Suivez-nous sur Facebook pour ne rien rater de l'actualité malienne

Gl. F. Lecointre: ne pas «laisser l’ennemi nous imposer le tempo» (Barkhane)

La Force Barkhane est présente depuis plus d’un an dans la région du Liptako-Gourma, à la frontière avec le Niger pour une opération dans la durée, au plus près des populations. Cette stratégie a-t-elle porté ses fruits alors que les groupes armés terroristes parviennent toujours à commettre des attentats, parfois très meurtriers ? Le chef d’état-major de l’armée française était en fin de semaine en visite à Ménaka au Mali, où se trouve une base avancée de l’opération Barkhane. C’est là que notre journaliste en charge des questions de défense l’a rencontré. Le général François Lecointre est l’invité d’Afrique Matin.

 

RFI: Il y a six ans, l’armée française était allée déloger les groupes jihadistes dans leur sanctuaire de l’Adrar des Ifoghas. Est-ce qu’aujourd’hui, Barkhane impose son rythme à ces groupes jihadistes ou est-ce que c’est devenu une force qui agit en réaction par rapport à ces différents groupes armés jihadistes dans la région ?

François Lecointre: Non, bien sûr. Barkhane impose son rythme et elle fait tout pour l’imposer, c’est-à-dire qu’elle fait tout pour changer de tempo et pour avoir une vision claire d’une stratégie qui est définie à l’avance et qui est, par ailleurs, validée au plus haut niveau, puisque j’en présente les grands principes ainsi que la planification au président de la République. Non, je n’ai pas du tout ni l’idée, ni l’impression, ni surtout l’envie de laisser l’ennemi nous imposer son tempo.

Le contingent tchadien de la Minusma a été durement touché à Aguelhok. Les FAMA ont essuyé une attaque meurtrière à Dioura, fin mars. Barkhane a eu très chaud, pas très loin d’ici, dans le secteur de la forêt d’Akabar. Assiste-t-on à un réveil des groupes armés, alors qu’on nous parle du chant du cygne du terrorisme, depuis quelques années ?

Honnêtement, je n’en sais rien. J’ai plutôt tendance à considérer que c’est une réaction de quelqu’un qui se sent acculé et qui a besoin, au contraire, d’essayer de marquer des points pour pouvoir communiquer très fort et réaffirmer sa liberté d’action auprès de la population. Ceci étant, je suis prudent. De toute façon, ce sera un combat long. Ce sont, en effet, des groupes armés qui s’appuient sur des solidarités tribales et qui essayent d’exploiter, d’instrumentaliser les dissensions et les oppositions entre ethnies, entre tribus. Ce sera d’ailleurs un combat d’autant plus long que la véritable cible c’est l’adhésion de la population à un État démocratique et de droit qui est l’État malien qui est en train de se reconstruire. C’est forcément quelque chose de long.

Barkhane est dans cette région, au sud de Ménaka, depuis plus d’un an maintenant, avec une opération qui vient de se terminer (Koufra 8). Quel bilan tirez-vous de cette présence militaire française, dans cette région ? On a dit que des coups très durs avaient été portés à EIGS. On a dit aussi que Adnan Abu Walid al-Sahraoui était en fuite. Finalement, on a quand même encore l’impression, par rapport à ce qu’on a vu ces derniers jours, que son groupe est encore actif.

Oui, vous avez raison. Evidemment, l’ennemi n’est pas défait en un an et demi ou deux ans. Evidemment, leur groupe essaye de se réorganiser, de se recomposer et de recomposer aussi des alliances parce qu’ils ont été affaiblis. Ce que j’observe, c’est que de la part de Nigériens comme des Maliens, le constat est unanime, c’est-à-dire qu’il y a effectivement un affaiblissement très fort de EIGS et il y a aussi la réinstallation de l’Etat, la réinstallation des forces armées maliennes et tout cela, c’est extrêmement favorable.

Ils ne viennent pas parce qu’on leur met l’épée dans les reins ; ils viennent parce qu’ils pensent que l’ennemi est désormais à leur portée et qu’ils pourront réassurer la sécurité qui est le premier devoir d’un État vis-à-vis de sa population.

Deux mots, Mon général, si vous le voulez bien, sur l’action des partenaires africains, cette fois-ci, sur les frontières, la fameuse force conjointe du G5 Sahel qui a mené trois opérations assez discrètement, récemment. Je voulais savoir si vous voyez un certain nombre de progrès…

De manière générale, j’ai toujours envie de dire: laissez le temps au temps, laissez les gens faire leur travail. C’est toujours difficile de construire une armée, de construire une force opérationnelle. Par ailleurs, ce que nous voulons faire avec la force conjointe G5 Sahel, personne n’a jamais tenté de le faire. Il faut en être conscient.

Pour le reste, il faut recevoir les dons, que les équipements arrivent et que les per diem qui doivent être payés aux officiers état-major arrivent (ça, c’est déjà fait).  Je pense qu’on a été trop impatient parce que cet objet politique était quelque chose dont la presse avait envie de parler mais qu’on a poussé, sans doute pour que cela produise des résultats, à ce que symboliquement cette force conjointe s’engage et conduise des opérations alors qu’elle n’y était pas encore complètement prête.

J’observe, par ailleurs, qu’au-delà de ce que fait la force conjointe G5 Sahel, il y a déjà une forme de coordination très étroite entre les différents pays du G5 qui agissent en binational ou en bilatéral, avec l’appui de la force Barkhane, en complément de ce que fait par ailleurs la force conjointe G5 Sahel.

Donc, ce qui est vrai, c’est qu’on a observé une dégradation de la situation au Burkina Faso qui est de nature à nous inquiéter parce que même s’il faut se méfier des raccourcis, elle nous donne l’indication d’une contagion, vers le sud, de ce mouvement jihadiste qui n’est pas de nature à nous rassurer. Par conséquent, nous avons très considérablement renforcé notre coopération avec le Burkina Faso. Le président de la République est allé voir Monsieur Kaboré, à plusieurs reprises et aujourd’hui, le Burkina Faso – dont le chef d’état-major des armées a été changé – nous donne des signes d’une volonté de coopération très active. Aussi, nous sommes en train d’étudier la manière dont nous allons pouvoir les aider à s’engager aux frontières, bien sûr, et puis, sur leur territoire, là où il y a des zones dans lesquelles, notamment entre le Niger et le Burkina Faso, l’ennemi est à nouveau en train d’essayer de s’implanter.

RFI

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Suivez-nous sur Facebook pour ne rien rater de l'actualité malienne
Ecoutez les radios du Mali sur vos mobiles et tablettes
ORTM en direct Finance