Suivez-nous sur Facebook pour ne rien rater de l'actualité malienne

La gouvernance au Mali : Indignons-nous! Indignez-vous!

«Que dire de la mentalité et de la pratique de traiter de «maudite», toute personne ayant la possibilité de détourner les deniers publics, et qui ne l’a pas fait ou n’en a pas abusé». Ces propos ne sont pas de moi, mais nous les entendons très souvent au Mali. Quelle honte! A retenir qu’il est tout simplement honteux d’être sans honte…

 drapeau mali vert jaune or rouge couleur flotte

Cependant, il reste une constance qui ne change pas: nous sommes tous Maliens, mais comprenez que nous n’avons pas tous les mêmes valeurs morales. Qu’est-ce qui caractérise la gouvernance au Mali? On peut répondre sans risque de se tromper qu’elle est marquée par l’influence de la politique et de la corruption.

Ce qui nous renvoie à la définition du concept de politique, Selon Wikipédia: «la politique, renvoie à la constitution et concerne donc la structure et le fonctionnement (méthodique, théorique et pratique) d’une communauté, d’une société, d’un groupe social. La politique porte sur les actions, l’équilibre, le développement interne ou externe de cette société, ses rapports internes et ses rapports à d’autres ensembles. La politique est donc principalement ce qui a trait au collectif, à une somme d’individualités et/ou de multiplicités. C’est dans cette optique que les études politiques ou la science politique s’élargissent à tous les domaines d’une société (économie, droit, sociologie, etc.) ».

Contrairement à cette définition, au Mali, la politique est devenue un moyen d’ascension et de réussite sociale à la disposition du premier venu et non de l’élite. Quant au second concept, la corruption, elle se définit «comme la perversion ou le détournement d’un processus ou d’une interaction avec une ou plusieurs personnes dans le dessein, pour le corrupteur, d’obtenir des avantages ou des prérogatives particulières ou, pour le corrompu, d’obtenir une rétribution en échange de sa bienveillance.

Elle conduit en général à l’enrichissement personnel du corrompu ou à l’enrichissement de l’organisation corruptrice (groupe mafieux, entreprise, club, etc.). C’est une pratique qui peut être tenue pour illicite selon le domaine considéré (commerce, affaires, politique…). Elle peut concerner toute personne bénéficiant d’un pouvoir de décision, que ce soit une personnalité politique, un fonctionnaire, un cadre d’une entreprise privée, un médecin, un arbitre ou un sportif, un syndicaliste ou l’organisation à laquelle ils appartiennent».

Cependant, la corruption est subjective mais elle transgresse toujours la frontière du droit et de la morale. Au Mali, la corruption s’est érigée en système. Elle est pernicieuse en raison du système de clientélisme «politique» qui la caractérise, et qui fait que les cadres de nominations ne sont pas très souvent objectifs. Les postes officiels sont attribués le plus souvent à ceux qui produisent des rentes pour leur patron, pour le parti politique, aux chefs religieux, au village, à la famille, au clan ou pour eux-mêmes.

A ce propos, du fait de la nomination d’un de ses membres à un poste stratégique, des partis politiques inaudibles et sans siège social deviennent brusquement visibles et s’implantent dans le pays sur fond de trafic d’influence et de détournements des deniers publics.

Par contre, de temps en temps, des cadres de valeur sont promus mais sont comme des agneaux dans une meute d’hyènes. Comme ce fut ce haut cadre valeureux du corps de la justice au Mali qui a été démis de ses fonctions du fait de son impartialité et de son intégrité. En effet, ces cadres valeureux sont contraints à se soumettre au système et les récalcitrants sont tout simplement démis de leur poste.

Très souvent, certains acteurs notamment des organisations de la société civile (ONG, Syndicats, etc.), sont contraints de vendre leur soutien politique aux partis en échange de concessions, d’emplois et de possibilités d’obtention de rentes.

Quant aux partis politiques dépourvus de tous motifs idéologiques, ils sont composés d’un nombre disproportionné de personnes à la recherche de rentes. Ils s’efforcent d’accaparer les postes dans l’administration publique et de profiter des projets, financés par les bailleurs de fonds, pour récompenser leurs membres, leur permettant ainsi d’acquérir ressources, postes et le pouvoir prédateur d’influer sur les marchés publics de biens et services, etc.

Je me méfie des faiseurs de systèmes et m’écarte de leur chemin. L’esprit de système est un manque de probité. Alors que dire de ce système d’incitations, en cours au Mali, qui se renforcent les unes les autres et fait qu’il est difficile pour un acteur isolé de modifier les règles du jeu. Les partis et les politiciens qui s’y aventurent risquent de perdre leurs appuis politiques, les employés de l’État risquent de perdre leur poste, et les opérateurs économiques privés risquent de ne pas pouvoir concurrencer ceux qui continuent à bénéficier d’un traitement favorable de la part de l’administration.

