Six blessés graves et d’importants dégâts matériels dans une altercation entre «maîtres et esclaves», advenue dans la Commune rurale d’Ayourou, Région de Kayes. Telle est l’une des tristes nouvelles de la semaine écoulée qui nous est parvenue de la Cité des rails du Mali.
Si les autorités compétentes de notre pays n’y interviennent pas au finish, le phénomène d’esclavage qui est désigné comme une pratique d’autres époques, continuera toujours de sévir voire, même de nuire à la liberté physique et morale de plusieurs milliers de personnes dans nos Régions du Sahel et plus précisément dans le village de Dafarara, Commune rurale d’Ayourou, Région de Kayes où les cultures ancestrales demeurent profondément enracinées.
Tout d’abord, rappelons que dans notre parution du 24 juillet 2018, nous avions urgemment alerté à l’attention des plus hautes autorités de pays sur la persistance de la pratique inhumaine d’esclavage à l’échelle nationale à l’encontre de plusieurs milliers de nos compatriotes résidents dans les zones soninkés, dans cette Région de Kayes. Dans cette parution, il y avait des cas de tortures incessantes, d’exclusion ,et d’exploitation de l’Homme par l’Homme dont le jeune Adama Diallo et plusieurs autres personnes avaient été victimes dans le village de Gruimahanahali sur les ordres de Gaye Camara, Chef dudit village. Mais, malheureusement, nos décideurs politiques n’en ont fait que la sourde oreille.
En effet, c’est le même phénomène qui continue d’affecter de manière plus nocive sur la liberté physique et morale de plusieurs milliers de personnes, aujourd’hui dans la Commune rurale d’Ayourou, située à une centaine de kilomètres de la ville de Kayes. Conséquences : six blessés graves et des dégâts matériels considérables, ont été déplorés le jeudi dernier lors d’un affrontement entre une famille de nobles et celle d’esclave dans ladite localité.
Et, pourtant, ces pratiques d’autres époques ne doivent plus faire l’actualité. Surtout dans un pays qui se dit démocratique depuis plusieurs décennies et dont tous les textes en vigueur interdisent le phénomène. L’article deux (2) de la Constitution du 25 février 1992 en vigueur est clair et net là-dessus : «Tous les Maliens naissent et demeurent libres et égaux en droits et en devoirs. Toute discrimination fondée sur l’origine sociale, la couleur, la langue, la race, le sexe, la Religion et l’opinion politique est prohibée».
Votre Rédaction a recueilli quelques propos de Mamadou Thiam, une des victimes.
Les faits
Ainsi, lisez la version des faits de notre interlocuteur : «Tout est parti d’une affaire foncière. Il y a une tribu Diawara qui, toujours pour des raisons esclavagistes, veut que nous soyons sous leur autorité monarchique. Nous avons construit ensemble un barrage dans le village. Lors des travaux, il n’a été question ni de maîtres ni d’esclaves. On a tous fourni les mêmes efforts. Et ce qui nous a plus stupéfaits, c’est qu’après les travaux de curage et d’entretien du barrage, lorsqu’on a opté pour des activités maraichères aux côtés dudit barrage, Diadié Diawara, le Chef du village, et d’autres personnes plus précisément de famille des Diawara, tous instigués par un nommé Sidy Diawara, Conseiller du Chef de village, veulent nous empêcher de bénéficier de privilèges du lieu commun au même titre qu’eux. Ils disent que nous ne sommes que des esclaves et que nous n’avions aucune propriété de ladite construction. Nos champs de maïs, de mil, de sorgho ; bref, toutes nos cultures de la saison pluvieuse ont été déracinées par le Chef du village et ses alliés, le jeudi dernier. Et le même jour, quand nous nous sommes rendus sur nos champs pour constater les dégâts, ils sont venus encore nous attaquer en faisant six blessés graves parmi nous, dont Sidi Sissoko, Issa Mouy et Mamadou Diarra.
Nous avons été plusieurs fois nous plaindre chez le Commandant du Cercle, mais ils n’ont pas accepté les propos de ce dernier. Nous demandons aux plus hautes autorités, dont l’actuel Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, d’y intervenir personnellement afin que cette pratique discriminatoire d’autres époques puisse être sévèrement punie. Nous volons, nous aussi, jouir de nos droits humains, garantis par la Constitution malienne; sinon, ça ne va pas vraiment». Nous y reviendrons !
Seydou Konaté
LE COMBAT