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Infections respiratoires : risque maximum

En cette saison fraîche, les températures, combinées à la pollution atmosphérique, augmentent le risque d’infections respiratoires. En milieu urbain, comme c’est le cas à Bamako, nos faits et gestes influent directement sur l’air que nous respirons. Les engins à deux roues, les tacots qui persistent et signent malgré leur âge avancé, sont des facteurs de risque quant à la qualité de l’air que nous respirons. Et cela n’est pas sans conséquences sur notre santé.

Depuis plusieurs semaines, la capitale malienne est ensevelie sous une brume grisâtre, qui réduit la visibilité. Ce phénomène, que l’on appelle « smog » ailleurs et « chasse-poussière » ici, n’est pas propre à Bamako. De nombreuses villes dans le monde le connaissent et il n’est qu’une des conséquences de la pollution atmosphérique. Et notre santé en prend un coup, avec notamment en pole position les infections respiratoires. Selon Check Africa, première organisation indépendante de fact-checking en Afrique, les maladies qui engendrent le plus de décès sont liées à notre mode de vie.

Mauvaise qualité de l’air 

Plus dangereuse que le Sida, la tuberculose et la malaria, la pollution tue trois fois plus de personnes à l’échelle mondiale. À en croire un article de la revue scientifique britannique The Lancet, la pollution de l’air est responsable de 6,5 millions de décès par an. Les pays en voie de développement sont les plus concernés par ce drame.

Au service de Pneumologie de l’hôpital Point G, le chef de service, le Docteur Yacouba Toloba, nous reçoit. Il nous confirme que les consultations sont en hausse depuis l’apparition du smog. « Dès le premier jour nous nous attendions à une hausse des consultations. Nous avons même renforcé l’équipe et pratiquement doublé les plages de consultations pour recevoir tous les malades. Chaque jour, environ une cinquantaine viennent nous voir. Et je vous parle seulement des malades qui reconnaissent les symptômes d’une infection respiratoire. La moitié des patients ne sont parvient pas », précise-t-il.

Parmi la moitié des patients qui ne sont pas pris en charge par les professionnels de la santé, certains peu savent ce qu’est une infection respiratoire. Afin d’y voir plus clair, Dr Toloba explique qu’il s’agit « d’une pathologie de l’arbre respiratoire, surtout le bas appareil respiratoire, liée à un microbe. Ce microbe peut être une bactérie, un parasite ou un champignon, un micro-organisme en tout cas ». Quant aux symptômes : « le malade va tousser et la toux peut être sèche ou productive. Le malade peut aussi avoir une douleur thoracique diffuse, une gêne respiratoire et une fièvre. Cette dernière peut aller au-delà de 37,5°C et atteindre jusqu’à 40°C, avec des frissons », détaille le chef de service.

De nombreux risques 

Comme cela a été dit plus haut, la moitié des personnes ayant contracté une infection respiratoire ne consultent pas de médecin. Le facteur économique est une des raisons qui expliquent ce fait. Mais que risquent les victimes de cette pathologie ? « Nous vivons avec des bactéries et, en cas de déséquilibre, survient cette infection respiratoire. Ce déséquilibre peut être lié à nous-mêmes, à une défaillance de notre système immunitaire et l’infection respiratoire peut alors se réveiller. Mais cela peut aussi être lié à l’environnement. L’exemple typique est la pollution atmosphérique », détaille le professionnel de santé.

Le tabagisme, qu’il soit actif ou passif est également un facteur de risque. Nous savons qu’il peut provoquer un cancer des poumons, tout comme la pollution de l’air, qui est un facteur de risque pour le développement de cancers pulmonaires en cas d’exposition chronique.

