La République centrafricaine souhaite l’arrestation du président déchu François Bozizé, 66 ans, renversé en mars, contre lequel elle vient d’émettre un mandat d’arrêt international pour « crimes contre l’humanité » et « incitation au génocide ».
« Un mandat d’arrêt international a été émis » contre « François Bozizé » – actuellement réfugié au Cameroun- le 29 mai dernier, a annoncé le procureur de Bangui, Alain Tolmo.
Le mandat d’arrêt « a été diffusé par mes soins par le canal habituel et classique d’Interpol », a souligné le magistrat, précisant que « d’autres mandats d’arrêt internationaux sont en cours d’émission » sans toutefois donner davantage de précisions.
Toutefois aucune notice contre l’ex-président ne figurait vendredi sur le site internet d’Interpol.
« La CPI (Cour pénale internationale) n’a pas émis de mandat d’arrêt et le procureur n’a pas formulé de nouvelle demande concernant la situation en Centrafrique. La CPI continue toutefois de surveiller ce qui se passe dans ce pays », a réagi le porte parole de la CPI, Fadi El-Abdallah, joint par l’AFP vendredi.
A Bangui, le procureur a souligné que, parmi les chefs d’accusation, figuraient notamment des crimes relevant du statut de la Cour pénale internationale, entre autres: « crimes contre l’humanité et incitation au génocide ».
L’ancien homme fort de Bangui, indique le procureur, est également accusé « d’assassinats, au nombre de 22 actuellement; d’arrestations, séquestrations et détentions arbitraires au nombre de 53; destruction et incendie des maisons d’habitation au nombre de 3.823 pour le moment; des exécutions sommaires qui se chiffrent à 119″.
Début mai, le parquet de Bangui avait déjà annoncé l’ouverture d’une enquête sur les violations des droits de l’Homme commises par Bozizé et ses proches durant son régime et après après la prise du pouvoir par la coalition rebelle Séléka le 24 mars dernier.
Des faits « lamentablement graves »
« Depuis le 2 mai 2013 sur la base des informations factuelles, détaillées, précises (…) des instructions ont été transmises au parquet général, pour ordonner l’ouverture d’une enquête contre M. François Bozizé (…) et autres, pour des faits ou du moins pour des chefs d’accusation multiples et lamentablement graves », a ajouté M. Tolmo.
Le ministre de la Justice Arsène Sendé avait alors évoqué des cas d’assassinats, et notamment ceux de 119 personnes qui auraient été exécutées sommairement par la garde rapprochée de François Bozizé, menée par le capitaine Eugène Ngaïkosset surnommé « le boucher de Paoua (ville du Nord-Ouest) ».
Il avait également évoqué la disparition en 2010 du colonel Charles Massi, ancien ministre et chef de la rébellion centrafricaine Convention des patriotes pour la justice et la paix (CPJP).
M. Massi a été « arrêté en début 2010 au Tchad et remis aux autorités centrafricaines, puis exécuté par la garde rapprochée du président Bozizé », avait affirmé le ministre.
Une commission mixte d’enquête a été mise en place par Bangui à cet effet, a indiqué une source judiciaire vendredi.
L’ancien président Bozizé, qui s’est exilé après la prise du pouvoir par la coalition Séléka, était arrivé lui-même au pouvoir par les armes en 2003.
Elu président en 2005, il avait été réélu en 2011 au terme d’un scrutin très critiqué par l’opposition. En avril, M. Bozizé avait également demandé l’ouverture « d’une enquête internationale » sur les violences à Bangui, où le nouveau pouvoir peine toujours à rétablir l’ordre.