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IBK-Opposition : Une guerre fratricide au détriment du Mali

Les relations entre le président Ibrahim Boubacar Keïta, son régime et l’opposition malienne n’ont connu aucun état de  grâce réel depuis son accession à la magistrature suprême et son installation au palais de Koulouba. Elles ont été dans le prolongement de la campagne des présidentielles et de l’atmosphère délétère de la proclamation des résultats du second tour de ces élections entre lui et son dauphin Soumaïla Cissé, candidat de l’URD. On avait craint une sanction des urnes fortement contestée et une grave crise post électorale. Mais le fair-play du perdant a finalement prévalu à la satisfaction générale. Un geste significatif et de haute portée politique,unanimement salué par l’opinion nationale comme internationale, qui n’allait pas perdurer.

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En effet, cette espérance d’une atmosphère politique décrispée, conviviale entre le chef de l’Etat, sa majorité et l’opposition attendue par les uns et les autres, pour faire avancer le Mali dans la bonne voie, n’a malheureusement pas tenu ses promesses. Bien au contraire, on a assisté par la suite à une guerre des tranchées dans la classe politique profondément divisée entre tenants du pouvoir supposée aux ordres et une opposition esseulée, se sentant marginalisée  sinon méprisée par le fait du Prince de Sébénicoro et les thuriféraires insatiables de son régime inclinant vers le culte de le personnalité.

Une tendance due sans doute à la conception du pouvoir d’Ibrahim Boubacar Keïta, autoritaire de nature, du temps où il était Premier ministre du premier Président de l’ère démocratique Alpha Oumar Konaré. En arrivant à bout de la chienlit généralisée, il avait déjà consacré le mythe de l’homme providentiel. Il se posait ainsi en phare politique, en homme à poigne éclairé aimant le défi, ayant une haute perception des réalités politiques et sociales comme de la raison d’Etat et pour qui aucune difficulté n’était insurmontable s’agissant du Mali et de son peuple.

Cela ajouté à sa trajectoire politique considérable explique grandement cette adhésion unique dans l’histoire du Mali démocratique, cet attachement à la personnalité d’un leader politique et à son projet de société et le ras de marée électoral qui s’en suivit avec son triomphe par près de 80% des voix au second tour de la présidentielle. Un score que  Soumi Champion et l’URD ont contesté avec véhémence, comme le FDR qui l’a expliqué dans une conférence de presse par une fraude à grande échelle menée selon un système machiavélique. Cela n’a pas convaincu, car tous les observateurs avaient vu un scrutin sincère, équitable et transparent. Après une relative accalmie après une première rencontre empreinte de convivialité et presque fraternelle au palais de Koulouba entre les principaux leaders de cette opposition revancharde et le président Ibrahim Boubacar Keïta, les quiproquos et inimitiés politiques ont repris de plus belle, au nom du Mali.

Mais ce n’était pas d’une fracture politique irrémédiable que le peuple voulait, au contraire de certains ultras des deux camps voulant en tirer profit. Malicieusement, dans son meeting final de campagne sur le Boulevard du peuple, le président Ibrahim Boubacar Keïta ne s’était pas privé de répéter, avec le sourire : « Nous ne sommes pas en guerre. Ce n’est pas la guerre » !

Pourtant, des deux côtés on n’allait pas se priver d’entretenir les foyers de tension. Le peuple qui avait élu Ibrahim Boubacar Keïta comme les électeurs et les partisans de l’opposition significative voulaient effectivement une démocratie civilisée, conviviale et apaisée. Mais des ténors, pas des moindres, ne se privaient pas de jeter de l’huile sur le feu de la bienséance politique. Comme l’inévitable Keïta dit PPR (Prêt Pour la Révolution), secrétaire général du Paréna qui, dans une contribution écrite au vitriol ou dans une apostrophe violente en public, incendiait le pouvoir et ses tenants sans distinction. De l’autre côté, des ouvriers de la 25ème heure au RPM se faisaient un honneur de leur apporter la contradiction dans des termes à peine moins violents. De même, il est arrivé que toute la direction du parti d’Ibrahim Boubacar Keïta se mobilise  pour se fendre d’une mise au point tout aussi irrespectueuse, en guise de réponse du berger à la bergère à  Tiébilé Dramé, président du parti du bélier blanc, compagnon de route inséparable de PPR.

