En soutenant que le problème du Nord ne concerne pas le développement, mais qu’il est d’ordre politique, les rebelles touareg du MNLA envoient renvoient au diable les avocats autoproclamés du diable et donnent l’occasion d’apporter les vraies réponses à leurs fausses questions.
S’il est une constance reconnue aux rebelles de Kidal, c’est bien leur constance dans l’inconstance. En effet, après avoir tympanisé et ameuté le monde entier sur une insuffisance de développement chronique de leur région, les voilà, sans coup férir, qui changent de disque et de musique. Le problème du Nord (à comprendre par Kidal), ce n’est plus le développement comme ils ont eu à le clamer urbi et orbi pour s’aliéner la sympathie d’organisations plutôt anarchistes faisant de la récupération d’un désordre institutionnalisé par un groupe éthique.
Double constat
Voilà qui impose une reconversion forcée à des organisations en manque de popularité et de reconnaissance. Ainsi après avoir soutenu, pendant plusieurs années, la théorie du complot contre le peuple touareg, victime de discrimination de la part du pouvoir central, ils se retrouvent dans une posture où ils doivent se dédire ou décider malgré tout, s’il faut poursuivre le compagnonnage avec les rebelles touareg ou s’il faut les laisser assumer seuls les conséquences de leurs errements bien calculés. L’équation est d’autant plus difficile à résoudre pour ces organisations publiques et privées, qu’il s’agit pour elles de jouer le peu de crédit qui leur reste après avoir été menées en bateau par des rebelles qui brillent dans l’art de rouler dans la farine tous ceux qui veulent leur apporter aide et assistance pour l’aboutissement de leur cause.
Désormais, le problème du Nord est politique et il faut le régler politiquement.
C’est ce qui ressort d’une récente déclaration du porte-parole du MNLA. Il a été suivi en cela par le vice-président du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA).
Le week-end dernier, à la faveur des Assises nationales sur le Nord, des délégués et participants, membres de la Commission réconciliation, nationale, cohésion sociale et le vivre ensemble, ont embouché la même trompette.
Àu regard de cette donne, deux choses paraissent clairement.
Primo, la question de développement tant brandie par les rebelles touareg de Kidal n’était qu’un dilatoire visant à accabler l’État, même si le déficit est réel en matière de développement pour ceux qui n’ont l’avantage et le privilège de disposer des armes, de s’en servir et de vivre de l’argent des rançons et autres avantages injustement accordés.
Secundo, les revendications d’indépendance, d’autonomie, de fédéralisme des rebelles revêtent enfin tout leur sens.
En réalité, tout ce boucan des rebelles visait à créer les conditions requises pour s’affranchir de la tutelle de l’État malien ; former une entité à part sous l’appellation d’Azawad.
Double réponse
Mais la sagesse enseigne que lorsqu’on mange la soupe avec un diable, il vaut mieux avoir une cuiller à longue queue. Autrement, ce n’est pas parce qu’on partage le même avec lui que l’on est forcément amis.
De toute évidence, le nouveau Président IBK, qui doit s’y connaître dans les manœuvres des rebelles, a compris le jeu en leur coupant l’herbe sous les pieds. Il donne une réponse autant à la vraie qu’à la fausse équation posée.
Pour le développement, un programme de développement accéléré des régions du Nord vient d’être finalisé.
Il permettra de combler les nombreuses lacunes dont tout le monde a conscience. Cela, au nom de la solidarité nationale ; mais également pour la stabilisation du pays.
Le Président IBK soutenait à l’ouverture des Assises nationales, le vendredi dernier, au CICB, que la stabilité du pays passe par la résolution de la crise du Nord. Une réponse efficace et durable serait un important pas pour la résiliation de cette crise devenue cyclique.
Quant à la dimension politique, la réponse du Président IBK porte sur une régionalisation à travers une décentralisation poussée. Toutes choses qui comporteront un transfert effectif des compétences et des ressources et un appui technique fort de l’État à l’endroit des communes qui en feraient la demande.
IBK a expliqué lors de l’ouverture des Assises nationales sur le Nord qu’une régionalisation authentique créera des pôles de développement. Naturellement, a-t-il précisé, toutes les régions seront concernées par ce mode de gestion qui permet aux populations de choisir démocratiquement leurs représentants ; mais également de leur demander des comptes et de les sanctionner à l’heure du bilan des activités.
Fin de course
Ces ouvertures étant faites, le Président IBK se montre intraitable quant à l’intégrité du territoire et l’unité nationale.
« Tout est négociable sauf l’intégrité territoriale, l’unité nationale, la forme républicaine et laïque de l’État », répète-t-il à qui veut l’entendre.
À l’issue des Assises nationales, il se retrouve conforté dans cette position d’autant plus que personne n’a trouvé à redire là-dessus ; même si un participant lassé a préconisé d’amputer le membre malade.
Un médecin de profession ayant occupé de hautes fonctions politiques, membre fondateur d’un des plus grands parti politique du pays, de lui faire comprendre : « Si les chirurgiens sont prompts à amputer pour sauver le reste du corps ; chez nous les médecins, nous nous battons pour sauver et le membre gangrené et le reste du corps ».
En définitive, les rebelles, qui ont réussi à entraîner d’autres groupes dans leur folle épopée, n’ont plus d’autre option que de se ranger et d’emprunter le train de la paix et de la réconciliation nationale.
À moins de vouloir se retrouver seul contre tous. Et pour cause, son pied de nez fait à ses partisans n’est pas particulièrement pour l’aider.
Ce à quoi s’ajoute une série d’erreurs stratégiques qui ont sérieusement entamé sa cote au sein de l’opinion internationale qui n’est plus loin de la caser dans le même box que les terroristes.
Dès lors, exit les avocats commis d’office par de obscures officines ; mais également la graine du mal enfouie dans de nombreux cœurs.
La double solution des pouvoirs publics devrait exorciser et les rebelles et ceux qui, à mille lieues, s’intronisent sauveurs d’une minorité qui n’est réalité victime que d’elle-même.
Par Bertin DAKOUO
Source: Info-matin