Une nouvelle réforme de loi était en débat dans l’Assemblée nigériane le vendredi 4 mai 2018. Faudrait-il l’appeler le nouveau code de la famille ? Je n’en sais rien, mais il s’agit du congé de paternité. Cette question a opposé les parlementaires durant des longues heures de travail. C’est quand même regrettable ! En Afrique, on a l’impression que les priorités échappent à nos politiques publiques.
Deux semaines de repos aux hommes mariés dont les femmes auront accouché. Voilà le débat parlementaire du vendredi 4 mai 2018 au Nigeria. À l’instar des femmes, les hommes demandent un congé de paternité. Ils sont nombreux, les députés, à montrer leur opposition à cette nouvelle réforme qu’on veut instituer dans leur pays.
Notons que cette réforme, à y regarder dans un certain angle, répond à un souci de renforcement de l’égalité tant chantée entre l’homme et la femme. Si jadis l’éducation de l’enfant était entièrement à la charge de la maman, aujourd’hui, avec les mouvements émancipateurs, nous avons une volonté d’implication des hommes à la prise en charge du foyer. C’est dans ce cadre que Joe Okei, président de l’association Women arise, explique : « Si un enfant voit son père et sa mère responsables de son éducation, il aura deux modèles », or, « si le père ne vient même pas aider la mère à élever son bébé, ce petit va grandir, devenir un adulte, qui ne pense pas que les hommes doivent s’occuper de leurs enfants ». Il poursuit en ajoutant : « ça ferait avancer l’égalité si les hommes réalisaient que les congés de paternité sont nécessaires : élever ses fils et ses filles, c’est important. Si on veut avancer politiquement et économiquement, les hommes doivent s’impliquer dans l’éducation de leurs enfants ».
Cette demande de congé de paternité parait paradoxale si nous savons que les hommes constituent les plus grands travailleurs dans cette contrée comme pratiquement dans tous les pays africains. Le poids des traditions fait des femmes des prisonnières, des domestiques n’ayant d’autres fonctions que s’occuper du foyer, faire des enfants etc. Dans un tel pays, s’il faut que les hommes observent deux semaines de congé de paternité, des administrations risquent de se voir fermer faute de personnels. Car certains travailleurs ont plus de deux femmes. Les femmes de plusieurs travailleurs peuvent accoucher à la même période. Alors, faut-il que tous ceux-ci observent un congé de paternité ? Henry Archibong, député au parlement nigérian, estime que le Nigéria n’est pas en mesure de faire recourt à une telle réforme. « Si vous décidez de donner deux semaines de congé de paternité, imaginez le nombre d’hommes qui cumuleront leurs congés, et imaginez le nombre d’heures de travail perdues! Vous voyez la perte économique pour ce pays », a-t-il expliqué.
- Henry Archibong s’étonne d’ailleurs de voir qu’à travers cette volonté réformiste les gens comparent le « Nigéria à la Finlande, l’Allemagne, les États-Unis etc. » Or, selon lui, « dans ces pays, les services de base sont déjà là : une maison décente, un bon accès aux soins », mais au Nigéria, « les gens doivent aller travailler pour subvenir aux besoins de leur famille ». Ces propos sont tout à fait rationnels. Il évoque le plus grand défaut de la plupart des pays africains, à savoir vouloir se ressembler aux pays les plus développés.
Il est temps que le Nigéria ainsi que les autres pays africains comprennent que les réalités changent en fonction de chaque contrée. La transposition de certaines valeurs peut engendrer des problèmes de développement comme nous le constatons d’ores et déjà dans plusieurs pays. L’adoption de cette loi peut également coûter cher au Nigéria.
Aux dires de ce député, adopter cette loi, c’est aller à l’encontre des considérations divines : « Dieu est clair sur ce que doit faire l’homme et ce que doit faire la femme. C’est la femme qui endure la grossesse, pendant 9 mois. C’est la femme qui endure les douleurs de l’accouchement, pendant des heures. Donc les femmes ont besoin de repos. Mais les hommes, eux, doivent pourvoir aux besoins de leurs femmes, ils n’ont pas besoin de se reposer à la maison ».
Il faudrait noter que les autorités nigérianes ne songent probablement pas aux priorités et en conséquence, elles deviennent les fossoyeuses de la perte du pays. À prendre le monde tel qu’il est en général aujourd’hui, nous nous rendons compte d’une explosion exponentielle de la population masculine contre une diminution de celle féminine comme le dénotent les statistiques de Worldmeters (www.worldmeters.info/fr/population-mondiale/), site de statistique de la population mondiale.
Sur ce site, il est mentionné qu’en 2013 le nombre d’hommes s’élevait à 50,4% contre 49,6% pour les femmes. Pour le cas précis du Nigéria, il est noté sur le même site que la population masculine atteint 50,9% contre 49,1% pour les femmes. L’écart est alors minime. À ce titre, le combat doit être plutôt de limiter la durée du congé de maternité. Car non seulement le Nigéria et toute l’Afrique ont besoin de tous ces bras valides pour relever le défi, mais aussi c’est une condition sine qua non pour la réalisation du rêve des femmes et de tout le monde féministe, à savoir l’égalité. Au lieu de demander un congé de paternité, il vaut mieux se battre pour la réduction de la durée du congé de maternité.
Comme disait Bernard B. Dadié « Le travail, et après le travail l’indépendance mon enfant. N’être à la charge de personne, telle doit être la devise de votre génération… » C’est pour dire que dans ces pays en voie de développement comme le Nigéria, l’on a besoin de peu de repos et de plusieurs heures de travail pour relancer l’économie du pays et assurer ainsi son développement. Le repos, c’est justement après le travail. L’exemple de la révolution chinoise est patent. Cette révolution conduite par Mao Tsé Toung entre 1934 et 1935 avait rabaissé les économies voire toutes les richesses de la nation. Pour les relancer, les Chinois travaillaient 24/24 sans repos, ni congé ou quoi que ce soit. Aujourd’hui, la Chine peut se reposer, mais elle continue à se battre.
Avec 173 615 345 habitants en 2013 selon Worldmeters, le Nigéria constitue le pays le plus peuplé voire la première puissance économique du continent africain. À ce titre, cette nouvelle réforme que des députés cherchent à instaurer n’est qu’un encouragement au parasitisme administratif ainsi qu’à la paresse et n’arrange nullement le pays.
Fousseni TOGOLA
Source: Le Pays