De mémoire de Maliens, jamais une grève de l’Union nationale des travailleurs du Mali (Untm) n’aura mobilisé autant de médiateurs. Mais le secrétaire général de la centrale syndicale reste droit dans ses bottes, faisant courir au pays le risque d’un effondrement plus poussé. Les notabilités traditionnelles et religieuses ont tout mis en œuvre pour que les responsables de l’Untm renoncent à la grève.
Mais c’était sans compter avec l’intransigeance de Yacouba Katilé, tout puissant secrétaire général de l’Union nationale des travailleurs du Mali (Untm). Ce dernier a catégoriquement refusé de renoncer à la grève, quand bien même le gouvernement a été dissout par le président de la Transition qui a aussitôt renouvelé sa confiance à MoctarOuane pour former un nouveau gouvernement.
Après les notabilités, les organisations internationales ont dépêché des médiateurs pour demander aux grévistes de surseoir à leur mouvement. Ainsi, des émissaires de la Minusma et de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) ont tour à tour défilé à la Bourse du travail, siège de la centrale syndicale. Mais Katilé et ses collaborateurs ont expliqué que le mot d’ordre de grève est antérieur à la dissolution du gouvernement.
Selon les soutiens des syndicalistes, les autorités ont réussi à mettre dos à dos l’Untm et les magistrats. Les deux camps sont à couteaux tirés à cause des primes et indemnités. L’Untm demande l’augmentation des primes et indemnités en rappelant que les magistrats ont eu des indemnités de judicature à hauteur de 1,2 million F CFA. Le souhait de l’Union est d’obtenir au moins 750 000 FCFA d’indemnités. Mais les magistrats n’ont pas apprécié le fait que leur traitement soit pris comme référence par les responsables de l’Untm.
Le torchon brûle entre les deux camps au sujet des textes de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite (Oclei), lesquels ont été révisés, avec la participation de l’Untm et des magistrats lors des travaux à Sélingué. Selon des sources proches du dossier, la volonté des autorités de la transition est de nuire à des responsables de l’Untm, dont Katilé et un de ses lieutenants, Ousmane Traoré, chargé des questions économiques de la centrale syndicale. Leur seul tort est de défendre avec insistance les intérêts des travailleurs maliens.
On raconte également que le gouvernement a voulu tromper l’Untm avec la signature du décret de nomination des membres du Conseil économique, social et culturel dont Yacouba Katilé est membre. Mais le jeu a été rapidement compris. En effet, il y a deux autres décrets qui n’ont pas été pris, à savoir le décret de convocation des membres du collège et le décret de nomination des membres associés (des fonctionnaires mis à la disposition du Conseil). C’est dire que les autorités n’ont pas la volonté de faire bouger les lignes en ce qui concerne cette institution qui a un droit de regard sur toute proposition de texte.
Autre problème, selon les responsables de l’Untm, c’est la « tentative de division » de la centrale syndicale, menée par l’ex-ministre de tutelle,Me HarounaToureh. Ce dernier est accusé d’instrumentaliser l’appartenance ethnique de certains membres de l’Untm en vue de promouvoir un schisme au sein de la centrale syndicale. Des ressortissants du nord, y compris des personnalités de premier plan, sont ainsi mis à contribution pour saboter la grève depuis plusieurs mois, rapportent des sources proches du dossier.
Oumar KONATE
Source : La Preuve