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Dernier rapport de Human Rights Watch sur le centre du Mali/ : En 2019, 456 civils tués et des centaines d’autres blessés / : L’Etat malien interpellé

Dans son dernier rapport sur le Mali, Human Rights Watch demande aux autorités maliennes « d’accélérer de toute urgence les enquêtes et les poursuites contre les responsables » des tueries dans le centre du pays. Selon l’organisation de défense des droits humains, des attaques perpétrées, de janvier à novembre 2019 dans le centre du Mali, vraisemblablement par des milices ethniques et des groupes islamistes armés, ont fait moins 456 morts et des centaines de blessés parmi les civils. Les attaques décrites, indique Human Rights Watch, ont eu lieu dans plus de 50 hameaux, villages et villes de la région de Mopti, situés pour la plupart près de la frontière entre le Mali et le Burkina Faso. « Les civils étaient les principales cibles des attaques, dont plusieurs semblaient avoir été soigneusement planifiées et organisées. »

Dans son nouveau rapport, publié le 10 février 2020, Human Rights Watch accuse les groupes armés d’avoir tué des centaines de civils dans le centre du Mali en 2019, ce qui en fait l’année la plus meurtrière pour les civils depuis l’éruption, en 2012, de la crise politique et militaire dans ce pays. L’épicentre de la violence se situe dans le centre du Mali, notamment dans la région de Mopti, selon Human Rights Watch.  « Des islamistes armés et des groupes d’autodéfense à caractère ethnique ont massacré des gens dans leurs villages, les ont abattus alors que ceux-ci fuyaient et ont exécuté des hommes après les avoir séparés des autres passagers de véhicules de transport publics en raison de leur appartenance ethnique. De nombreux habitants qui n’ont pas pu échapper aux attaques armées ont été brûlés vifs chez eux, tandis que d’autres ont été tués par des explosifs », explique l’organisation de défense des droits humains.

Selon Human Rights Watch, le nombre total de civils tués dans le centre du Mali en 2019 lors d’attaques communautaires et d’attaques d’islamistes armés est bien plus élevé que celui indiqué dans ce rapport, car d’incessantes représailles sont exercées dans des zones souvent isolées. « Les victimes de ces attaques, pour lesquelles il n’y avait souvent pas de témoins, ont été tuées par balle ou à coups de couteau alors qu’elles s’occupaient de leur bétail, travaillaient dans leurs champs ou se rendaient au marché pour faire des achats ou vendre leurs produits. », note, dans son rapport Human Rights Watch. Et le rapport poursuit que dans la quasi-totalité des attaques commises par des groupes d’autodéfense dogons ou peuls, et par des islamistes armés, les villages, hameaux et greniers ont été brûlés et détruits, et le bétail, les réserves de nourriture et les objets de valeurs ont été pillés. « Les violences qui ont touché le centre du Mali en 2019 ont contraint des dizaines de milliers d’habitants de fuir leur domicile et sont à l’origine d’une famine de grande ampleur. » Selon Corinne Dufka, directrice de Human Rights Watch pour l’Afrique de l’Ouest et autrice du rapport « À travers la région centrale du Mali, des groupes armés tuent, mutilent et terrorisent des communautés, apparemment sans craindre de devoir rendre des comptes, le bilan humain en vies détruites s’alourdit à mesure que se répètent les cycles mortels de violence et de vengeance. »

