« Confrontés à un fléau ». La formule de la ministre des Mines et du pétrole, Mme Lelenta Hawa Baba Ba, prononcée à l’occasion d’un atelier sur l’utilisation des produits chimiques sur les sites d’orpaillage le 31 octobre a le mérite d’être claire. En réduire l’utilisation pour réduire les risques sur la santé publique et préserver l’environnement, est la priorité qu’elle s’est fixée.
Lors de la dernière Quinzaine de l’environnement, en juin, des rapports montraient que 2 063 tonnes de mercure avaient été émises dans l’air, ce qui constitue la plus grande source de pollution dans le monde.
Une véritable sinusoïde pour la préservation de l’écosystème. Et ce en dépit des actions conjuguées des ministères des Mines et de l’Environnement. Missions de sensibilisation sur le terrain, interdiction du dragage, rien n’y fait, la situation persiste, à leur grand dam. « Nous constatons des actions qui réduisent l’efficacité de nos mesures sur le terrain », reconnait la ministre des Mines, qui demande l’accompagnement d’autres acteurs (justice, sécurité…) pour mener cette lutte transversale. Aly N’Tji Diarra, chercheur, spécialiste de l’artisanat minier, regrette la « faiblesse » des contraintes juridiques, qui rend la lutte difficile.
En quête d’alternatives au mercure et au cyanure
C’est le souhait des décideurs et des acteurs environnementaux. Ces deux produits sont épinglés dans les ravages de l’environnement. Selon des chiffres d’un rapport non encore validé, 35 tonnes de mercure sont utilisées chaque année au Mali. 87% de l’or extrait l’est en utilisant un procédé à base de mercure. Le Mali est en retard dans la mise en œuvre de solutions alternatives à l’utilisation du mercure, même pour en réduire le taux. Le pays a pourtant, à l’instar de nombreux autres, adhéré à la convention de Minamata, entrée en vigueur en 2017. Développée sous l’égide du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), elle vise à protéger la santé humaine et l’environnement des effets néfastes du mercure. Depuis, le ministère de l’Environnement a commandé un inventaire du mercure sur les sites d’orpaillage. Mais, au regard des chiffres, les résultats tardent. « Il est difficile de trouver des solutions lorsqu’on ne se rend pas compte qu’il y a un problème. Ceux qui utilisent le mercure aujourd’hui ne mesurent pas pleinement les effets négatifs que cela peut avoir », déplore Cheick Fantamady Keita, Directeur de la Géologie et des mines. Un atelier de formation et de sensibilisation sur la protection de l’environnement à l’endroit des orpailleurs a été organisé en septembre dernier par la Chambre des mines du Mali. Il avait pour but d’outiller les travailleurs miniers afin qu’ils servent de relais entre leurs collègues orpailleurs et la Chambre des mines. La cyanuration, également très utilisée dans l’industrie minière pour l’extraction de l’or, pose aussi un certain nombre de problèmes, au rang desquels l’utilisation du procédé dans des forêts classées.
Halte au dragage
Dans le nouveau Code minier, dont le projet d’ordonnance a été adopté en août à l’issue du Conseil des ministres, l’exploitation par dragage a été suspendue. Le ministre de l’Environnement et du développement durable, Housseini Amion Guindo, s’est évertué à le rappeler lors d’une visite début octobre dans les locaux de l’Agence du bassin du fleuve Niger. « L’orpaillage par drague sur le fleuve Niger a été suspendu jusqu’à nouvel ordre. En la matière, la responsabilité de l’équipe des membres du gouvernement a été engagée devant le ministre en charge des Mines et du pétrole. Nous l’accompagnons, avec le ministère de la Sécurité et celui de l’Administration territoriale, pour que cesse définitivement le dragage dans le lit du fleuve », avait-il précisé. « Donc, avec le temps et la sensibilisation dans le sens du civisme, mais aussi avec l’application stricte de la réglementation en vigueur, nous allons pouvoir endiguer ce fléau, qui menace plus de 15 millions de personnes. Car, c’est à partir de ce fleuve Niger que Bamako, Koulikoro, Ségou, Mopti, Tombouctou et Gao s’approvisionnent en eau potable. C’est vital pour toutes ces populations, que ce soit en termes de consommation ou pour l’aménagement des terres irrigables. C’est vraiment dans l’intérêt général que nous luttons contre ces outils dévastateurs pour l’environnement », avait-il ajouté.
Boubacar Sidiki Haidara
Journal du mali