La manif’ du 05 juin dernier, à l’appel des associations de la société civile et des partis politiques de l’opposition. C’est l’unique sujet de cette interview, que Ladji Bourama a bien voulu nous accorder. C’était, dimanche dernier, en milieu de matinée, à sa résidence privée de Sébénikoro, toujours sous bonne garde, des forces du « désordre », pardon de l’ordre. Entretien.
On ne déplore aucune perte en vie humaine, mais le bilan de la manif’ du 05 juin dernier a été lourd, en blessés et en matériels.
Absolument ! On déplore 19 blessés, dont 15 parmi les forces de l’ordre et 11 véhicules endommagés.
Dans quelles conditions ces échauffourées, avec les forces de l’ordre, ont eu lieu ?
C’était quand, une partie des manifestants tentaient de marcher sur ma résidence, sise à Sébénikoro. Ils ont refusé d’obtempérer aux sommations des forces de l’ordre pour forcer le dispositif sécuritaire. C’est là que les échauffourées ont eu lieu, avec le bilan que vous connaissez.
Pourtant, les organisateurs de cette manif’ avaient rassuré qu’il n’y aura pas de débordement…
Ont-ils tenu promesse ? La réponse crève les yeux.
Le gouvernement va-t-il appliquer aux organisateurs la loi du « casseur-payeur » ?
Ce n’est pas impossible. Pour l’heure, nous y réfléchissons. Même si, nous n’entendons pas jeter de l’huile sur le feu. Chacun doit assumer ses responsabilités. J’assumerai la mienne jusqu’au bout. Sans faiblesse.
Les leaders de ce collectif d’associations de la société servile, pardon civile, et de partis politiques de l’opposition réclamaient deux choses : votre démission, à défaut une autre gouvernance au Mali.
Pour ce qui est de ma démission, il n’y a pas question. Je ne démissionnerai pas. Que cela soit clair pour tout le monde. Ce ne sont pas les leaders de ce collectif qui m’a fait élire à la présidentielle de juillet 2018. Ce n’est pas à eux de réclamer ma démission. D’ailleurs, s’ils le pouvaient, je ne serai même pas élu. Avec le score, qui a été le mien. Alors, qu’ils mettent un peu d’eau minérale dans leur dolo. S’agissant de ce qu’ils appellent « une autre gouvernance au Mali », on peut y arriver. Du moins, si les uns et les autres décident de mettre le Mali au-dessus de leurs petits intérêts.
Donc, vous ne démissionnerez pas…
Même après-demain, je ne démissionnerai pas. En tout cas, pas avant la fin du mandat que le peuple malien m’a, souverainement, confié. En clair, « Boua Ta bla bi, a ta bla sini ».
Peut-on savoir pourquoi le « très vénéré » imam Mahmoud Dicko déteste tant votre régime ?
Le Mollah, c’est à cause d’une petite affaire de « Gombo ».
C’est à dire ?
Une « petite affaire de mangement » que Boubeye a supprimé d’un trait de plume, quand il était chef de gouvernement.
Pouvez-vous être plus clair ?
Un jour, inchallah, parce que je ne veux pas détruire le peu de considération qui lui reste. Mais, un jour, tout le monde saura pourquoi.
Une affaire de « Gombo » ? Pour l’heure, permettez-moi de ne pas répondre à cette question. Du moins, tel que vous le souhaité. Sinon « Fali bina yé sangué koro », comme on dit chez nous.
Selon le communiqué lu, samedi soir, sur les antennes de la télévision nationale, une enquête est ouverte pour identifier les auteurs des débordements à l’origine des dégâts annoncés…
Bien sûr !
Et quand vous auriez identifié les auteurs, qu’est-ce qui va se passer ? Vont-ils être jugés ?
Ce n’est pas impossible, en effet. Ceux qui sont à l’origine de ces blessés et dégâts matériels importants vont devoir faire face à leurs responsabilités.
Vont-ils être jugés ?
Pourquoi pas, si leur responsabilité dans ces dégâts est établie.
Le « très respecté » imam Mahmoud Dicko dit, d’un côté, qu’il est en bons termes avec vous et, de l’autre, il ne rate aucune occasion pour critiquer votre régime. Qu’en dites-vous ?
C’est un homme de paradoxe, qui croit pouvoir tromper le peuple toute la vie. Mais un jour, inchallah, ses sympathisants découvriront son vrai visage.
Quand, précisément ?
Je ne saurai vous donner une date précise. Mais croyez-moi, cette histoire de « Gombo » sera rendue publique. Du moins, s’il continue à m’emmerder. Comme dirait le comédien malien, feu Lassidan, « qui vivra, va verra ! » Propos recueillis par Le Mollah Omar
Source: Canard Déchainé