Au regard de ce qui se passe dans le monde, où la solution miracle pour enrayer l’expansion rapide de la maladie, semble être un confinement général, le Mali, par doses homéopathiques, s’apprête à restreindre au maximum les déplacements des populations de l’extérieur vers l’intérieur et surtout des populations à l’intérieur du pays. Une série de mesures ont été prises, d’abord lors d’un conseil de ministres et ensuite lors de la session extraordinaire du Conseil Supérieur de la Défense Nationale. Ces mesures, bien à propos dans l’ensemble, si l’on considère la nécessité de réactivité et d’anticipation, semblent cependant manquer de vision d’ensemble.
Le Premier ministre et plusieurs membres du Gouvernement sont montés au créneau pour défendre ces mesures et en préciser la portée. Seulement, il faut se rendre à l’évidence que dans cette lutte contre le Covid19, le Mali protège avant tout la capitale Bamako. Le gros des mesures concernent une restriction du style de vie des bamakois. L’aéroport international de Bamako-Senou est principalement surveillé depuis le mois de janvier, début de la pandémie en Chine.
Les 4 laboratoires spécialisés du Mali sont tous à Bamako, les premiers centres d’accueil pour la quarantaine des suspects sont à Bamako, les restrictions de rassemblement sont connotées pour Bamako, sans prendre en compte les réalités de vie dans nos contrées. Les foires et les marchés hebdomadaires des villages hors de la périphérie Bamakoise ne sont pas cités dans les mesures, les frontières restent ouvertes malgré que le Mali est cerné de toute part. Et, à ce niveau, aucun effort n’est fait pour rassurer sur la gestion des frontières septentrionales de notre pays (Algérie, Niger et par extension Mauritanie, Sénégal).
Le dispositif sanitaire s’inspirera de celui mis en place pendant Ebola, sauf que la seule véritable porte d’entrée de cette autre épidémie était la Guinée. Ce nombrilisme puéril, qui se reflète dans beaucoup de décisions et de faits politiques de notre pays, interpelle sur la Gouvernance décentralisée encore.
Au-delà des autorités, les populations elles-mêmes font preuve d’un centrisme béat et insultant pour le million de Km² de notre État. Air coronavirus du sobriquet donné à l’avion de Air France et d’autres compagnies, qui se sont vues octroyer une dérogation de 24h pour le transport des derniers passagers désirant venir ou quitter le Mali, est un exemple de cette guerre des intérêts propres au détriment du collectif.
Les religieux, privilégiés dans les mesures drastiques, n’ont d’yeux que pour leurs paroisses et n’entendent pas, si facilement, concéder l’arrêt des prières collectives parce que le Gouvernement ne peut interdire une prescription divine. Les politiques, iront aux élections législatives, en pensant d’abord à leurs intérêts propres avant la santé de tous. Idem pour les acteurs culturels, qui en ces moments inquiétants, certes difficiles pour leur métier, ont d’abord brandi la revendication du dédommagement financier pour les opérateurs culturels de Bamako (oubliant sans doute ceux du pays profond) avant de montrer leur implication dans la sensibilisation.
Face à une pandémie qui ne fait pas de quartier, qui incite des Gouvernements à déployer l’armée pour faire respecter les mesures de confinement, il est plus que jamais nécessaire d’arrêter de protéger les 2-3 millions de Bamako en oubliant les 16 autres millions de Maliens répartis sur l’ensemble du territoire.
Y.K
Source: Bamakonews