Dans ce contexte d’une gouvernance mal inspirée et abandonnée par l’élite, au motif de fuir la confrontation pour préserver ses maigres acquis sociaux, comment les maliens pourront atteindre le bonheur et l’honneur tant chanté?
Ce qui est sûr: nous ne pouvons pas «monter»! C’est-à-dire que toute personne, hors du système, est «bloquée» et ne peut bénéficier d’un «ascenseur social mérité» pour les raisons suivantes:

– Toutes les sollicitations des citoyens, auprès de l’administration publique, doivent être motivées pour qu’elles aboutissent. Bien entendu, il ne s’agit pas de lettre de motivation mais plutôt d’espèces sonnantes et trébuchantes, (mêmes les timbres fiscaux sont transformés en marchandises, celui estampé 200 FCFA est vendu à 300 FCFA.)

– Des femmes de ministres et de Directeurs deviennent fournisseurs dans le département ministériel tenu par leur mari, voire commerçantes ou intermédiaires dans le choix des bénéficiaires des marchés publics. Je me souviens de cet ancien Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali (CCIM) qui déplorait la concurrence déloyale des cadres des Direction des finances et du matériel (DFM), qui exécutent des marchés parallèles.

– Les programmes de logements sociaux destinés à assurer un toit décent au plus grand nombre de citoyens sont détournés de leur objectif. Un nombre important de ces logements sont occupés par des locataires ou sont en cours de transformations exubérantes par leur bénéficiaire.

– Que dire de la collusion entre les cadres véreux, les fournisseurs et prestataires de biens et services, collusion encouragée par la politique de budgétisation au Mali basée sur le principe des services votés. L’ordonnancement de 90% des dépenses est juste faite pour rentrer en possession des fonds des lignes de crédits et ne correspond en rien à des fournitures et acquisitions réelles de biens.

Souvent, les fournisseurs de biens et services deviennent des marchands de liquidités, qui amènent de l’espèce sonnante dans les départements, moyennant un paiement sur présentation d’une surfacture, majorée d’un taux d’intérêt en moyenne de 20% et de la documentation pour justifier la sortie des fonds sans aucune livraison de biens et services. Sans oublier qu’au Mali les factures pro forma sont payantes et cet autre outil de contrôle qui s’appelle la Mercuriale des Prix n’est qu’une catastrophe orchestrée depuis le Dibida.

– Quid de l’absence de traçabilité de toutes ces dépenses et détournements au sein de l’administration qui se caractérise par l’absence de comptabilité matière, la tenue manuelle des outils de gestion sur des registres mal renseignés et mal archivés (souvent des pages sont utilisées pour faire du thé quand ce n’est pas un incendie qui a tout emporté, etc.), l’instabilité des agents au poste pour faire disparaitre la mémoire des activités, l’absentéisme des agents, le nombre croissant des agents payés sans poste ni fonction, le clientélisme, etc.

Sans oublier la grande motivation de certains agents qui sont prêts à vendre le pays au premier venu, les licences d’exploitation de nos richesses (dont les seuls retombées pour l’économie malienne s’apparentent à la fiscalité), les titres fonciers, et pire, (au point d’atteindre les profondeurs des ténèbres) sont prompts à délivrer à des terroristes étrangers des pièces d’identité nationale, dans un délai très court, sans l’obligation de faire le rang à 4 heures du matin devant un commissariat.

Aussi, sans gêne aucune, ces fonds volés sont dépensés ostentatoirement au vu et au su de tout le monde et servent dans les meilleurs cas, d’une part, à construire des immeubles, à envoyer des parents à la Mecque, les enfants dans de grandes écoles occidentales, s’offrir des villas sur les différentes rives du fleuve Niger et d’autre part à s’offrir des véhicules de luxe de grandes marques dont le nombre n’est visible dans aucune capitale occidentale et des voyages d’exhibitions à travers le monde, etc.

Pour se convaincre que nous n’avons pas atteint le fond, tout cela est couronné par le titre honorifique que la prison est faite pour les hommes. A cet effet, faire de la prison au Mali ne fait plus honte, cela est une fierté. Je me souviens de cette histoire que l’on m’a racontée sur la vie d’une société importante du Mali: les complices des activités de corruption désignaient, à l’avance, celui qui devrait faire de la prison en cas de découverte de leur forfait et les autres complices interviendraient, si besoin,  pour le faire libérer, grâce aux fonds mis de côté à cet effet. Quelle perte d’énergie et d’intelligence au service de sa propre destruction!

Après tout, nous croyons au bonheur car nous avons foi en Dieu, mais avec une politique de l’Autruche. Le bonheur pour moi peut se définir comme une société sans corruption ou le peuple peut s’éduquer par lui-même, se nourrir, se soigner facilement et non que la santé soit un luxe accessible qu’à vol d’oiseau sur d’autres continents.

Pour ne rien arranger, nos autorités ont fait le choix d’investir nos maigres ressources au profit d’activités sans valeur ajoutée, notamment la construction de sièges et de bâtiments à coup de milliards avec leurs lots d’avenants et tout cela  pour des structures qui n’apportent aucune contribution au bonheur des Maliens, ni visibilité, ni ressources pour le pays, au lieu d’activités contribuant au bien-être du peuple.

