Annoncé avec tambour et trompète pour être une des grandes réformes politiques dans notre pays, finalement, la loi 052 crée beaucoup plus de problèmes qu’il n’en résout. En effet, avec l’élaboration des listes électorales pour les législatives du 25 novembre, c’est à la guerre comme à la guerre dans les états-majors politiques. Presque aucun parti politique n’est épargné par les guerres de places pour l’élection des députés à l’Assemblée nationale. A l’évidence, on ne semble pas prêt à faire la place aux femmes comme l’exige la loi.
Adoptée par l’Assemblée nationale, lors de sa séance plénière du 18 décembre 2015, la loi 052, portant promotion du genre dans les fonctions nominatives et électives est devenue un caillou dans les chaussures des partis politiques. Quel manque de galanterie ! Cette loi prévoit au moins 30% pour l’un ou l’autre des deux sexes dans les fonctions nominatives et électives. Son décret d’application n’est pas non plus venu faciliter le travail aux hommes politiques. Cette loi prévoit sur une liste de 3 qu’il faut au moins une femme et deux hommes et vis versa. Pour les listes électorales de 4 députés, la loi exige qu’il faille deux hommes et trois femmes. Pour les listes de 5 députés, il faut au moins deux femmes et trois hommes ou encore deux hommes et trois femmes. Pour les listes de 7 députés, le nombre légal c’est 3 femmes et 4 hommes ou vis versa. Voilà pourquoi, il y a la tension dans tous les partis politiques.
Pourtant, après l’adoption de ce texte de loi, celui-ci a été vanté comme un trophée de guerre à l’actif du Président de la République et de sa majorité parlementaire. Face à la réalité du terrain aujourd’hui l’euphorie a laissé à la dysphorie. Partout à l’intérieur des partis, c’est le désenchantement total. Car, nombreux sont les députés en fonction qui rechignent à laisser leur place aux femmes. Cette situation a créé une atmosphère implosive à l’intérieur des états-majors politiques. C’est pourquoi, on assiste un peu partout à des démissions des députés, notamment du parti présidentiel, le RPM. En moins de 15 jours, plusieurs députés du RPM ont claqué la porte du parti au pouvoir, parce que non maintenus sur la liste, pour tenter leur chance à ailleurs. Parmi les démissionnaires, on peut citer, entre autres, Ousmane Kouyaté à Kolokani, Lamine Théra à San, Abdine Koumaré à Ségou.
Hormis les députés, plusieurs autres partis sont confrontés à ce difficile choix de respecter des dispositions de la loi 052. Des alliances qui avaient été formulées en 2013 ont volé en éclat. C’est le cas, par exemple, de l’alliance RPM-URD-FARE-ADEMA à Dioïla, qui a été disloquée. C’est la même chose à Koutiala où le RPM, l’ADEMA et SADI sont obligés de se séparer. La même situation a poussé le député Abdine Koumaré à claquer la porte du RPM à Ségou. Le même scénario se dessine à Kita où l’un des deux députés RPM, Mamadou Tounkara dit Do ou son colistier Mohamed Tounkara risque de faire les frais de la loi. Pourtant, en votant la loi 052 en 2015, les députés du RPM savaient bel et bien que certains d’entre eux seront obligés de laisser leurs places aux femmes lors des prochaines législatives.
Youssouf Diallo
La Lettre du Mali