Depuis le déclenchement en 2011 de la crise migratoire, les pays méditerranéens s’interrogent sur les contours de ce phénomène et essaient d’apporter des réponses à même d’endiguer ce flux incessant de personnes, tout en réfléchissant à des mesures abordant la question sur le long terme et une gestion du dossier, loin des amalgames et des raccourcis réducteurs.
L’Italie, qui ne fait pas exception et qui, depuis dix ans, fait face à une déferlante inédite de migrants, met en œuvre depuis un an, et notamment avec l’arrivée au pouvoir du tandem, Mouvement des Cinq Etoiles et la Ligue du Nord de Matteo Salvini, une politique dite de recouvrement des frontières maritimes et terrestres, empreinte de plus de fermeté et d’une gestion des situations au cas par cas.
Dans cette politique de durcissement de l’approche et de la gestion du dossier des migrants, un pays, le Niger, revêt une importance toute particulière dans le dispositif sécuritaire mis en place par les autorités italiennes.
Et à ce titre, Niamey reçoit depuis trois ans des financements l’aidant à mieux sécuriser ses frontières et obtient des moyens militaires et logistiques pour parer au plus urgent. Par ailleurs, une ambassade a été récemment ouverte pour mieux gérer cette coopération, qui prend d’ailleurs plusieurs formes.
De fait, le gouvernement italien a consenti à débloquer une substantielle enveloppe en faveur du Niger, englobant l’assistance médicale, énergétique et celle ayant trait à la dépuration des eaux pour les besoins urbains.
Mais cette sollicitude, aussi nouvelle qu’intéressée, participe, selon un expert au fait du dossier, à un engagement plus large, pris au niveau européen, ayant pour objectif d’allouer des fonds importants à certains pays et visant à externaliser le contrôle des frontières dans les pays d’origine et de transit des migrants.
Cet expert est d’avis, en outre, que la gestion des frontières, tant à l’intérieur que hors de l’espace européen, passe par le renforcement du rôle de l’agence Frontex dans les opérations de rapatriement et d’identification, en étroite collaboration avec des pays associés, dont précisément le Niger, chargé de bloquer les migrants en provenance des pays d’Afrique subsaharienne.
Et de prime abord, cette coopération semble porter ses fruits, puisque le flux de personnes traversant ce pays et se dirigeant vers l’Europe a fondu en quelques années, passant de 150 000 par an à moins de 5 000 en 2019.
Mais voilà, un diplomate italien chargé du suivi avec Niamey confiait tout récemment à un média romain que la partie nigérienne a clairement fait savoir que la dotation reçue par Rome, et à un degré moindre par d’autres pays européens, pour bloquer les filières de l’immigration clandestine devrait être revue à la hausse, surtout au vu de celle reçue par la Turquie pour la même finalité et qui dépasse les 6 milliards d’euros par an.
L’Italie, poursuit ce diplomate, est donc appelée aujourd’hui à faire jouer ses relais et à renforcer cet axe avec Niamey et à préserver un partenaire si utile, en faisant intervenir, ajoute-t-il, le fonds fiduciaire pour l’Afrique et les questions stratégiques et contenter ainsi le gouvernement nigérien.
D’autant que la politique de «tolérance zéro», si chère à l’homme fort du gouvernement italien, Matteo Salvini et grand vainqueur des récentes élections européennes, a besoin de partenaires stables et solides pour mener à bien cette entreprise.
Et des pays comme le Niger et l’Egypte sont de par leur disponibilité à accéder aux requêtes de Bruxelles aussi décisifs que déterminants dans cette stratégie et cette nouvelle approche italienne et européenne.
M. R.
Algerie patriotique