La durée de la transition malienne fixée désormais à vingt- quatre (24) mois donne une nouvelle chance au gouvernement d’ouvrir une autre page avec l’ensemble des acteurs des forces vives de la nation pour mettre sur pied le Mali dont rêvent nos compatriotes depuis des années. Un an de gestion tapageuse a montré les limites objectives d’un Premier ministre, plutôt décidé à en découvre avec ses compagnons de lutte que de faire face aux défis auxquels le Mali est confronté. La balle est désormais dans le camp du président de la transition, le colonel Assimi Goïta, pour apaiser le climat socio- politique pollué par une gouvernance sans vision et arrogante.
En se donnant une durée de vingt- quatre (24) mois, la transition malienne n’a plus droit à l’erreur. La décision prise par les autorités supposent qu’elles disposent suffisamment de temps pour engager les réformes politiques et institutionnelles nécessaires devant aboutir à l’organisation des élections pour le retour à l’ordre constitutionnel, rompu le 20 août 2020 par l’arrestation du président Ibrahim Boubacar Keïta et sa démission de ses fonctions de président de la République. Nous estimons que ce délai va consacrer la mort cérébrale de l’arrogance, du mépris, de la haine, de la division, du clanisme, du népotisme, du favoritisme, érigés en mode de gouvernance durant les douze derniers mois écoulés.
Ce nouveau départ, que les autorités de la transition ont voulu pour notre pays en fixant la date de la transition avant la réunion des chefs de l’État de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) du 3 juillet prochain, est l’ultime occasion pour le gouvernement malien de prendre langue avec les Maliens de tous bords pour aller à l’essentiel et au plus vite : la construction de l’homme malien. Sans ce travail patriotique, toute reforme initiée est vouée à l’échec. Toutes les nations qui se sont développées et qui font la fierté des peuples paresseux sont toutes passées par là. Elles ont mis l’homme au cœur de leur politique de développement. Et le résultat est là : elles font le bonheur de leur peuple et tiennent tête aux autres dans les négociations par la qualité de leurs ressources humaines compétentes et qualifiées.
Le Mali n’est pas étranger à cette politique de formation de l’homme. Il avait entamé ce vaste chantier sous la première République. Malheureusement, le coup d’État de novembre 1968 et l’arrivée des vrais faux démocrates au pouvoir en 1992 ont balayé d’un revers de main cette construction citoyenne lancée par le président patriote Modibo Keïta. Il suffit de revoir et d’améliorer les politiques d’encadrement de la jeunesse initiées par le président Modibo Keïta pour faire sortir la jeunesse actuelle de la violence, de la drogue, du fatalisme. Parmi celles- ci, on peut citer: la Semaine nationale de la jeunesse, le Mouvement Pionnier, la formation politique. Ils ont été un creuset dans lequel tous les enfants du Mali se retrouvaient autour des valeurs du pays. Ils ont doté la jeunesse malienne d’une conscience nationale, de l’amour de la patrie, le sacrifice suprême et le don de soi. Ces rencontres ont permis aux uns et aux autres de se connaître, de tisser des liens d’amitié, de mariage et de porter le Mali dans leur cœur et à le défendre jusqu’aux dernières gouttes de leur sang. Les exemples ne manquent pour nous rafraichir la mémoire: les deux guerres contre la Haute Volta (actuel Burkina Faso), les succès de la culture malienne au firmament mondial.
Ensuite, viendront les réformes politiques et institutionnelles. Elles seront portées par le nouvel homme malien pétri des valeurs d’intégrité, d’honnêteté, de crédibilité, de sobriété, de don de soi. Les réformes doivent être faites autour de ces valeurs pour que le nouveau citoyen malien travaille pour le bonheur de ses compatriotes. Sans cela, elles seront vaines. Et on dira, adieu au Mali Kura. Le Mali nouveau ne se fera pas avec cette jeunesse abonnée aux slogans creux qu’on est en train de transformer en projet politique pour noyer les vrais problèmes du pays. Il se construira avec une jeunesse consciente, engagée et dévouée.
Et quand on parviendra à réunir ces conditions, on parlera des élections avec comme socle la sécurité sur l’ensemble du territoire national. Nous avons bon espoir que le travail patriotique, mené par l’armée malienne sur le terrain pour libérer notre pays des mains des bandits de toutes sortes, se terminera par une victoire éclatante sur les ennemis. Aussi, faut-il redessiner une nouvelle carte diplomatique avec la nouvelle configuration des relations internationales. Déjà, on peut se féliciter du travail abattu par le gouvernement dans ce domaine. Beaucoup de nouveaux partenaires tapent à la porte du Mali pour nouer des liens de coopération. C’est à nous de tirer le meilleur profit pour notre pays. Nous pensons qu’il ne s’agira plus de se contenter des dons, d’aides et de crédits, mais d’un transfert de technologie. Par exemple, avec la Russie, on peut mettre l’accent sur la culture du blé en demandant son expertise (formation, aménagement des terres, construction d’usines de transformation…).
Il y a aussi le concours clean organisé par le ministère de la Fonction publique. La publication des résultats du concours 2021 a coupé court à toutes les rumeurs. Mme Diawara Aoua Paule Diallo a montré qu’il suffit de prendre son courage avec les deux mains pour changer les vieilles habitudes.
Aujourd’hui, le Mali Kura se manifeste dans ces trois domaines. Et si nous voulons que cela se consolide après la transition, il faut impérativement un nouveau type de Malien pour porter encore la voix du Mali de par le monde. Sinon, si notre pays tombe dans les mains d’une autre personne qui n’est pas imprégnée de la nouvelle orientation politique du Mali, c’est le retour à la case départ.
Yoro SOW
Source : L’Inter de Bamako