PARIS (Reuters) – Les ministres français des Affaires étrangères et des Armées se rendent jeudi et vendredi au Niger pour redessiner la stratégie de la France au Sahel après le retrait des troupes françaises du Mali, alors que les Etats côtiers d’Afrique de l’Ouest sont confrontés à la menace croissante de groupes armés islamistes.
Les coups d’Etat de ces derniers mois au Mali, au Tchad et au Burkina Faso ont fragilisé les alliances de la France avec ses anciennes colonies, renforcé l’emprise des milices djihadistes dans la région et ouvert la voie à une influence accrue de la Russie.
Le départ programmé d’ici la fin de l’été des 2.400 soldats français du Mali, épicentre des violences au Sahel et fief du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al Qaïda, et de l’Etat islamique au Grand Sahara, fait redouter une multiplication des violences et la crainte d’une déstabilisation des pays voisins.
Le Niger, où sont attendus jeudi soir Catherine Colonna et Sébastien Lecornu, va devenir la plaque tournante de l’opération militaire française dans la région, avec un millier d’hommes basés à Niamey ainsi que des avions de combat, des drones et des hélicoptères.
Trois à quatre cents militaires seront déployés pour des opérations spéciales avec l’armée nigérienne dans les régions frontalières avec le Burkina Faso et le Mali, ont précisé des responsables français lors d’un briefing avec des journalistes.
Un contingent de 700 à 1.000 hommes sera parallèlement basé au Tchad, et un nombre non précisé de militaires des forces spéciales continueront d’opérer ailleurs dans la région.
Les forces françaises ne mèneront plus de missions – et ne pourchasseront plus d’activistes armés – en territoire malien une fois le retrait achevé, ont ajouté ces responsables.
« SÉCURITÉ ET DÉVELOPPEMENT INDISSOCIABLES »
« Au-delà du Mali, le recul démocratique en Afrique de l’Ouest est extrêmement préoccupant avec des putsches successifs au Mali par deux fois, en Guinée en septembre 2021, au Burkina Faso en janvier de cette année.
La France continuera néanmoins en dépit de ces événements, de ce retrait du mali, à « aider les armées ouest-africaines à lutter contre les groupes terroristes », a déclaré Catherine Colonna mardi lors d’une audition à l’Assemblée nationale.
« Nous menons actuellement des consultations avec nos partenaires concernés pour définir avec eux, en fonction de leurs demandes et de leurs besoins, la nature des appuis que nous pourrons leur fournir », a-t-elle ajouté.
L’objectif est de présenter une nouvelle stratégie à Emmanuel Macron en septembre, indique-t-on de source diplomatique française.
« La sécurité, la bonne gouvernance et le développement sont indissociables, donc notre stratégie au Sahel doit consister à aider à la fois les armées africaines à lutter contre les groupes terroristes, à soutenir la présence de l’Etat dans les zones délaissées, appuyer la justice et l’état de droit et à investir dans les développement économique de ces pays », a souligné Catherine Colonna.
Les deux ministres annonceront le déblocage d’une aide de 50 millions d’euros pour améliorer le réseau d’électricité au Niger ainsi qu’un soutien budgétaire.
Une source majeure d’interrogation concerne les pays du golfe de Guinée comme le Bénin, le Togo et la Côte d’Ivoire, visés à leur tour récemment par des attaques, et la manière dont la France et les Européens pourraient leur venir en aide.
A ce stade, aucune requête formelle en vue d’une assistance militaire supplémentaire n’a été formulée. Certains pays européens ont manifesté de l’intérêt dans la poursuite d’opérations régionales post-Mali, ont indiqué les responsables français.
Sébastien Lecornu se rendra samedi en Côte d’Ivoire, et Emmanuel Macron va probablement se rendre au Bénin à la fin juillet, a déclaré Catherine Colonna.
(Reportage John Irish, rédigé par Jean-Stéphane Brosse, édité par Jean Terzian)
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