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La tribune du lundi : Combattre la corruption : le jeu en vaut-il la chandelle ?

La corruption est un fléau qui n’épargne aucun pays du monde (qu’il soit développé ou en voie de développement). Les articles précédents ont évoqué les notions, les causes, les types et l’emprise de la corruption pour permettre au citoyen lambda de comprendre la gravité du problème

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Dans de nombreux pays, plusieurs études ont été faites pour mieux comprendre les causes de la corruption afin de trouver des solutions pour la combattre. Au Mali, la volonté politique a été affichée pour lutter contre la corruption, mais il faut se rappeler de Marie CURIE:  » On ne fait jamais attention à ce qui a été fait; on ne voit que ce qui reste à faire. »

Je vais, dans cet article, faire comprendre au citoyen lambda malien que la corruption, malgré son caractère nocif, peut s’avérer être utile économiquement, politiquement et administrativement.

Une question préalable s’impose. A-t-on la certitude que la corruption soit une mauvaise chose pour la société ou pour l’organisation à laquelle on appartient ? Et de fait, dans le contexte de nos pays en développement, n’est-il pas possible que, tout compte fait, la corruption soit un phénomène plus sain que nocif ?

Ces questions risquent d’être stupides aux yeux des citoyens qui essaient de récupérer les milliards que certains dirigeants ont fait sortir du pays en les mettant dans les lieux sûrs. Ces questions peuvent, aussi, susciter la colère des responsables des administrations publiques qui, chaque jour, s’évertuent à résoudre le problème des comportements illicites. Au spectacle des types de corruption découverts, nous avons la certitude que ce genre de comportement est socialement préjudiciable. Et pourtant il se trouve que les travaux des sciences sociales relatifs à la lutte contre la corruption tournent, pour une large part, autour de la question de savoir si, en règle générale, la corruption facilite ou entrave le développement.

Trois points de vue se dégagent quant à l’utilité de la corruption. Nombreux sont les universitaires qui ont soutenu que la corruption pouvait jouer un rôle positif et utile dans les pays en développement. Cette affirmation est, tout aussi, troublante que l’idée selon laquelle le niveau optimal de corruption n’est pas le niveau zéro. Mais elle va plus loin : elle ne veut pas simplement dire que la lutte contre la corruption risque d’être si coûteuse que le jeu n’en vaille pas la chandelle ; elle signifie que la corruption, elle-même, peut être source de bienfaits en matière économique ou de gestion. Il me parait utile de classer en trois catégories les arguments selon lesquels la corruption peut, à l’occasion, être bénéfique. Il s’agira des points de vue de l’économiste, du politologue et de l’administrateur.

Le point de vue de l’économiste comporte deux aspects. Tout d’abord une prévision : les forces du marché sont difficilement évitables. Quand on ne recourt pas au marché pour distribuer les biens et les services, on voit la corruption s’insinuer comme une sorte de substitut illicite. En second lieu, une appréciation : lorsque la corruption intervient, elle peut se traduire par une distribution des biens en fonction de l’empressement et de la capacité à payer. Ce phénomène peut, en fin de compte, se révéler économiquement efficace – et donc, peut-être, socialement utile.

Le point de vue du politologue. Les versements d’argent, les nominations et les initiatives publiques inspirés par la corruption peuvent comporter des avantages politiques. Les politiciens peuvent, très bien, utiliser la corruption pour favoriser l’intégration politique de diverses tribus, régions, élites ou factions – attitude qui peut, finalement, être source d’harmonie face à la fragmentation de l’autorité politique, aux hostilités, aux désunions. Analytiquement, on peut apparenter certains types de corruption à des renvois d’ascenseur ou à l’application de quotas préférentiels en faveur de telle région, tel groupe ethnique, tel parti. Même si ces procédés ont, en général, reparti les avantages gouvernementaux selon des voies qui sont le contraire d’une répartition en fonction du mérite ou du besoin maximum de prestations, ils peuvent, néanmoins, présenter des avantages politiques. Indépendamment des avantages évidents que peuvent en tirer les politiciens corrompus, il se peut, donc, que le corps social dans son ensemble bénéficie de la corruption.

Le point de vue de l’administrateur. La corruption peut avoir une certaine utilité au sein d’un organisme administratif. Dès lors que celui-ci a des règles bureaucratiques contraignantes, il peut lui arriver de profiter des procédés malhonnêtes utilisés par les employés pour contourner le règlement. Une marge limitée de vols, de détournements de fonds, d’états de dépenses inexacts, de ristournes, de graissages de patte, etc. peut-être, tacitement, tolérée par les hauts dirigeants, d’une part, parce que venir à bout de ces activités illicites coûterait une fortune et, d’autre part, parce que ces sources illicites de revenu peuvent, en fin de compte, se substituer aux hausses de salaires. La caisse noire d’un organisme administratif peut fonctionner comme une sorte de fonds de réserve où les dirigeants sont libres de puiser, en toute illégalité mais avec souplesse, afin de promouvoir les objectifs de leur institution.

Nous voyons bien que ces trois points de vue ont plusieurs traits en commun. En premier lieu, ils parlent des avantages tirés, non pas, de la corruption systématique présente dans la plupart des décisions qui sont prises, mais d’actes précis de corruption. En second lieu, les avantages espérés sont liés à l’idée qu’en fait la corruption transgresse une politique économique erronée ou inefficace, transcende les limites d’un système politique imparfait et échappe aux défectuosités de la réglementation administrative. Bref, si le système environnant est mauvais, la corruption peut alors avoir du bon.

Ainsi, le citoyen lambda doit comprendre que l’argent de la corruption n’est pas en    lui-même productif, car il n’ajoute pas à la quantité globale de biens et de services disponibles pour la société. Cependant, si cet argent efface ou atténue dans leurs effets certaines mesures inefficaces, alors, malgré sa nature improductive, il peut conduire à une plus grande efficacité et, par ce biais, à une plus grande abondance de biens et de services. Mais supposons que la corruption vienne altérer des mesures d’intérêt public par ailleurs efficaces. Dans ce cas, le résultat sera doublement nocif : car, non seulement, l’argent de la corruption est socialement improductif, mais il débouche sur des mesures socialement inefficientes. C’est, seulement, lorsque la corruption contourne des altérations déjà existantes qu’elle peut être économiquement, politiquement et institutionnellement utile. Donc, la corruption peut servir ici et nuire là.

Jules-Paul TARDIVEL:  » Le vrai patriote s’inquiète, non du poste qu’il doit occuper dans la patrie, mais du rang que la patrie doit atteindre parmi les nations « .

Dr. Sékou DIAKITE

Président de l’Association

 » Mouvement pour le Changement à Kati  (MCK) »

source :  Zénith Balé

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