Chacune de ses apparitions à la télévision nationale présageait d’un événement spécial pour la «bonne marche» de la transition. Et presque chacune des décisions annoncées ont bouleversé nos habitudes (bonnes ou mauvaises) voire notre vie. De la rupture avec la France à celle avec la Cédéao en passant par le renvoie des cadres de la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali) et d’autres diplomates «indélicats» qui avaient la naïveté de toujours croire que le Mali était resté ce pays où on pouvait tout se permettre parce que «financièrement indispensables». Ils ont donc été nombreux à l’apprendre à leurs dépens.
Le visage austère, symbolisant la rigueur et la fermeté militaires, il avait la lourde responsabilité (porte-parole du gouvernement) d’annoncer ces décisions prises avec «effet immédiat». Très éloquent, malgré le souci de la courtoisie perceptible chez cet élégant officier, il a le talent de remettre à leurs places ceux qui avaient l’outrecuidance de vouloir bafouer l’honneur des autorités de la transition ou de vouloir s’en prendre aux intérêts du Mali d’une manière ou d’une autre comme l’excellent «dribbleur», le président Alassane Dramane Ouattara (ADO) de la Côte d’Ivoire. Aussi, ces deux passages aux assemblées générales des Nations unies resteront-ils à jamais comme une manifestation sans conteste de la souveraineté retrouvée du Mali. Et, au-delà de notre pays, ils ont suscité fierté et espoir partout où l’arrogance occidentale continue de vouer des peuples entiers aux gémonies.
Mais, depuis sa nomination à la Primature le 21 novembre 2024, Abdoulaye Maïga s’est visiblement métamorphosé. Et dans le bon sens parce qu’il semble avoir rapidement opté pour le costume du vrai leader, intransigeant avec les valeurs, mais conciliant et rassembleur. Et il faut reconnaître que, face aux défis qui sont les siens, c’est une approche judicieuse pour réussir sa mission en concrétisant les «Huit commandements» du Général d’Armée Assimi Goïta. En tout cas, l’effet est perceptible. A commencer par EDM où la Direction générale et le personnel semblent avoir beaucoup apprécié sa méthodologie pour circonscrire la crise énergétique.
La responsabilisation préférée à la stigmatisation
C’est très réconfortant de sentir que le Général de division ne veut pas perdre son temps dans la politique de l’autruche du décident incompétent inefficace. En valeureux officier à la compétence renforcée par ses études managériales, il est déterminé à prendre le taureau par les cornes chaque fois que cela s’impose. Jusque-là, par rapport à la crise énergétique, on était habitué à entendre : «Faisons confiance au président Assimi Goïta et restons mobilisés derrière lui, il va nous sortir de là». Comme si le chef de l’Etat n’avait que cela à faire et qu’il avait nommé un PM et des ministres pour juste meubler le décor. Le nouveau PM a préféré le terrain, le dialogue… Que nous proposez-vous, vous qui connaissez EDM mieux que quiconque, pour sortir de cette impasse énergétique ? Il n’en fallait pas plus pour requinquer à bloc les cadres et leurs agents jusque-là stigmatisés à la limite diabolisés.
Avec la classe politique, le même jour (jeudi 5 décembre 2024), ce fut la même approche dans une ambiance très détendue par la libération provisoire des 11 responsables incarcérés depuis 5 mois. Très décontracté, le PM n’a pas fait non plus dans la complaisance. Certes, rien ne se fera plus dans le dos des politiciens. Mais, ceux-ci doivent aussi accepter d’avaler les couleuvres des réformes politiques, comme la relecture de leur charte, au nom des intérêts de la patrie. «La relecture de la charte des partis politiques va faire mal. Le nombre de partis au Mali est intenable», a prévenu le chef du gouvernement qui n’est pas adepte de la langue de bois.
Le chef du gouvernement a invité ses interlocuteurs à faire preuve d’union sacrée et de résilience face «aux défis multidimensionnels» auxquels le pays est confronté. «Ce que nous vivons est pire qu’une guerre. Chaque fois que nous nous divisons, nous aidons nos ennemis», a rappelé le Général de division Abdoulaye Maïga. A tous ses interlocuteurs, depuis sa nomination, Abdoulaye Maïga ne cesse de rappeler que la recherche de solutions doit être guidée par les besoins et priorités nationales, sans se soumettre aux pressions géopolitiques externes. Comme l’a commenté un confrère de la place, «cette posture met en avant l’ambition du gouvernement d’asseoir une souveraineté énergétique forte et durable».
Aujourd’hui, il est indéniable qu’un vent de décrispation souffle ces derniers jours sur le Mali grâce à un effort perceptible de détente et de réconciliation nationale. Et chaque Malien et chaque Malien, chaque leader des forces vives, doit apporter sa pierre à la consolidation de ce «renouveau» dans le dialogue entre les acteurs politiques et les autorités de la transition. «Nous allons faire l’effort d’aller vite et nous allons faire beaucoup d’attention à ne pas confondre la vitesse et la précipitation», a déclaré le chef du gouvernement lors de sa rencontre avec le Cadre de concertation avec les partis politiques le 5 décembre dernier. Autrement, le retour à l’ordre constitution est sans doute une préoccupation des autorités de la transition, mais il ne doit se faire de manière à éviter tour retour à case-départ dans quelques mois ou quelques années !
S’il y a donc un point commun entre le ministre d’Etat (ministre de l’Administration et de la Décentralisation) porte-parole du gouvernement et le PM, c’est cette farouche détermination à préserver la souveraineté et les intérêts du Mali. Il a été ferme sur cette question aussi bien à EDM que lors de la rencontre avec le Cadre de concertation avec les partis politiques ! C’est de bonne guerre puisque tous les Maliens gagnent à ce que les intérêts du pays soient défendus becs et ongles par les décideurs politiques !
Moussa Bolly
Source: Le Matin