Quel gâchis! Quel paradoxe quand, au même moment, nous souhaitons atteindre le bonheur et l’honneur. La mauvaise nouvelle c’est que nous ne pouvons pas «monter», j’en suis sûr car depuis belle lurette nous occupons jalousement le Ministère de la parole au lieu de celui des actions. Par contre, avec un peu de chance et de remise en cause, nous pouvons «grimper». D’aucuns me diront quelle différence entre «monter et grimper»? D’où l’intérêt de la nuance, car pour grimper nous allons nous accrocher pour y arriver. Alors!  Maliens, à quoi s’accrocher?

La bonne nouvelle: nous pouvons «grimper»!
Avec de l’optimisme, nous allons y arriver. A ce propos Nelson Mandela a dit: «Je suis fondamentalement optimiste. Je ne saurais dire si c’est dans ma nature ou si je l’ai cultivé. Une partie de ce qui fait un optimiste, c’est de garder la tête tournée vers le soleil en mettant un pied devant l’autre».

– Grimpons en nous accrochant aux valeurs sociétales d’antan de notre grande nation malienne.

– Commençons par la lutte contre la corruption et, comme premier acte de lutte contre la corruption, arrêtons de donner des bonbons ou des pièces de monnaies aux enfants pour qu’ils nous sourient.

– Formons notre jeunesse dans les familles, dans les champs, au village, dans les hameaux, pâturages, à l’école et surtout à la culture et à l’enseignement de la morale ainsi que l’instruction civique pour éviter la compromission avec le mal. Une fois ces besoins fondamentaux satisfaits, l’individu “éduqué” pourra faire valoir ses ambitions au sein de la communauté à travers un emploi notamment et mettre ses compétences au service de cette même communauté

– Mettons aux destinées du pays des dirigeants qui répondent aux qualités d’honnêteté, de patriotisme, de bravoure, de probité, etc. Comme ces grands hommes qui ont fait l’histoire du Mali, la fierté du Mali, la gloire du Mali (il y en a eu c’est sûr). Il nous faut des dirigeants animés de patriotisme, de vision pour le pays, de rigueur, de responsabilité, bref tout ce qui peut amener à «grimper» pour atteindre l’Honneur, le Bonheur et la Justice sociale au Mali.

– Restructurons et réorganisons la Société civile malienne afin qu’elle puisse pleinement jouer son rôle. Il est urgent que la société civile prenne en main sa destinée, qu’elle ne soit plus actrice des événements qui se déroulent sous ses yeux mais qu’au contraire qu’elle s’implique dans la vie de la communauté, qu’elle développe son libre arbitre à chaque fois que cela sera nécessaire, qu’elle  fasse valoir ses droits et ses ambitions notamment le droit de tout être humain à pouvoir manger “à sa faim”, à avoir un toit, à accéder à l’enseignement, aux soins. Pour moi, le politique est redevable de cela envers son peuple et se doit d’être au service du plus grand nombre;

– Assurons aux chefs religieux un rôle neutre dans la vie politique afin qu’ils garantissent l’apaisement social, la bonne conduite, la spiritualité et l’équilibre dans la société.

-Enfin, faisons nôtres les quatre points cardinaux que sont la Probité, la Bonté, la Dignité, la Justice.
Une chose est sûre, parmi les 16 millions d’habitants du Mali, il y a eu, il y a et il y aura toujours des hommes honnêtes, braves, intègres, justes, patriotes, dévoués, sur qui le Peuple pourra compter, afin de retrouver ses vraies valeurs d’antan avant qu’il ne soit trop tard.

C’est pour toutes ces raisons, indignons-nous (Peuple du Mali), à la fois victime, complice, observateur sans broncher ou souvent même quelque peu admiratif de la gestion de la rente volée. Cela est visible comme le ciel qui n’a point besoin qu’on le montre. Indignez-vous, les sangsues des pauvres et des sans défense, aux voleurs de la république, aux assassins des enfants, des femmes et des vieux, destructeurs de l’avenir des enfants et du peuple, Indignez-vous tout simplement de la rente entachée du sang des pauvres et de la misère visible aux feux tricolores et sur la place de la République.

Je finis par ces propos de Yvan Castanou: «Hier est mort et ne reviendra jamais plus, demain n’est qu’une espérance et vous récoltez aujourd’hui le fruit de ce que vous avez semé ou laissé semé en vous hier. Si vous voulez que demain soit meilleur à aujourd’hui vous devez vous engager dès aujourd’hui à semer ce que vous voulez récolter demain».

Abdramane MAÏGA
abdramanemaiga56@gmail.com

Source: 22 Septembre

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Suivez-nous sur Facebook pour ne rien rater de l'actualité malienne
Ecoutez les radios du Mali sur vos mobiles et tablettes
ORTM en direct Finance