 Tous les ans, 1 million d’enfants dans le monde meurt de pneumonie. Cette maladie devance le paludisme, les maladies diarrhéiques et la rougeole chez les enfants de moins de 5 ans. Les plus vulnérables sont ceux de moins de 2 ans, qui représentent 80 % des cas mortels. Ces données proviennent du dernier rapport de « Fighting for breath » (se battre pour le souffle) de l’association humanitaire Save The Children, rendu public quelques jours avant la journée mondiale de la pneumonie. Ces chiffres sont alarmants, d’où les propos de Yacouba Toloba à l’encontre de certaines mères de famille. « J’en profite pour interpeller nos mamans. En cette période, il n’est pas bon de porter son enfant dans le dos et de se promener dans tout Bamako », avertit le médecin. Face à ce problème de santé publique, outre les enfants, d’autres personnes sont très sujettes aux infections respiratoires. « Toutes les personnes ne sont pas égales devant la maladie. Il y a ceux qui ont une plus grande susceptibilité génétique. On peut être exposés de façon égale à un facteur de risque, mais tout le monde n’aura pas une infection respiratoire. Il y a aussi l’état d’immunité de la personne. Par exemple, un drépanocytaire, un diabétique, un hypertendu ou une personne ayant une insuffisance respiratoire ou dialysée sont plus susceptibles de faire une infection. La susceptibilité peut aussi être liée à l’âge. À l’instar des personnes de plus de 65 ans, qui sont plus fragiles ».

D’après l’UNICEF, les enfants vivant dans des espaces pollués ont une capacité pulmonaire qui serait réduite de 20 % ? Cela engendre les mêmes conséquences que s’ils vivaient dans un foyer où ils subiraient un tabagisme passif.

Prévention individuelle et collective

Yacouba Toloba tient à préciser que la prévention est à la fois individuelle, collective et médicale. « Du point de vue individuel par exemple, si l’infection est liée à l’environnement, pour les motocyclistes il est préférable de porter des casques ou des bavettes pour diminuer l’inhalation des impuretés ». Les mauvaises habitudes et les moyens de transport modernes produisent des effets néfastes pour toute la population. « Il faut éviter l’utilisation d’engins trop polluants et les particules de diesel », ce qui est assez compliqué dans une ville comme Bamako, où les voitures d’occasion constituent la plupart des véhicules en circulation. Sans oublier les « déchets que beaucoup brûlent dans les rues ».  Pour ce qui relève des compétences du corps médical, le vaccin contre la grippe, pour les personnes ayant une fragilité de l’appareil respiratoire, est une mesure de prévention qui va « contrer un certain nombre de microbes, tels les pneumocoques », conclut Dr Toloba.

En 2016, « le Mali s’est doté d’un nouveau matériel afin de mesurer la qualité de l’air, dans le cadre du Projet sectoriel des transports », explique Balla Sissoko, Chef de la Division suivi environnemental et Point focal de la Convention de Stockholm sur les polluants organiques pour le Mali. Ce camion laboratoire ultramoderne, le premier utilisé au Mali, est un équipement mobile qui a la capacité de couvrir les besoins de la ville de Bamako et ses environs. Il mesure et analyse 6 polluants : le dioxyde de soufre, le dioxyde de carbone, le dioxyde d’azote, l’ozone au niveau du sol et dans l’air et le monoxyde de carbone. Il traite des particules de diamètre inférieur à 10 microns et celles d’un diamètre inférieur à 2,5 microns.

Un an après cette acquisition, des données précises ne sont toujours pas disponibles. En cause : les dysfonctionnements constatés sur l’appareil. « Pour l’instant, nous disposons d’analyseurs de gaz, mais si nous voulons faire une vraie étude de la qualité de l’air, il nous faut des outils plus performants ». Au plan continental, la pollution de l’air gagne du terrain. Selon une étude de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) de 2016, le nombre de décès lié à la pollution de l’air extérieur a connu une hausse de 36 % entre 1990 et 2013, ce qui correspond à 250 000 décès. Ce chiffre ne prend pas en compte les pollutions domestiques. Pourtant, à défaut d’électricité ou de gaz butane dans beaucoup de foyers, le charbon de bois est utilisé pour la cuisine, ce qui constitue une source supplémentaire d’intoxication.

Journal du mali

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