En Afrique du Sud, touchée par les délestages depuis le 5 décembre, l’électricité est coupée quatre heures par jour. Des coupures de plus en plus fréquentes qui représentent une perte substantielle pour l’économie. Pour les justifier, le géant de l’électricité Eskom accuse les fortes pluies qui se sont abattues sur le pays ces derniers jours.
Les précipitations s’abattent sur l’Afrique du Sud depuis une semaine et en particulier sur la province du Mpumalanga, le cœur de l’industrie sud-africaine du charbon, dans le nord-est du pays. D’après les explicaitons de la compagnie Eskom, les faibles performances de ses centrales sont dues à ces pluies et plus précisément en raison du charbon détrempé. Selon le géant de l’électricité, le charbon, une fois humide, ne produit pas la même quantité d’énergie dans les fours de ses centrales, vétustes pour la plupart.
Pour beaucoup d’experts, l’explication est un peu légère et même mensongère pour d’autres, qui suspectent Eskom de mentir. Le problème serait en fait dû à de trop faibles réserves de charbon tout simplement. L’ancien PDG de l’entreprise a aussi réagi. « Ces délestages sont désastreux pour l’économie », a-t-il déclaré. Le pays a été plongé dans le noir pendant plus de 300 heures cumulées cette année.
Dépendance du pays à Eskom
Il s’agit de l’une des principales causes du recul de 3,2 % de la croissance au premier trimestre. L’Afrique du Sud est prise au piège car dépendante à 95 % d’Eskom pour son énergie. Ce qui représente une menace immense sur son économie, étant donné la dette abyssale de l’entreprise. L’agence de notation Moody’s a d’ailleurs récemment abaissé sa perspective pour le pays de stable à négative, en grande partie à cause d’Eskom.
« La direction d’Eskom est clairement incompétente, et ils cherchent n’importe quelle excuse pour expliquer les coupures de courant, analyse Jeannie Rossouw professeur d’économie à l’université du Witwatersrand. Ils parlent des réserves de charbon qui seraient trop humides, ou des problèmes de maintenance, mais mon sentiment, c’est que cette compagnie est rongée par la corruption. Il y a des contrats douteux, où Eskom surpaie ses fournisseurs, et les résultats, c’est que les coûts s’envolent. Sauf que si les délestages continuent, l’économie sud-africaine va clairement en subir les conséquences au quatrième trimestre. Et après une croissance négative au troisième trimestre, on peut s’attendre à une entrée en récession technique. »
Pour Jeanne Rossouw, il faudrait que la compagnie soit entièrement restructurée. « Eskom est en position de monopole, et c’est une compagnie qui se trouve dans une situation économique totalement désespérée. Il faudrait une restructuration complète et des mécanismes de contrôle interne, avant même d’envisager une privatisation. Par contre, le gouvernement ne laissera jamais Eskom faire faillite, car ce serait une catastrophe totale pour l’économie. Donc ils vont juste continuer à renflouer la compagnie avec l’argent de nos impôts. »
RFI