La jolie histoire de Kékouta Dembélé, 17 ans, jeune migrant malien arrivé en France il y a un peu moins d’un an. Après un long périple, il est devenu apprenti agricole près de Bordeaux, sur la côte Atlantique, où il a été sélectionné pour participer ce jeudi aux Ovinpiades, le concours régional de berger en Gironde.
Kékouta Dembélé a grandi à Bougountinti, région de Kayes, près de la frontière sénégalaise. En mai 2017, il laisse ses parents au village et quitte le Mali avec une tante : Niger, Libye, puis l’Italie et enfin la France, où il est accueilli dans un foyer de l’association Emmaüs. Sur ce périple de neuf mois, Kékouta ne s’étend pas facilement. Il n’aime pas raconter que sa tante a été tuée dans un camp en Libye, qu’il a traversé la Méditerranée sur un zodiac surchargé en pleine nuit, qu’il a été hospitalisé en Italie pour des blessures contractées au cours de sa traversée, ni même qu’il a connu plusieurs villes françaises – j’ai eu des soucis à Rodez», lâche-t-il sans plus de détails – avant de s’établir en Gironde.
« Pas la même chose » qu’au Mali
Ce que Kékouta Dembélé explique plus volontiers, c’est qu’il est aujourd’hui en apprentissage dans une ferme près de Bordeaux, où il s’occupe des vaches et des brebis. Comme il le faisait au village avec son père, qui possédait quelques chèvres… ou presque : « il y a des différences, s’exclame Kékouta, ce n’est pas la même chose ! Chez nous là-bas (au Mali, ndlr), les animaux sont tous dehors, en liberté, ce n’est pas comme ici. En France, les animaux sont en intérieur, et il y a beaucoup de travail : donner du foin, couper les ongles, regarder les yeux et les dents… »
Tout ce travail, Kékouta Dembélé s’en acquitte à merveille. C’est en tout cas ce qu’explique son propre patron, Serge Chiappa, qui exploite la ferme Beauséjour de Gironde-sur-Dropt et qui a décidé de prendre Kékouta comme apprenti. « Ça se passe très bien, Kékouta est un garçon charmant, calme, attentif », se félicite Serge Chiappa, qui précise que le jeune Malien « s’intègre très bien » et s’occupe parfaitement des animaux : « Il a ça en lui ! Il sait voir un animal malade, il me dit quand une brebis n’a pas mangé, qu’un agneau boîte… je suis très satisfait. »Serge Chiappa a commencé à apprendre à Kékouta à conduire un tracteur –« c’est nouveau pour lui ! »- et témoigne avec chaleur de la confiance qu’il accorde à son apprenti.
Ovinpiades : « j’y vais pour gagner ! »
Kékouta a été sélectionné pour le concours régional de berger de Gironde, les Ovinpiades. Il affronte ce jeudi une trentaine de jeunes bergers, qui devront montrer leur habileté à conduire les brebis et à s’occuper d’elles. « Je vais aller au concours, et j’y vais pour gagner ! »,s’enthousiasme Kékouta, avec la fougue indispensable à tous ceux qui veulent obtenir la victoire.
Serge Chiappa, toujours prodigue de compliments sur le jeune berger de la région de Kayes, se montre toutefois légèrement moins confiant : « En pratique, il sera dans les meilleurs, assure l’exploitant agricole –le paysan ! comme il préfère le dire lui-même-, mais s’il y a un quizz écrit, ce sera un peu plus compliqué. Kékouta n’est jamais allé à l’école. » Et d’expliquer que depuis qu’il a été accueilli à la ferme de Beauséjour, et avec le soutien de l’Unesco, Kékouta apprend à lire et à écrire, deux jours par semaine, en plus de son travail sur l’exploitation.
Dans quelques mois, le 5 avril, Kékouta fêtera ses 18 ans. Il compte demander une carte de séjour, grâce à son emploi à la ferme : « J’ai un contrat pour deux ans, précise Kekouta, mais quand ce sera terminé, je ferai autre chose. Pourquoi pas dans la cuisine ou la boucherie. »
Source: RFI