Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel (Bamako, le 5 novembre 2013)
Monsieur le Secrétaire général des Nations Unies,
Madame la Présidente de la Commission de l’Union africaine ;
Messieurs les Présidents de la Banque mondiale, de la Banque africaine de Développement, de la Banque islamique de Développement ;
Monsieur le Commissaire de l’Union européenne ;
Monsieur le Président de la Commission de la CEDEAO ;
Mesdames et Messieurs.
Distingués invités,
Le Samedi 2 novembre 2013, Ghyslaine Dupont et Claude Verlon sont tombés à Kidal sous les balles de terroristes au cœur rempli de haine; haine à l’égard de leurs frères et sœurs, haine à l’égard des étrangers qui nous font l’honneur de visiter notre pays ; haine à l’égard de leur propre personne; haine à l’égard de leur mères, de leurs épouses qu’ils plongent dans le deuil pour toujours…
Rien, absolument rien, ne peut justifier un tel déferlement de haine, un tel mépris de la vie humaine. Rien, absolument rien.
Au nom du Peuple Malien, j’adresse mes condoléances les plus émues aux familles des disparus. Qu’Allah leur accorde Sa Grâce, Sa Miséricorde et qu’Il les gratifie des bienfaits de l’Au-delà.
Notre Peuple est pacifique. Nous avons une longue et puissante tradition d’hospitalité, d’ouverture, d’acceptation de l’Autre. Nous chérissons la paix. Nous voulons la Paix pour nous consacrer aux défis immenses qui sont là devant nous.
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs,
C’est avec un réel plaisir que je vous souhaite la bienvenue à Bamako, en cette terre africaine du Mali, une Nation, riche de son histoire millénaire, de sa diversité culturelle, de son métissage et de ses valeurs de tolérance, de paix, d’ouverture et d’acceptation de l’Autre.
Le Peuple malien vous exprime ses sincères remerciements et sa profonde gratitude pour les efforts louables et continus que vous ne cessez de déployer en faveur de la résolution définitive de la crise que le Mali a connue.
La tenue à Bamako de la Première Réunion Ministérielle sur le Sahel constitue une marque d’estime considérable à l’endroit du Mali.
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs,
Nous apprécions hautement la marque de solidarité que la Communauté internationale manifeste à l’égard du Mali et la présence à vos côtés des chefs des principales institutions de financement du développement en est une illustration éclatante.
Le 26 septembre 2013, à New York, lors de la réunion de haut niveau sur le Sahel, j’ai accueilli favorablement le Rapport du Secrétaire général sur la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, rapport présenté par Monsieur Romano PRODI.
J’ai réitéré entre autres, à cette occasion, l’engagement du Mali à soutenir toutes initiatives aux niveaux régional et international, allant dans le sens d’une complémentarité, qui permette de répondre aux besoins immédiats et à long terme des pays de la région du Sahel dans les domaines de la sécurité, de la gouvernance, du développement et de l’humanitaire.
La deuxième Réunion de haut niveau a donné une nouvelle impulsion à la stratégie intégrée des Nations Unies pour la région du Sahel à travers le lancement d’un mécanisme de coordination axé sur une meilleure cohérence des interventions des partenaires régionaux et internationaux impliqués dans la recherche de solutions aux problèmes de la région.
La présente tournée que vous effectuez dans la région du Sahel participe de cette nouvelle dynamique.
Du fait de l’importance de cette initiative, j’ai jugé opportun d’instruire le Gouvernement de la République du Mali, en relation avec les Nations Unies et les partenaires concernés, d’organiser ici à Bamako, la présente réunion ministérielle.
Le Mali est résolument déterminé à jouer son rôle dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs,
Le Sahel abrite un maelstrom complexe de problèmes multidimensionnels. Il se présente comme une mer intérieure secouée par des tempêtes et des convulsions multiples.
De l’Atlantique à l’Océan indien, cet espace géopolitique abrite de nombreuses zones de non-droit, des milliers de trafiquants en tous genres, des groupes terroristes et djihadistes, s’alliant aux uns et autres selon les circonstances. Ces groupes sèment la désolation et la terreur. Ils entravent la liberté de circulation des hommes, des biens et marchandises. Ils constituent de ce fait une entrave majeure au développement.
Ces groupes menacent la paix et la sécurité des États de la région et, au-delà de la région, la Paix et la Sécurité de nos voisins des rives de la Méditerranée, et même, la paix mondiale.
Le Mali, à l’instar des autres pays de la Région, est victime de cette concentration de vulnérabilités.
Le moment est venu, pour nous, Etats de la région du Sahel, de nous attaquer vigoureusement à ces questions qui sont au cœur du devenir de nos pays, et qui ralentissent notre marche en avant.
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs,
C’est le lieu et le moment de le dire avec force.
Aucun État de la région ne peut faire face seul aux problèmes qui nous assaillent.
Nous sommes indissolublement liés dans une communauté de destin voulue par Le Tout Puissant.
La somme de nos efforts sera toujours supérieure à l’action individuelle que pourrait mener tel ou tel d’entre nous.
Il nous faut absolument, d’une part, identifier les projets structurants et; d’autre part, favoriser la convergence de nos actions en vue de l’avènement d’une ère de co-prospérité permettant aux habitants de cette contrée de sortir des limbes de l’insécurité, du sous-développement, de la misère sociale et intellectuelle.
Toutes nos actions doivent converger vers la matérialisation du triptyque Sécurité, Développement et Paix; car il n’y a pas de développement sans la Sécurité et la Paix. D’un autre côté, la Paix et la Sécurité demeureront précaires s’il n’y a pas de développement. Il y a là un continuum dialectique indissociable entre les trois branches de ce triptyque.
