Pour certains, cela découle de plusieurs facteurs notamment l’angoisse, les problèmes relationnels, les traumatismes du passé. Des spécialistes de la santé estiment que ce phénomène pourrait avoir des conséquences néfastes sur la santé humaine.
Reportage
« C’est à cause d’une enfance très difficile, que j’ai commencé à me droguer. L’effet de la drogue m’aidait à atténuer la faim. En plus, mes amis me disaient que c’est bon ». Ceci est le témoignage d’un jeune de 16 ans. Son camarade d’âge à côté de lui renchérit : « la drogue, donne de l’énergie, l’inspiration. Et puis tu n’as pas les mêmes pensées que les autres ». Cet autre jeune homme que l’on va nommer Moussa, met en avant le chômage pour expliquer son addiction à la drogue. « le gouvernement ne nous considère pas. On n’a pas de travail. C’est difficile d’abandonner la consommation des stupéfiants. Ils aident à oublier les problèmes », soutient-il. Il rajoute que « quand tu consommes de la drogue, tu n’as peur de rien ». Cet autre jeune garçon pointe du doigt la responsabilité des parents pour expliquer sa consommation de crack. « Mes parents n’ont plus le temps pour moi. Mon père sort les matins et c’est tard dans la nuit qu’il rentre. Il ne peut pas me contrôler. De ce fait, je fais ce que je veux comme boire de l’alcool et plein d’autres choses ». Il précise qu’aujourd’hui « beaucoup de jeunes filles sont comme eux ».
Ces différents témoignages viennent des jeunes rencontrés à Bamako. Ils prouvent à suffisance l’ampleur de la consommation de la drogue au Mali. A en croire leurs propos, certains décident de prendre les stupéfiants pour se détendre, vivre une expérience commune avec des amis, avoir du plaisir ou apprécier une occasion spéciale. D’autres rejettent la faute sur leur famille. Mais, des parents estiment que « tout enfant est l’image de sa famille ». Pourtant, ces derniers rejettent également la faute sur les réseaux sociaux qui compliquent pour eux l’éducation des enfants.
Pour ce chef de famille rencontré à Koutiala, « on ne peut rien contre la consommation des stupéfiants. Les enfants regardent toujours des feuilletons. Dans ces films, très souvent il n’y a pas un côté positif à instruire ». Pour cet autre chef de famille de Bafoulabé, la sensibilisation est un remède pour venir à bout du phénomène. Il affirme que « l’on peut être jeune sans pourtant être dans ces genres d’attitudes. Et surtout savoir qu’on peut réussir sans passer par la consommation de drogues ».
« Bien surveiller son enfant au niveau des grins, à l’école peut préserver un enfant de la consommation de crack », nous dit ce père de famille qui habite à Bamako. Selon lui, « nous assistons maintenant à beaucoup de produits stupéfiants en poudre, sous forme de médicament et en injectable et cela même dans les villages ».
La communication contre l’addiction
Selon le sociologue Mamadou Guissé, « dans certains milieux, les gens pensent que, tu ne peux pas être apprécié, cultivé sans prendre les stupéfiants ». Il précise également que la drogue « est un marché très rentable ». Le sociologue Guissé estime que, pour certains « la consommation des stupéfiants donne du dynamisme dans l’accomplissement de certaines activités ». Pour lui, à cela s’ajoute « l’aspect environnemental, des personnes sont influencées par d’autres ». Les conséquences sont pluridimensionnelles selon le sociologue. Il s’agit entre autres de « l’agression physique dans les foyers, des comportements bizarres entres des gens, les accidents de circulation ». Pour y remédier, Mamadou Guissé préconise « une réconscientisation de la jeunesse en plus de l’implication des autorités administratives, politiques, coutumières et religieuses ».
De son côté, Dr Amadou Maïga, psychologue préconise une étude pour déterminer les causes. Selon lui, la communication entre parents et enfants doit être privilégier pour freiner le phénomène. Pour Dr Amadou Maïga, « une des premières conduites, c’est de contacter un centre d’éducation et de rééducation ». Il alerte cependant que, « ce ne sont pas les punitions qui vont résoudre le problème mais c’est la compréhension ».
Attention, sur le plan sanitaire, la consommation des substances illicites a des conséquences. Il y’ a d’abord « les réactions psychotiques aigues. Ce sont des situations de troubles qui disparaissent entre 24 et 48 heures. A cela s’ajoute, la pharmacopsychose. C’est à dire les substances provoquent des troubles qui vont continuer à évoluer », précise Dr Mahamadou Koné psychiatre praticien au CHU du Point G. Le psychiatre prévient également sur les complications organiques qui interviennent chez les personnes qui consomment la drogue. On peut citer l’overdose, la pneumopathie et bien d’autres maladies.
L’addiction est guérissable
La prise en charge est pluridisciplinaire. Selon Dr Koné « la désintoxication commence par un entretien motivationnel. Cet entretien s’impose quand le patient commence le traitement ». Cet échange consiste à expliquer au patient le traitement et avoir son adhésion pour le faire. Le psychiatre explique que « cela peut se faire à la maison, en ambulatoire ou même dans un milieu hospitalisé ». Cette phase peut prendre quelques semaines et ensuite suivra le long travail d’accompagnement vers la récupération.