A quelques mois de la fin des mandats des élus municipaux, qui pourraient d’ailleurs être prorogés, l’opportunité du maintien ou non de la Ceni refait subitement surface. Au cœur de cette question qui fait désormais polémique au sein de la classe politique, se trouve l’Administration en charge des élections, en l’occurrence le ministre de l’Intérieur, Général Sada Samaké.
Ainsi, pour éclairer la lanterne de l’opinion publique nationale, Mamadou Diamoutani, président de la Ceni, a animé mardi, une conférence de presse au siège de sa structure.
Au cours de cette sortie médiatique, il n’était pas question pour l’orateur du jour d’entrer dans un débat qui n’a plus sa raison d’être, la question ayant été tranchée depuis l’ère Oumar Tatam Tatam Ly, Premier ministre d’alors. Il s’agissait pour lui, entouré de quelques uns de ses proches collaborateurs, de se prononcer notamment sur le contexte qui a conduit au prolongement du mandat de leur structure, mais surtout de «poser le problème qui est à l’ordre du jour par rapport à la Ceni».
Ainsi, après avoir fait la genèse de sa structure en en rappelant le cadre juridique et les missions, le président Diamoutani a donné des explications détaillées sur le contexte de la prorogation du mandat de la Ceni. Explications qui laissent nettement entrevoir que le ministre de l’Intérieur, Général Sada Samaké, a un agenda qui ne répond aucunement à l’intérêt supérieur du Mali.
En effet, la preuve du jeu trouble du général-ministre est d’autant établi qu’il ressort de l’exposé de Mamadou Diamoutani qu’au cours d’une rencontre d’échange sur le sort de la Ceni qu’ils ont eue, en Août 2012, avec Cheick Modibo Diarra alors Premier ministre, ce dernier avait décidé du maintien de la Commission afin qu’elle participe à l’audit et à l’évaluation du fichier électoral consensuel.
Le Premier ministre avait toutefois demandé à la Ceni de mettre fin aux activités de ses démembrements sur toute l’étendue du territoire national toute en continuant celles du bureau national. Puisque les élections communales devraient avoir lieu en avril 2014 alors que le mandat de la Ceni arrivait initialement à terme en mars de la même année, la Commission s’était trouvée dans l’obligation de faire une demande de budget complémentaire qui devait lui permettre de souffler jusqu’au mois d’août 2014.
Entre temps, Oumar Tatam Ly est nommé à la tête du Gouvernement après les élections présidentielle et législatives de 2013. Avec ce dernier aussi, des échanges ont porté sur le report des élections communales. Au cours de cette rencontre, M. Ly, selon l’orateur, a instruit au ministre de l’Administration territoriale d’alors de lui faire un exposé sur les risques d’un éventuel report des municipales et avait estimé que la question sur l’opportunité du maintien de la Ceni ne devait même pas se poser.
Mieux, la réunion du Comité interministériel de suivi du processus électoral, tenue le 13 mai 2014, fut une occasion de répondre à la question de savoir s’il fallait renouveler ou proroger le mandat de la Ceni. Le ministre Samaké, qui était invité à présenter un projet de chronogramme, lors de la même réunion, s’était tellement montré favorable au maintien de la Ceni qu’il avait demandé à ce que le point la concernant ne soit pas inscrit à l’ordre du jour de la rencontre.
C’est alors que le Premier ministre a demandé aux organes de gestion des élections d’élaborer leurs projets de budget, lesquels ont fait l’objet d’arbitrage. La Ceni a d’ailleurs reçu un premier décaissement.
Voilà que contre toute attente et pour des raisons qu’il est peut être seul à savoir, le ministre de l’Intérieur change subitement de veste et mène désormais toute la classe politique en bateau.
Mais de fins observateurs de la scène politique nationale disent n’avoir aucun doute que le Général Samaké est le fusible du parti présidentiel, pour ne pas dire celui de la mouvance qui soutient le régime, qui estime que la part belle est faite à l’opposition dans la composition de la Ceni, version actuelle. Et dans tout cela, le débat est mené en mettant à la touche les représentants de la société civile qui ne sont pas pour autant moins légitimes que ceux de la classe politique.
D’ailleurs, dans un contexte où beaucoup de choses restent à parfaire dans le cadre des futures élections communales, les débats du genre ont pour seul mérite de nous faire perdre encore du temps. Car les textes doivent subir un toilettage afin qu’ils prennent en compte le couplage des élections communales et régionales, tel qu’envisagé par le cadre de concertation ministère de l’Intérieur-partis politiques.
Aussi, la prise en compte des nouveaux majeurs et des potentiels électeurs qui n’ont pas encore eu leurs cartes Nina, estimés à plus de 2 millions, s’étendra, de l’avis de techniciens, sur 8 ou 9 mois. L’heure n’est donc plus à la polémique vaine, les enjeux des futures échéances électorales commandant que l’on se mette vite au travail. A moins que l’on n’ait un agenda personnel.
Bakary SOGODOGO
Source: Le Prétoire