vendetta des milices armées

Pour Human Rights Watch, la violence qui touche le centre du Mali s’est intensifiée progressivement depuis 2015, quand des groupes islamistes armés alliés d’Al-Qaïda ont commencé leur descente du nord vers le centre du pays. Depuis lors, ces derniers, ainsi que des groupes récemment ralliés à l’État islamique dans le Grand Sahara, ont attaqué les forces de sécurité du gouvernement et commis des atrocités contre des civils. « Les attaques documentées ont eu lieu dans plus de 50 hameaux et villages situés pour la plupart à proximité de la frontière entre le Mali et le Burkina Faso, et ont entraîné des déplacements de grande ampleur et des épisodes de famine. », note le rapport. Selon Human Rights Watch, le recrutement, par les islamistes armés, de membres des communautés pastorales peules (ou foulanis) a attisé les tensions avec les communautés agraires, et celles-ci, face aux mesures de sécurité inadéquates du gouvernement, ont constitué des groupes d’autodéfense. « L’accès aisé à des armes militaires et l’impunité ont contribué au caractère létal des attaques. » Le rapport indique aussi que les groupes d’autodéfense dogons ont perpétré des attaques contre la communauté peule en raison du soutien perçu de cette dernière aux islamistes armés. « Il s’agit des premières atrocités commises en 2019 — le meurtre, le 1er janvier, de 39 civils peuls à Koulogon — ainsi que des pires atrocités qu’ait endurées le Mali dans son histoire récente, à savoir, le meurtre, le 23 mars, de plus de 150 civils peuls à Ogossagou. »

« Les attaques communautaires commises par des hommes peuls armés sont notamment le massacre de 35 civils dogons, à Sobane-Da, et le meurtre de commerçants de retour des marchés locaux. Les atrocités commises par les islamistes armés sont notamment le meurtre d’au moins 38 civils dans des attaques simultanées contre les villages de Yoro et de Gangafani II. Plus de 50 autres civils ont été tués par des engins explosifs qui auraient été posés par des islamistes armés. Parmi ces victimes figurent 17 personnes décédées dans l’explosion du corps piégé d’un homme qu’elles étaient en train d’enterrer. L’homme était atteint d’un handicap mental et aurait été tué quelques jours auparavant », explique, dans son rapport Human Rights Watch.

Le nombre total de civils tués lors d’attaques communautaires et d’attaques d’islamistes armés en 2019, note le rapport, est beaucoup plus élevé que le nombre de décès documentés, car des éleveurs et des agriculteurs ont été tués près de leurs bêtes ou dans leur champ au cours de nombreuses actions de représailles.

Les autorités maliennes, une fois de plus, interpellées

Selon Human Rights Watch, le gouvernement malien a promis que les responsables des pires atrocités seraient traduits en justice. En 2019, indique l’organisation de défense des droits humains, les tribunaux maliens ont ouvert plusieurs enquêtes et condamné environ 45 personnes au motif d’incidents moins graves de violences communautaires. Cependant, précise Human RIGNTS Watch, les autorités judiciaires n’ont toujours pas interrogé, et encore moins poursuivi en justice, les puissants leaders de groupes armés impliqués dans de nombreux massacres. Human Rights Watch rapporte que de nombreux villageois ont estimé que l’absence de recherche de responsabilité encourageait les groupes armés à poursuivre leurs exactions. « Depuis 2015, Human Rights Watch a documenté les meurtres, par des milices ethniques et par des islamistes armés, de près de 800 civils dans le centre du Mali. Seuls deux procès pour meurtre ont eu lieu.»

De l’avis de Human Rights Watch, les autorités maliennes devraient consacrer davantage d’énergie et de ressources à enquêter correctement et à poursuivre en justice tous les responsables d’exactions graves. Dans ce sens, Human Rights Watch estime que les partenaires internationaux du Mali devraient renforcer leur soutien au système judiciaire du centre du Mali et au Pôle judiciaire spécialisé dans de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée, dont le mandat a été élargi en 2019 afin d’y inclure les crimes de guerre et d’autres crimes internationaux graves.
Corinne Dufka indique que « l’échec du gouvernement malien à punir les groupes armés, tous bords confondus, encourage ces derniers à commettre d’autres atrocités.» Selon elle, « le gouvernement, avec l’aide de ses partenaires internationaux, doit déployer beaucoup plus d’efforts pour poursuivre les responsables des crimes en justice et démanteler les groupes armés auteurs d’exactions. »
M.K. Diakité

  Source: Le Républicain

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