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Décrispation politique : •Le chemin est encore rocailleux •Une nouvelle transition n’est pas à exclure

L’actualité ces dernières semaines est focalisée sur les évènements malheureux survenus les 17 et 23 mars 2019, notamment l’attaque du camp militaire de Dioura et le massacre des civils peuls à Ogossagou. Elle a relégué au second plan les informations ayant trait aux activités politiques. Il faut dire que le temps ne s’est pour autant pas arrêté pour les acteurs politiques qui continuent à rechercher les voies et moyens pouvant conduire à une décrispation du climat politique.

Dans le courant de la dernière semaine du mois de février dernier, un processus de décrispation de l’atmosphère politique a été enclenché par les deux principaux protagonistes de la crise politique malienne, à savoir le Président de la République Ibrahim Boubacar Keïta et le chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé. Depuis plus d’un mois que ce processus de décrispation est lancé, les Maliens attendent toujours les retombées sur le quotidien. Devrait-on alors se demander si les Maliens ne se sont pas trop tôt réjouis de l’entame de ce processus de décrispation du climat politique, matérialisé par de nombreuses rencontres entre le Président de la République, le Chef de file de l’opposition et d’autres personnalités du pays ? A bien disserter sur les probables suites de ce conciliabule, la réponse à ce questionnement pourrait bien être l’affirmative dans la mesure où de profondes divergences pourraient apparaitre et avoir des impacts négatifs sur le processus de décrispation. On sait que dans leurs engagements respectifs à faire en sorte de décrisper le climat politique, IBK et Soumaïla ont opté, chacun de son côté, pour une démarche qui ouvre la voie à des consultations tous azimuts avec des acteurs occupant le devant de la scène politique et aussi des leaders d’opinion et de la société civile. Les anciens Chefs d’Etat maliens ont été consultés à cet effet et cela est tout en leur honneur. Ce qu’il ne faut surtout pas perdre de vue dans ce processus de décrispation du climat politique malien, c’est le fait qu’il a lieu à un moment charnière de la vie de la nation où le facteur ‘’temps’’ est déterminant. C’est donc dire qu’il faut vraiment redouter que le facteur ‘’temps’’ ne soit un handicap au point que l’on soit contraint d’en appeller à une ‘’nouvelle transition’’,faute de pouvoir conduire à leurs termes, les réformes qui s’imposent. Si les deux principaux protagonistes de la crise politique malienne, ont décidé de faire la paix des braves, il est tout à fait normal que cette prédisposition à la conciliation des cœurs soit accompagnée de toute une série de concertations et ce n’est qu’à l’issue desdites concertations que l’on devrait définir la suite à donner au processus de résolution de la crise. Cela est plutôt normal dans la mesure où l’on sait que deux options, différentes dans leurs essences, peuvent être sur la table même si chacune d’elles en appelle à une révision de la Constitution. Mais là où le bât blesse et qui constituera forcément un point d’achoppement entre la majorité présidentielle et l’opposition, c’est la conception que chaque pôle se fait des modifications à apporter à la Loi Fondamentale. Dans l’entendement de la majorité présidentielle, lesdites modifications seront définies par un cadre de concertation national, au cours duquel les débats devront être exclusivement axés sur les réformes administratives et institutionnelles initiées par le Président de la République et mises en chantier par le gouvernement. Pour ce pôle politique, la révision de la Constitution doit se faire en tenant compte surtout de la nécessité pour le Mali de se mettre en phase avec ses engagements nationaux et sous régionaux. Le programme de ‘’Décentralisation poussée’’ ainsi que la ‘’mise en œuvre de l’Accord issu du processus d’Alger’’ entrent dans ce cadre de dialogue que prônent la majorité présidentielle et la plateforme politique ‘’Ensemble Pour le Mali’’ (EPM). Par contre du côté de l’opposition politique dont les deux principales composantes sont le ‘’Front pour la Sauvegarde de la Démocratie’’ (FSD) et la ‘’ Coalition des Forces Patriotiques’’ (COFOP), on a une toute autre vision du dialogue à entreprendre et à l’issue duquel sortiront les modifications à apporter à la Loi Fondamentale. Nul n’est dupe que, dans la conception de l’opposition on en appelle plutôt, soit à un ‘’dialogue national’’ ou alors un ‘’dialogue refondateur’’, les deux formes ayant la même finalité. En effet, dans la vision du courant de l’opposition politique, le dialogue en question doit non seulement et nécessairement aboutir à une révision constitutionnelle avec à la clé une réduction draconienne des pouvoirs du Président de la République, mais aussi il doit être l’occasion de débattre de tous les problèmes qui assaillent le Mali en ce moment et au nombre desquels on peut citer pêle-mêle, le péril terroriste, la persistance de l’insécurité dans les localités du centre et du nord, les conflits intercommunautaires, les grèves tous azimuts, la cherté de la vie, le chômage endémique des jeunes, terreau d’une migration sauvage, etc… A y disserter, il apparait clairement que les deux pôles politiques, à savoir la majorité présidentielle et l’opposition, ne sont pas du tout au même diapason en ce qui concernera la forme et le contenu du dialogue prôné par chacun des deux. Si dans la formule prônée par la majorité présidentielle, à savoir la circonscription des débats, lors du cadre de concertation national aux seules reformes administratives et institutionnelles, on peut penser qu’au maximum un mois suffirait. Par contre dans la formule envisagée par l’opposition, les débats nécessiteront beaucoup plus de temps, au risque de faire basculer le pays dans un vide constitutionnel à partir du 30 juin prochain. Rappelons que la Vème législature qui devait prendre fin le 31 décembre 2018, a été prorogée par la Cour Constitutionnelle, au moyen d’une loi organique, jusqu’au 30 juin 2019. C’est donc dire la révision constitutionnelle, qui portera en elle l’essence des réformes, quelles que soient leurs natures, est tout simplement imparable avant le 30 juin 2018, à défaut de quoi, le pays se retrouverait dans un vide constitutionnel qui pourrait conduire à une ‘’nouvelle transition’’. D’ailleurs, au regard du train de la décrispation politique entreprise par nos autorités, le citoyen ‘’lambda’’ malien est plus porté à redouter ce scénario plus que probable et qui, si on n’y prend pas garde, pourrait bien conduire à cette nouvelle transition pour la mise en place du nouveau dispositif institutionnel, notamment l’Assemblée Nationale dont le mandat a déjà été prorogé une première fois au moyen d’une loi organique. A bien disserter, on serait tout simplement fondé à dire que, malgré la bonne foi dont font montre le Président de la République et le chef de file de l’opposition pour parvenir à une résolution de la crise politique, nous ne sommes pas encore au bout de nos peines car le chemin est encore rocailleux.

Flani Sora

Source: Notre Voie

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