D’après la petite histoire, on aurait remis au président IBK, il y a quelques années de cela dans le pays mandingue, le bâton de commandement de son a ancêtre Sogolon Djata dit Soundjata Kéita, souverain sans partage de l’empire du Mali, au treizième siècle. Ses parents de Kurukan Fugan, où fut signée une charte révolutionnaire pour son époque, 1236, seraient rentrés dans la grande histoire si, au lieu d’un sceptre, même de commandement, ils lui avaient offert la barre de fer (miraculeusement transformée en arc, selon la légende) qui aurait permis à son ancêtre perclus de se tenir debout et de marcher enfin, après avoir rampé pendant une très grande partie de son enfance.
Le Mali des Kéita, qui rampe depuis janvier 2012, a en effet grand besoin de se tenir debout.
Un an après son accession au trône, le Roi du Mali IBK 1er ne parvient pas à se redresser, rampant désespérément pour fuir les attaques fusant de toutes parts, celles ouvertes de l’opposition comme celles feutrées de la mouvance présidentielle. Si le grand Simbo préfère bondir et voler sans cesse dans son superbe aéronef, il est grand temps qu’il redescende sur terre et se mette à marcher pour le bonheur des Maliens et l’honneur du Mali.
Personne ne lui demande de construire des ponts, aucun Mandéka n’est parvenu à le faire avant lui, ni Modibo Kéita, le père de l’indépendance, ni Alpha Oumar Konaré, le père de la démocratie. Ce privilège étant réservé aux Grands Touré, Amadou Toumani Touré, l’héritier de la démocratie, a réalisé à lui seul deux grandes œuvres majeures : à Bamako et à Gao (Wabaria). Mais avant lui, il faut noter quand même que Moussa Traoré, l’héritier de la dictature, a également gravé son nom dans le marbre des grandes œuvres en obtenant le financement du deuxième pont de Bamako.
On ne demande pas non plus à IBK de réaliser des échangeurs multiples ou de construire de grands et beaux édifices, comme savent le faire les Grands Touré, on lui demande juste de se relever pour achever la passerelle pour engins à deux roues. Située près du deuxième pont (rive gauche), cette œuvre a été conçue par le Grand Touré et entamée par un autre Traoré, Dioncounda, héritier de la chienlit. Achever et réceptionner, ce n’est quand même pas difficile ou compliqué, même pour un Malinké.
Peut pourtant se relever
Il avait d’autant plus les moyens de se relever que jamais auparavant le Mali n’avait été l’objet de convoitise, de mansuétude et d’attention. Après la désastreuse aventure des putschistes et la préoccupante occupation par les jihadistes, narcotrafiquants, preneurs d’otages occidentaux, rebelles et sécessionnistes, tout le monde voulait aider ce pays à se relever et à se reconstruire. Des milliers de milliards de Francs Cfa lui ont été promis à cet effet. La seule condition était que les autorités s’investissent davantage pour la signature d’un accord durable voire définitif de paix afin que la sécurité donc la paix et le développement soient de retour dans le nord de ce pays.
Douze mois plus tard, une bonne partie de ces milliers de milliards de F Cfa est restée à l’étape de promesse et d’engagement tandis que le capital de sympathie s’est dissipé au fil du temps. Le Mali ne fait même plus pitié. À personne. Sauf peut-être à la Chine où le président Kéita a eu la brillante et lumineuse idée de se faire inviter à un « Forum économique mondial » qui réunit « les nouveaux champions» et que n’importe quel autre monarque aurait dédaigné. Mais pendant que tout le monde l’abandonnait, IBK avait désespérément besoin de nouveaux débouchés amicaux.
Va-t-il enfin se relever et marcher comme Sogolon Djata maintenant qu’on lui a promis monts et ponts, frics et fracs ? Le peuple entier l’espère. Surtout qu’il a les moyens de se relever, lui dont le parti contrôle l’Assemblée nationale avec une majorité plus qu’absolue. Sans compter que le Premier ministre (qui joue encore les utilités mais pas pour longtemps) et la majorité des membres du gouvernement sont à ses ordres et lui ont signé allégeance et idolâtrie. Sans compter aussi que pour bien faire, certains esprits malins ont entrepris de purger et d’épurer la mouvance présidentielle afin d’en prendre le contrôle et de mettre la corde au cou des brebis galeuses.
Ne lui reste plus qu’à régler l’épineux problème du nord pour le règlement duquel plus de 77% des votants lui ont fait confiance. Mais sur ce plan, la partie est loin d’être gagnée, des divergences se faisant jour au sein des six signataires de la feuille de route, entre les médiateurs et facilitateurs, dans les communautés internationales.
Va-t-il se relever et marcher comme Sogolon Djata ?
Cheick TANDINA
Source: Le Prétoire