Décidément, le ridicule ne tue plus au Mali. Les magistrats qui sont un corps qui se réclame de la haute élite de la société sont en train de procéder à des chantages de bas étages contre le gouvernement. Des méthodes de caniveaux pour faire reculer un ministre de la République dans l’application des textes pour lesquels eux-mêmes ils sont payés pour garantir la bonne application au besoin. Hélas ! Le Mali tombe encore une fois sous l’hôtel des intérêts égoïstes d’un corps de fonctionnaires, qui n’ont aucun respect pour les usagers.
Depuis l’annonce de la sanction pécuniaire contre les magistrats grévistes, la peur a semblé changer de camp. L’effet dépresseur de cette thérapie du groupe a aussitôt créé la panique dans les rangs des syndicalistes. Car, tenant le cordon de la bourse, le gouvernement risque d’imploser le mouvement en démobilisant les militants occupés à nourrir leurs familles que de se battre pour des raisons pas tout à fait claires. Une chose est d’énumérer un catalogue de points de revendications pour mobiliser la foule de militants « suivistes » facilement manipulables, surtout quand il s’agit d’argent, mais une autre est de s’interroger sur le vrai mobile des leaders. Et surtout, sur ce plan, il y a beaucoup de zones d’ombre qui entourent cette question. En tous les cas, l’annonce de cette nouvelle a semble-t-il ébranlé certains leaders syndicaux, notamment le président par intérim du Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM), Alou Badra Nanakassé, qui a visiblement sombré dans la délation publique et la déraison, attestant du coup, son amateurisme et sa non maîtrise de ses militants. Lesquels peuvent basculer sous l’effet de la menace de la retenue sur leurs salaires en fonction du nombre de jours d’arrêt de travail.
Que la retenue se limite au tiers du salaire comme le président intérimaire du SAM l’a expliqué dans son interview accordée à nos confrères de l’Indépendant ou qu’elle engloutisse toute la rémunération du mois, dans tous les cas, c’est une perte énorme que tout le monde n’est forcément prêt à assumer. Donc, Alou Badra Nanakassé a forcément de quoi s’inquiéter. Mais, en procédant à ces genres de chantages de bas niveau, il expose la magistrature à des observations critiques pas forcément maliennes. Car, qu’on le veuille ou non, cette méthode de lutte démontre à la fois leur irresponsabilité et leur manque de considération pour les citoyens maliens auxquels ils sont redevables. La loi leur confère le plein pouvoir de débarrasser la société des délinquants de quelque bord que ce soit. Au lieu de s’acquitter correctement de leur travail pour mériter leur salaire, Nanakassé sort des petits moyens pour faire valoir leurs droits. Encore quels droits et pour quels résultats si l’on sait que certains juges, menacés de mort pour des faits qualifiés de corruption par les justiciables, sont exfiltrés nuitamment de leurs lieux de travail. Le cas du juge de Bandiagara a défrayé la chronique un moment. Bref, les revendications pécuniaires des juges doivent être regardées avec réserve si l’on sait qu’un jeune magistrat fraîchement recruté démarre avec une bagatelle de 700.000 FCFA comme 1er salaire. Il y a de quoi prendre la tête devant un tel montant dans les conditions maliennes.
C’est dire en terme simple que la société malienne déjà éprouvée par les vicissitudes de la vie, attend plutôt de Nanakassé et ses collègues des décisions concrètes et salutaires pour non seulement anticiper et empêcher des détournements de nos maigres ressources ou pour sévir au besoin comme la loi leur font obligation au lieu de médire ou faire chanter un ministre comme ils l’ont fait dans cet article de presse. Le peuple souverain du Mali n’attend pas de ses serviteurs, des épées de Damoclès sur la tête des gouvernants, notamment le pauvre ministre de l’Economie et des Finances, Dr Boubou Cissé, qui ne fait que son boulot.
Pour rappel, les présidents de la République Amadou Toumani Touré et Ibrahim Boubacar Kéïta, ont tous les deux affirmé haut et fort, qu’ils ne gardent pas les dossiers qui leur sont transmis par les structures de contrôle. Tous sont remis à la Justice pour qu’elle fasse son boulot. Si elle ne le fait, ce n’est donc ni le lieu ni le moment de brandir un pamphlet comme un moyen de lutte pour faire reculer le gouvernement. Oui un pamphlet ! Car cette information n’a rien de profond. Est-il besoin de rappeler que Dr Boubou Cissé ne fait qu’appliquer une loi que le magistrat lui-même a reconnu dans son entretien. Dans ces conditions, pourquoi menacer le gouvernement de divulgation de dossiers si l’on n’a rien à se reprocher ? Et pourquoi attendre maintenant pour brandir une telle menace ? C’est vraiment le comble de l’amateurisme.
Pour parler du mobile de la grève et de la motivation des grévistes, il y a lieu de s’y arrêter un peu pour l’analyser à la loupe. Cette partie de l’exercice fera l’objet d’un autre article.
Affaire à suivre.
M.A. Diakité
Source: Tjikan