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs,
La Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel est une opportunité singulière nous offrant la possibilité de donner le meilleur de nous-mêmes pour faire véritablement de cette Région un Espace de Co-prospérité économique et sociale adossé à une Zone de Paix et de Sécurité renforcées.
Oui, monsieur le Secrétaire Général, il nous faut revérifier les prémisses, les doctrines et toutes les sincérités.
Il faut que les Nations-Unies jouent leur rôle véritable et historique pour que le septentrion malien retrouve la paix et que le Mali continue avec son agenda, c’est-à-dire le développement pour tous et pour toutes les régions.
Chaque pays membre de l’Onu porteur de solution doit être le bienvenu dans ce combat qui interpelle le monde entier.
Inclure tout le monde et n’exclure personne est la seule issue pour que notre pays retrouve sa stabilité.
Et l’Onu est le réceptacle naturel de ce partenariat qui rendrait, au-delà du Mali, le Sahel plus fort et plus uni contre ses forces centrifuges ainsi que les menaces périphériques.
Cela dit, Monsieur le Secrétaire Général, comme vous le savez, la MINUSMA reste en grand besoin de troupes et de moyens, et vous savez à quel point cette mission est importante pour la stabilisation du Nord malien, préalable du chantier de la reconstruction qui ne saurait être retardé.
Aux appels déjà lancés par vous, j’ajoute celui de la République du Mali pour que très vite, l’arrivée de nouvelles troupes et de nouveaux moyens puisse permettre d’atteindre une masse critique dissuasive pour les forces du mal encore vivaces dans notre septentrion.
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs,
Les Assises nationales sur le Nord se sont déroulées du 1er au 03 novembre dans l’enceinte même de ce Centre de conférences. Elles ont permis à l’ensemble des composantes sociales et communautaires de débattre librement des questions fondamentales touchant au devenir de notre Nation. Ces Assises constituent une étape majeure dans le processus de réconciliation nationale et de refondation du Contrat social unissant les Maliens. Elles ont permis de lever les équivoques sur certaines questions et de favoriser une meilleure compréhension des défis auquel notre Peuple fait face.
Tous les Maliens mesurent la gravité, la densité et la complexité des problèmes qui assaillent notre Pays.
Notre Peuple aspire fondamentalement au changement, au progrès matériel et spirituel. Les Maliens désirent ardemment la Paix. Ils attendent des dirigeants un comportement exemplaire dans la gestion des deniers publics et dans l’observation d’une nouvelle éthique sociale valorisant, magnifiant les valeurs positives qui ont, jadis, donné à notre Nation un cachet singulier en Afrique et dans le Monde.
Le Mali est en marche vers une nouvelle destinée qui sera le fruit de l’action conjuguée de tous les fils de cette Nation. Une Nation rassemblée, réconciliée avec elle-même, avec son histoire, avec l’Humanité. Chaque fois que nous avons tourné le dos à notre histoire, nous nous sommes égarés du chemin devant nous conduire vers l’excellence sociale, morale, intellectuelle… Une Nation n’est grande que si ses fils acceptent de surmonter leur ego, d’accomplir des sacrifices pour le Bien Commun, de mettre la Patrie au-dessus de toute autre considération, de chérir la Justice, de bannir le Mensonge…
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs,
Il est impératif de mettre un terme à la situation prévalant à Kidal au risque de connaître des situations imprévisibles susceptibles d’entrainer des développements difficilement maitrisables.
Kidal doit revenir à la lumière du jour. Kidal doit être lisible. Kidal doit être visible dans le processus de consolidation de la paix. Kidal doit être comme toutes les régions du Mali.
Je ne saurais, en aucun cas, tolérer davantage qu’une partie du Mali soit soustraite à la loi de la Nation et à la morale tout court. Le Mali ne peut pas tolérer que Kidal soit la bourse régionale du crime organisé.
Mon Gouvernement a fait l’option stratégique de la paix, du dialogue pour résoudre les problèmes découlant du mal-vivre de nos frères du nord du Mali et de toutes les communautés nationales.
Notre Peuple rejette le fracas des armes. Il veut une solution durable et définitive à la crise qui secoue le nord du pays. Nous rechercherons inlassablement la paix pour éviter à notre peuple de nouvelles meurtrissures.
J’invite, une fois de plus, les groupes armés à déposer les armes, sans délai, et à venir s’assoir à la table de négociation, aux côtés de leurs frères et sœurs qui veulent les aider à surmonter leurs rancœurs et à faciliter leur intégration dans la Nation. Il n’y a pas de problèmes sans solution lorsque les hommes sont de bonne foi et désireux d’aller de l’avant.
La Porte du Dialogue demeure ouverte, je les invite à la franchir afin que nous mettions fin aux souffrances inutiles infligées à notre Peuple.
Cheminons ensemble vers la Paix et le Développement pour le bien de tous les fils de la Nation.
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs,
Le sous-développement, l’insécurité, ne sont pas une fatalité.
Le remède à tous ces maux, c’est l’Homme. Et, l’Homme peut être aussi grand qu’il le veut lorsqu’il est animé d’une foi inébranlable en l’Homme, cette créature sublime de Dieu, et lorsqu’il est dédié à la cause de la Justice, de la Paix et du Développement.
Mesdames et Messieurs,
Je vous exhorte à ne ménager aucun effort afin que de vos délibérations sortent des recommandations pertinentes à la hauteur des résultats escomptés par les Peuples du Sahel.
Je souhaite plein succès à vos à travaux.
Je déclare ouverte la première réunion ministérielle pour l’établissement d’une plateforme de coordination de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.
Vive la République !
Vive le Mali !
Qu’ALLAH accorde la Paix, le Développement et la Sécurité à tous les Peuples de la Région du Sahel.
Je vous remercie.