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Le Bolon : Un instrument mythique en voie de disparition

Le bolon ou bolon bato est un instrument de musique à cordes du Mandé, mais que l’on retrouve aussi dans les terroirs sénoufo, minianka et bamanan. C’est une harpe-luth, sorte de basse à trois cordes proche du ngoni ou de la kora qui date du XI siècle. Contrairement à ces deux instruments, le bolon est plus que jamais menacé de disparition faute de joueurs le maîtrisant parfaitement comme Habib Sangaré alias Dia Bolon (notre photo) qui a réussi à corriger certains de ses handicaps.

 

«Il est important que nous pensions à la préservation de nos instruments traditionnels classiques», alerte Rokia Traoré en faisant référence aux menaces qui planent sur le bolon, un instrument mythique du Mandé. «Le bolon est sans doute le premier instrument traditionnel menacé de disparition aujourd’hui au Mali», précise Habib Sangaré dit Dia Bolon, un virtuose de l’instrument. «C’est pourtant l’un des tous premiers instruments traditionnels découverts au Mandé. Il n’était joué que lors de grands événements comme les funérailles d’un roi ou pour accompagner de braves guerriers sur les fronts voir les accueillir après des exploits de guerre». Jadis, il fut un instrument doté d’une fonction martiale, funéraire et cérémoniale.

Une fonction qui va naturellement évoluer avec le temps. «Tout le monde peut aujourd’hui jouer du bolon, pas seulement les griots. Même si, jadis, on l’entendait à la veille des guerres pour encourager les guerriers ainsi qu’après la bataille pour chanter les louanges des rois et des combattants qui se sont illustrés sur les fronts par leur bravoure.

Aujourd’hui, c’est derrière les cultivateurs que cet instrument est joué généralement», expliquait récemment à la presse Seydou Koné dit Bolon Seydou (artiste-chanteur de Monzondougou Kondé, Zantiébougou/Région de Bougouni), un autre virtuose de l’instrument. «Le donso ngoni vient du bolon. On a dû donner le ngoni aux donsos (chasseurs) et le bolon aux cultivateurs. Le bolon n’est pas joué pour celui qui ne peut pas se nourrir et nourrir les autres… Le bolon n’est pas joué pour tout le monde», a-t-il indiqué.

Comparativement aux autres instruments traditionnels comme le ngoni, le kamalen ngoni ou la kora, le bolon n’est pas très connu. Aujourd’hui, les virtuoses de l’instrument ne sont pas légion et il était très peu sollicité par la musique moderne. Cet instrument a longtemps été confronté à un problème d’accord avec d’autres instruments. Ce qui fait que ses joueurs n’étaient pas assez sollicités. «La différence entre le bolon et les autres instruments à cordes comme le ngoni et la kora se situe au niveau de la modulation. Il était difficile à accorder parce que ne s’adaptant pas facilement au changement de gamme… Cela a été un handicap difficile à surmonter», reconnaît Dia Bolon.

Mais, cela est aujourd’hui un acquis. «Aujourd’hui, le bolon peut s’accorder avec n’importe quel instrument. Il peut s’adapter à tous les genres musicaux. La preuve est que, en dehors des artistes maliens, j’ai collaboré avec des Américains, des Allemands, des Danois…», se réjoui-t-il.

«Le bolon n’ayant pas assez de cordes (trois), il faut souvent les tirer ou les redescendre selon la tonalité du titre. Comment faire pour que les titres qui se suivent et qui n’ont pas la même tonalité ne subissent pas des problèmes de désaccord avec le bolon ou qu’on ne se retrouve pas à accorder l’instrument pendant le spectacle, donc devant le public…

Ce sont des équations que nous avons eues à résoudre en faisant par exemple de sorte qu’il y ait des morceaux sur lesquels il ne joue pas pour lui donner le temps de s’accorder…», explique la rossignole du Bélédougou, Rokia Traoré.
«Je lui ai trouvé aussi un accordeur car pour la Fondation Passerelle, en dehors de la collaboration artistique, il y avait un acte militant parce que le bolon est un instrument en voie de disparition», ajoute Rokia dont le projet musical, «Dream Mandé» vise à promouvoir les classiques et les instruments traditionnels.

Très attaché à cet instrument, Dia Bolon nourrit beaucoup de projet de vulgarisation, de promotion. «Mon ambition, c’est de pouvoir ouvrir une école bolon pour initier les enfants, les adolescents et les jeunes. J’espère pouvoir bénéficier des autorités maliennes le soutien nécessaire à la réalisation de ce projet», nous confie le virtuose.

Il faut rappeler que Kolondiéba (Région de Bougouni) a son «Festival du bolon» dont la 3e édition a eu lieu du 22 au 24 mars 2019 sur le thème «culture et développement local». «Avec ce festival, je crois que nos valeurs et nos cultures seront connues et mises en exergue. Je fabrique le bolon et j’ai des enfants que je forme sur la fabrication et comment jouer cet instrument», a indiqué Bolon Seydou en marge de la 3e édition.

Mais, il faudra plus que le talent des joueurs du bolon et la passion de ceux qui vibrent au rythme de ses mélodies pour sauver cet instrument. Il faut une politique nationale de préservation de nos instruments traditionnels. Tout comme des classiques de nos différents terroirs artistiques et culturels !

Moussa BOLLY

Source : L’ESSOR

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