Les marchandises sont exposées en vrac mais les prix ne sont pas toujours abordables
Le mois de Ramadan tend vers sa fin et les fidèles musulmans maliens préparent avec ferveur la fête de l’Aïd El-Fitr. Cette célébration aura lieu demain ou après demain sur toute l’étendue du territoire, et cela conformément à la décision qui sera prise par la Commission nationale d’observation de la lune. Communément appelée «Selifitini», cette fête marque la fin du mois de Ramadan. Depuis quelques jours, le Grand marché de Bamako, le «marché rose», connaît une extraordinaire atmosphère de fête. L’immense foule des clients est parsemée de crieurs publics et de batteurs de tambours. Ce beau monde est parcouru par des vendeurs, des commerçants ambulants. Ils parcourent, chargés d’articles divers, les différents coins et recoins pour écouler les produits qu’ils vantent en criant des prix aguichants. Les articles les plus vendus sont les Bazins, les vêtements prêts à porter et chaussures pour enfant et pour adulte, les parures féminines. Le choix des élégantes porte surtout sur les perles et les mèches. La devanture de chaque boutique est envahie par de nombreux petits revendeurs.
Le jeune Ahmed Sylla est vendeur de tissus, wax et brodés dans l’immeuble «Galerie Digué N°3». Il nous commente l’évolution du marché :« ma boutique faisait le plein durant toute la journée. L’argent s’entassait dans nos tiroirs. Mais nous avons constaté une baisse brutale des ventes ces derniers jours». A la suite des investigations auprès des femmes, nous avons compris pourquoi les ventes ont chuté chez les commerçants. C’est que les tailleurs n’acceptent plus les coupons à seulement quelques jours de la fête. Ils évitent de donner de «faux rendez-vous» dont les conséquences pourraient être fâcheuses. La vendeuse de pièces de Bazins (moins riches) est installée devant la maison de l’artisanat près la Grande mosquée de Bagadadji. Elle ne vend pas assez malgré l’imminence de la fête marquant la fin du Ramadan de cette année. Elle déclare que les clients viennent et se contentent seulement de demander les prix. Ils passent leur chemin en marmonnant que les prix sont chers pour leur pouvoir d’achat. Aminata en a gros sur le cœur contre les clients qui discutent beaucoup sur les prix, mais qui n’achètent rien en fin de compte. La voisine Rokia Coulibaly vend des perles pour embellir les cheveux. Elle vend aussi des montres et des bracelets pour enfant. Elle formule un constat amer : «j’ai mis le paquet en allant m’approvisionner en nouveaux modèles de parures. Mais les ventes ne sont pas à hauteur de souhait». Mme Diawara Koroutoumou Coulibaly est ménagère au quartier Kalaban Coura. Elle est venue acheter un habit pour son petit garçon. Elle porte son choix sur un ensemble prêts à porter dont elle acquitte le prix. Interrogée sur la situation du marché, elle répond : «les marchandises sont chères» et ajoute que la pauvreté des parents complique tout. Mahamadou Diawara de vendeur de prêts à porter au marché rose de Bamako. «Je vends ici du prêt à porter pour enfant depuis 12 ans. Cette année, je trouve que le marché est trop mou. Les années précédentes à la veille de la fête, je pouvais encaisser 50.000 à 100.000 CFA par jour, mais cette année ce n’est pas le cas, car les clients se plaignent des prix des vêtements. Or je les prends auprès des grossistes pour venir les revendre», explique-t-il. Le commerçant estime aussi que la pauvreté des parents est due à la pauvreté dans le pays. «Notre pays est financièrement sur répondeur», ironise-t-il. Chez Mahamadou Diawara, les habits complets pour la petite fille de 5 à 10 ans coûte à 15.000 CFA et pour le garçon de 10.000 à 12. 000 CFA.
Quant à Drissa Diarra, il vend pagnes wax au «marché Railda». Ici, le client a le choix entre les pagnes uni-wax, petit hollandais, super Binta, real, java etc. «Les pagnes uni-wax que je vends, viennent de la Côte d’ivoire. Je les vends à 24.000 CFA et je propose les tissus petits hollandais au client à 25.000 FCFA. Le super Binta et le real sont à 7.500 FCFA le mètre et le java à 2500 FCFA. Tout va bien ici, car je peux vendre jusqu’à 100.000 dans la journée», dit-il en souriant.
Chez Hama Sidibé, le marché est plutôt morose comparer à l’année passée. «Je vends sous le soleil et malheureusement, les clients se font rares cette année », raconte-elle, désespérée. Ici, les prix des chaussures commencent à 1000 FCFA. Il y en a aussi pour 2500 FCFA et 5000 FCFA. Le marché n’est elle pas une arène de lutte psychologique entre commerçants et acheteurs ? Les vendeurs sont tous convaincus que les prix des produits sont abordables. Les clients pensent le contraire. Mais comme on le dit : les affaires sont les affaires. Accusés, certains parents sont obligés de se mettre en quatre pour acheter des habits nouveaux à leurs enfants. Certains vont même s’endetter à la banque pour sauver l’ honneur.
Mama TRAORÉ
et
Fadi CISSÉ
Source: Essor