Inutile de dire que cette guéguerre persistante déteignait sur les affaires de la nation avec la volonté du président de la république de ne pas utiliser les expertises incontournables de Tiébilé, de Soumaïla Cissé réputé l’un des meilleurs économistes du Mali, à l’instar du Premier ministre de la première transition démocratique Soumana Sacko du CNAS et autres hommes ressources remarquables de l’opposition, dont les connaissances et avis font notoriété, dans le processus de négociation de la crise du nord et des pourparlers inclusifs inter maliens de paix d’Alger, comme dans la résolution de la crise économique qui accable le pays, singulièrement les couches les plus vulnérables de la population en majorité. D’un autre côté, le président de la république et sa majorité ne pouvaient pas accepter la fuite en avant et le diktat de l’opposition, donnant par une surenchère constante l’impression de vouloir gouverner à la place des détenteurs légitimes du pouvoir, en faisant à tout bout de champ leur procès qui toujours débouche sur un verdict défavorable et sans appel. Ceci explique-t-il cela ?

L’on se souvient du terrible bras de fer entre le pouvoir et l’opposition demandant la démission du gouvernement et la tête du Premier ministre Moussa Mara coupable d’avoir osé entreprendre le voyage périlleux aux suites tragiques de Kidal occupée par le MNLA et du clash de la motion de censure à l’Assemblée nationale. Depuis lors les critiques contre IBK et le pouvoir n’ont pas désemparé. Il faut toutefois reconnaitre qu’ils ont prêté grandement le flanc, avec les affaires de l’achat de l’avion de commandement présidentiel et des de marchés de fournitures militaires de plusieurs milliards attribués de gré à gré dénoncés par les médias, qui ont conduit le FMI et la Banque Mondiale à geler leur coopération avec le pays. « C’est la première fois qu’un tel désaveu se passe. C’est un camouflet et une punition pour la mal gouvernance et ceux qui dirigent ce pays et le conduisent irrémédiablement au gouffre », tel est le constat dont se sont délectés l’opposition et ses chefs de file. Ces derniers sur leur lancée ont exigé d’être consultés sur les pourparlers de paix, le Mali appartenant à tous. Dans le même temps, la majorité présidentielle forte de 65 partis n’arrivant pas à remplir au CICB un amphithéâtre de 1000 places, se croyait autorisée, par la voix de son président Boulkassoum Haïdara, à se démarquer des cadres du pouvoir présumés trempés dans des malversations controversées. Pourtant, celles-ci restaient à prouver en face de deux audits contradictoires du Vérificateur général et de la Cour Suprême qui n’arrivent pas aux mêmes conclusions, s’agissant de ces affaires qui relèvent du secret défense et de la souveraineté de l’Etat malien. De quoi donner du grain à moudre au moulin de l’opposition.

Le contexte n’était pas favorable à IBK pour tendre la main à cette opposition frondeuse qui a fait sienne «  la mauvaise foi qui est la chose la mieux partagée en politique », comme l’indique un proche de Koulouba sous le sceau de l’anonymat.

Une occasion idéale que n’ont pas ratée ses contradicteurs patentés qui ont joué sur les humeurs du chef de l’Etat qui n’aime pas être trimballé. En fait, Le président Ibrahim Boubacar Keïta constamment sur la défensive, quelque peu déstabilisé et sa gouvernance furent copieusement houspillés par la dialectique implacable des Tiébilé Dramé, Soumaïla Cissé,  polémistes redoutables, motivés pour tailler dans le vif et régler leurs comptes. D’où l’agacement du président de la république qui n’aime pas la contradiction. Il a par son attitude démontré qu’il n’avait pas de leçons à recevoir, surtout venant de ceux qu’il a copieusement battus il n’y a pas encore longtemps et qui s’évertuent à voir du noir partout,en occultant les l’immensité de la tache, ses difficultés et le chemin considérable parcourupar sa gouvernance.

Il est vraiment regrettable que lors de cette rencontre, une occasion manquée, les leaders de l’opposition et le chef de l’Etat n’aient pas pu faire taire leurs égos et accorder leurs violonspour le bien de la Res Publica, la Chose Publique. On se prend à rêver de ce qu’il serait advenu si les deux parties avaient pu trouver un terrain d’entente pour relever les défis, déterminer de manière consensuelle les voies et moyens de redorer le blason terni du Mali aux yeux de la nation, au nom de son unité, de son intégrité, de son honneur et de sa fierté bafoués.

Il est souhaitable et nécessaire qu’IBK, sa majorité et l’opposition taisent leur guerre fratricide. Ils doivent, s’ils veulent réellement le bien du pays et des Maliens, le faire savoir au peuple en se donnant  une autre occasion de se retrouver, de préférable dans un cadre formel, pour le bien commun, en mettant cette fois-ci le Mali au-dessus de tout.

Oumar Coulibaly

SOURCE: Le Guido  du   3 déc 2014.
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