C’est simplement une légitime colère que le président nigérien, Mahamadou Issouffou, dise que ‘’le statut de Kidal menace la sécurité intérieure du Niger’’. C’est un corollaire, un postulat, une vérité inébranlable.
En effet, ce que beaucoup ignore du président Issouffou, c’est qu’il ne parle pas dans le vide. Il a les preuves que certaines traquenards et attaques multiples pour nuire au Niger, ont été préparés à Kidal. Donc, il y a des complicités. Et le Chef de l’État Nigérien a eu le courage de l’affirmer à haute et intelligible voix. Mieux, il suggère la révision du statut de Kidal.
« Un sanctuaire pour les terroristes », c’est ainsi que Mahamadou Issoufou, le président du Niger, a qualifié Kidal au Nord du Mali. Certains ont trouvé ce propos très tranchant. Et bien, c’est une qualité qu’il faut reconnaître chez le Chef de l’État Nigérien.
Ce qui intrigue le président Issoufou, c’est qu’il y a des mouvements signataires de l’Accord d’Alger qui ont une position ambiguë. Pire, certains mouvements sont de connivences avec les terroristes. Pour Issoufou il y a un choix à faire : ou on est dans les accords de paix ou on est avec les terroristes.
Depuis quelques jours, certains malins oiseaux ne finissent pas d’épiloguer sur les affirmations du Président Issoufou Mahamadou. Les rumeurs se propagent et des personnes peu averties et qui n’ont aucune connaissance encore moins une expertise de la situation sécuritaire du Sahel ramènent le problème du terrorisme à une analyse très simpliste.
Pour certains, il ne faut rien dire et garder le silence. Pour d’autres, il suffit d’avoir quelques canons et en finir avec le terrorisme. Certaines critiques activent des personnes qui de la guerre asymétrique ne connaissent absolument rien, s’érigent en experts. C’est là, une compréhension naïve de ce qui se passe au Sahel. Un raisonnement qui ne prend nullement en compte ce qui se passe dans la zone sahélo-saharienne.
Le danger est aux portes du Niger
C’est pour circonscrire le mal que le président nigérien, Mahamadou Issoufou a dû parler. Une manière pour lui de rappeler que ‘’quand la case de ton voisin brûle, il faut asperger d’eau, la tienne’’. Tels sont les motivations objectives qui ont poussé le président du Niger à parler de Kidal. Hormis cette raison fondamentale, beaucoup de choses rapprochent le Niger du Mali. Notamment, l’histoire, la géographie et la culture. Autant de motifs valables pour le président du Niger de parler de terrorisme au Mali, singulièrement du statut de Kidal. Aussi, le président Issoufou du Niger est le président de la conférence des Chefs d’État de la CEDEAO. Cependant, le fait de rester inactif, face à la situation, serait une manière pour lui de fuir ses responsabilités.
Pour le n°1 nigérien, le statut actuel de Kidal est une menace pour son pays et il sied que l’État malien reprenne impérativement ses droits. Un véritable coup de gueule s’il en est. La colère du président nigérien est d’autant plus légitime que son pays est en proie à des attaques terroristes liées en partie au statut de Kidal. Cela dit, c’est un courage qu’il faut saluer à sa juste valeur, car le dirigeant nigérien a osé dire tout haut ce que d’aucuns pensent tout bas.
En effet, la lutte contre le terrorisme au Sahel ne saurait être gagnée sans la neutralisation de tous les « sanctuaires des terroristes » tels Kidal et le désert libyen. L’on se rappelle que la question libyenne avait été soulevée par le président en exercice du G5 Sahel, lors du dernier sommet des chefs d’État du G5, tenu à Ouagadougou, capitale du pays des Hommes intègres et récemment au sommet du G7 à Biarritz en France. C’est dire si la capacité de nuisance des groupes terroristes qui écument la bande désertique africaine reste très préoccupante. Sur la question du nord Mali, le président Issoufou est resté constant. Son combat est de parvenir à ce que les pays du Sahel soient débarrassés de toutes ces organisations terroristes et criminelles dont l’objectif reste tout simplement de semer la mort, la haine et la désolation. Quand le chef de l’État soutient que certains terroristes qui attaquent le Niger, se replient dans la région de Kidal, il assène des vérités qui ne devraient pas faire rougir les yeux, mais doivent plutôt interpeller. Car, cette situation cause non seulement des torts aux populations de Kidal, à celles du Mali dans son ensemble, mais aussi à d’autres pays comme le Burkina où les attaques terroristes sont récurrentes. Du reste, il faut saluer la décision des présidents burkinabè et nigérien de créer un comité transfrontalier de sécurité contre le terrorisme.
Ces remous politiques ne sont pas en défaveur des groupes armés
L’initiative est noble, surtout que les deux présidents ont exprimé leur ferme volonté d’éradiquer le terrorisme en s’appuyant sur les mécanismes bilatéraux et multilatéraux en préconisant tous deux une approche sous-régionale et régionale, soutenue par des échanges de renseignements et une mutualisation de leurs moyens. S’il est vrai que l’intervention du président nigérien est adressée au Mali, il n’en demeure pas moins pour la France et pour d’autres groupes armés dont les intentions sont de saper les accords d’Alger de 2015 pour lesquels, la communauté internationale et les belligérants ont consenti d’énormes sacrifices. Soulignons que c’est au moment où les chefs d’État malien et nigérien se sont rencontrés pour créer un comité transfrontalier contre le terrorisme, que l’Imam Mahmoud Dicko, ancien président du Haut conseil islamique malien et éminente figure religieuse au Mali, a procédé, le samedi 7 septembre dernier, à Bamako, au lancement d’un mouvement politico-religieux qui a pour nom la Coordination des mouvements, associations et sympathisants (CMAS). Est-ce une coïncidence ? Une action de sape de l’accord de paix de Bamako quand on sait que cette annonce a été accompagnée de sévères critiques à l’égard de la gouvernance d’IBK. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces remous politiques ne sont pas en défaveur des groupes armés. Rappelons également que la rencontre des deux présidents a été tenue au moment où les chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO doivent se réunir le 14 septembre prochain à Ouagadougou, pour un sommet extraordinaire sur « le terrorisme au Sahel et dans le bassin du Lac Tchad». Une rencontre censée offrir l’occasion aux dirigeants de la sous-région et aux partenaires, de réfléchir sur les réponses décisives à apporter à ce fléau. C’est également une rencontre à l’issue de laquelle les deux homologues malien et nigérien s’attendent à voir des mesures nouvelles favorisant la coopération renforcée dans la lutte contre le terrorisme. Ils souhaitent que ce sommet soit un déclic pour un soutien plus accru de la communauté internationale, aux États de la région dans cette lutte. Ce sommet extraordinaire de la CEDEAO sur la question du terrorisme au Sahel et dans le bassin du Lac Tchad, débouchera-t-il sur des mesures importantes ? On attend de voir.
Cyrille Coulibaly
Source: Le Nouveau Réveil