de causes, comme un donneur d’alerte précoce pour anticiper sur la solution ou bien pour en tout cas conjurer si c’est dans le bon sens. Il ne faut pas que ce soit dans le mauvais sens”.
“Les interventions publiques sont aussi plurielles. Les gens comparent et arrivent à faire leur choix soit le rejet, soit l’applaudissement. Si, on constate aussi la constance dans la défense de la cause qu’elle soit politique ou bien économique ou bien de gouvernance etc., poursuit notre interlocuteur”.
Entre convictions et profession
“Je pense que quelqu’un qui a constaté une cause valable d’intérêt général et qui croit faire dans sa défense, cette cause, elle peut être même liée au genre. Ce n’est pas pour rien, qu’on dit qu’elle est féministe et de genre etc. Mais c’est parfois aussi lié à l’actualité il se saisisse des questions d’actualité. Je ne sais pas si on ne devient même pas des activistes malgré soi”.
“L’activiste défend une cause. Si un candidat politique dans son programme, il y a concordance de vision. Un activiste peut faire ce beau couple, mais à la longue, je crois que les auditeurs ne sont pas bêtes, les partisans de ce patriotisme ne sont pas bêtes, ils savent écouter, comparer, analyser”, conclut Tiona Mathieu Koné.
Pour Djimé Kanté, on peut être militant politique et activiste. “Nous avons des activistes, qui défendent leur religion, d’autres militent pour des causes”.
Pour lui, l’activiste peut appartenir à une formation politique ou une confession religieuse. Il peut aussi être de n’importe quelle classe sociale, qui défend les causes selon ses intérêts et il tire sur la sonnette d’alarme.
Au sein d’une formation politique, on est plus activiste. En ce moment, ils s’approchent plus des journalistes, c’est-à-dire informer ses followers sur les prouesses politiques de sa formation politique et vraiment essayer de vulgariser un peu les idées.
Pour M. Kéita, ce n’est pas en soit une profession, mais une conviction, un engagement permanent. “C’est une conduite, un trait de caractère qui, dans ses principes d’action, met en avant, l’action et l’initiative personnelle“.
“Je suis un altermondialiste et en même temps je suis un dirigeant politique. Il n’existe aucune contradiction entre les deux. Mon engagement altermondialiste n’est que le prolongement de mon engagement politique. Il n’y a aucune contradiction entre les deux, l’activiste ou le politique est le produit d’un processus historique“.
Les sujets traités par les activistes concernent la vie en cité. Il revient à l’activiste de se prononcer sur le sujet qu’il juge important, ce sont des sujets importants et relatifs. Qu’Ils se prononcent très souvent sur des sujets qui préoccupent les populations. Il peut y avoir des dérives dans les expressions, que ce soient les médias, les scènes publiques. Tout cela est régi par des lois. En dépit de ces éléments, ce sont des acteurs très importants, qui contribuent au dynamisme de la citoyenneté.
“L’activiste est un citoyen comme les autres, il est libre d’avoir des préférences politiques, il peut même être militant d’un parti politique. Mais, cela peut influer ses analyses sur les éléments qu’il diffuse. Il n’est pas interdit à un activiste d’être dans ce qu’on appelle le jeu partisan”, ajoute Yaya.
Le travail nourrit-il sont homme ? Les avis sont partagés à ce niveau. Pour Djimé Kanté, “je constate au Mali, c’est vrai que je vois quelques-uns, qui en font leur métier mais ceux-ci sont généralement des journalistes. Ils sont journalistes et aussi activistes donc, ils ont leurs blocs personnels. Bon ça peut les nourrir parce qu’ils cherchent des informations, qu’ils peuvent mettre au niveau d’autres médias”.
“Je suis interpellé par tout ce qui est injustice et social, donc je suis responsable syndical, les causes des travailleurs m’interpellent beaucoup, mais au-delà de ça toutes formes d’injustices m’interpellent”, ajoute pour sa part Nouhoum Koné, activiste et responsable politique.
“Si des partis politiques ont des visions et des programmes sociaux, pourquoi pas ? S’il y’a un programme social pour un parti politique et que l’activiste a une vision d’un monde social, il peut défendre la cause du régime social au Mali. Mais, le fait de ne pas être dans un parti politique parce que on défend une idéologie dans le parti politique pour avoir de l’argent ou pour avoir de poste, ça c’est dangereux”, soutient pour sa part, El Khalil Mohamed, sociologue.
L’activisme n’est pas perçu par certains comme un métier, mais plutôt comme un devoir de citoyenneté. Cette activité est exercée par une catégorie de personnes, qui œuvrent soit pour dénoncer des faits, soit pour promouvoir et défendre des actions du régime sur place. Mais en réalité, qu’en est-il réellement, est-ce du journalisme ? Les activistes et les journalistes sont-ils confondus ? Le journalisme est régi par l’ethnique et la déontologie en est-il de même pour l’activiste ?
Aminata Agaly Yattara
Mali Tribune