Avez-vous vraiment lu le projet de « Traité de paix » que vient de produire par les groupes armés du nord ? Je voudrais reprendre, avec vous, la lecture et évoquer les implications du texte.
Parlons tout d’abord de la forme du texte. Sous le vocable « Coordination des Mouvements de l’Azawad », promotrice du projet de Traité, se cache le MNLA, diplômé de séparatisme et agrégé de propagande.
Quant à l’expression « Traité de Paix », c’est plutôt une mauvaise blague car, en réalité, nous avons affaire à un « Traité de Guerre » en bonne et due forme. Retenez votre souffle et lisez ça: « Le Traité consigne scientifiquement le règlement concerté, juste et durable du conflit opposant l’Azawad au Mali depuis 1960″. Pour la première fois de ma vie, j’entends parler de « règlement scientifique » d’un conflit: doit-on en déduire que le conflit azawado-malien sera résolu par les sciences biologiques, mathématiques ou nucléaires ? Enfin, il faut avoir étudié le droit dans un marigot pour penser que ce Traité s’accommode de la Constitution du Mali et de la Résolution 2100 du Conseil de Sécurité de l’ONU qui proclament, toutes, la souveraineté et l’intégrité territoriale du Mali. Voilà pour les remarques de forme. Venons-en au fond.
Le texte commence par constater « la faible application, voire la non application des précédents accords: Accord de Tamanrasset de 1991, Pacte national de 1992, Accord d’Alger de 2006, Accord de Ouagadougou de 2013, Accord de cessez-le-feu de Kidal de 2014″. Cette technique est vieille comme l’Arche de Noé: faire avouer au Mali ses prétendues fautes pour justifier la passation d’un nouvel accord qui lui met la corde au cou et le conduire à l’abattoir de l’Azawad. Question: qui a violé les premiers accords, sinon les rebelles qui, en 2012, ont déserté l’armée puis envahi le pays ? Tant qu’à passer aux aveux, pourquoi le projet ne dit-il mot des pillages, vols, viols et amputations commis sous la période d’occupation du nord par les rebelles ?
Le Traité définit le mot « Azawad » comme un territoire compris dans les limites territoriales des régions de Tombouctou, Gao, Kidal, Taoudéni, Ménaka et les arrondissements de Boni et Hombori. Ah bon ? Kidal ne leur suffisant plus, les bandits armés veulent aussi des bras du fleuve Niger, ce qui les amène à étendre leur cher Azawad aux régions de Gao et de Tombouctou. Ainsi amputé de 900.000 km2, il ne restera au malheureux Mali que 342.000 km2 pour planter des choux et élever des poules.Et si, alors, les Maliens n’adoptent pas vite la politique de l’enfant unique en vigueur en Chine, il y aura des familles qui vivront dans les arbres, faute de place !
Le territoire de l’Azawad est reconnu par l’Etat du Mali comme un Etat fédéré formant avec lui la FEDERATION DU MALI. Ainsi donc, dans leur immense miséricorde, les bandits azawadiens acceptent que la future fédération porte le nom du Mali. De quoi mettre un méchoui au four, hein ?
Le Traité érige en « garants » de son application l’ONU, la CEDEAO, l’UA, l’OCI, l’Algérie, la Mauritanie, le Burkina, leNiger et le Tchad. Pour que les bandits azawadiens prévoient si facilement la garantie de tout ce beau monde, ils doivent êtres sûrs de leurs soutiens internationaux, n’est-ce pas ?
Dans les 60 jours qui suivent la signature du Traité, un Conseil territorial transitoire de l’Azawad sera mis en place et exercera la puissance publique sur le territoire fédéré jusqu’à l’installation de l’Exécutif et du Parlement de l’Etat de l’Azawad. Qui nommera ce « Conseil »: Ladji Bourama, feu Ben Laden ou Iyad Ag Ghali ? Et qui siégera dans cet organisme: des Touaregs, des Arabes, des Peulhs ou des Sénoufos ? De quoi vivra le Conseil: des impôts du sud malien ?
2 mois après sa mise en place, le Conseil territorial Transitoire, en concertation avec le Gouvernement malien et l’ONU, installera une assemblée constituante pour élaborer la Constitution de l’Azawad. L’Azawad ne reconnaît donc pas la Constitution du Mali. Et il a tort. Cette Constitution a la vie dure: le « Vieux Commando », qui projetait de la reformer, fut contraint à la fuite; le putschiste Sanogo a dû la rétablir après l’avoir dissoute; son interprétation a conduit à la bastonnade d’un vieil homme au foulard blanc.
L’Etat fédéré de l’Azawad s’administre librement à travers un gouvernement dirigé par un président élu au suffrage indirect par les assemblées régionales de l’Azawad. Pourquoi le président azawadien serait-il élu au « suffrage indirect » et non direct ? Pour la bonne raison que les « assemblées régionales » devront désigner, le couteau sous la gorge, un seigneur de guerre à la tête de l’Azawad! De fait, comment un cultivateur bambara de Gao se ferait-il élire et gouvernerait-il un territoire sillonné de jihadistes, de séparatistes et de narco-trafiquants ? Parler d’élections dans l’Azawad, c’est user de la poudre de perlimpinpin pour faire croire à un semblant de démocratie !
Le président engage directement l’Etat de l’Azawad par rapport aux partenaires techniques et financiers et conduit la politique de développement économique, culturelle, environnementale, sécuritaire. En clair, l’Azawad traitera directement avec le FMI, la Banque Mondiale, le Qatar et consorts avec, à la clé, des contrats de gré à gré pour l’achat d’un Boeing 737 azawadien.
Un Parlement sera chargé de voter les lois qui seront appliquées sur Ie territoire de l’Etat fédéré. En somme, l’Azawad se dotera de lois autonomes dans tous les domaines, y compris en matière de défense et de sécurité. Un colonel malien y aura, par conséquent, les mêmes pouvoirs qu’un berger.
Le pouvoir judiciaire sera exercé par les tribunaux que l’Etat fédéré créera. Dans l’Azawad, la justice sera probablement rendue en arabe et verbalement, la plupart des bandits armés ne sachant ni lire ni écrire. Vu l’esclavagisme local, le viol d’une femme de race noire sera puni d’une amende d’un demi-dinar azawadien. Quant à la Cour Suprême et à la Cour Constitutionnelle du Mali, leurs décisions n’auront, dans l’Azawad, que l’effet d’un bêlement de mouton.
Les responsables des structures relevant de l’Etat de l’Azawad sont nommés par le Chef de l’Exécutif de l’Azawad et ceux relevant de la Fédération par le chef de l’Etat fédéral sur proposition du chef de l’Exécutif de l’Etat de l’Azawad. L’Azawad aura donc à la fois le beurre, l’argent du beurre et, en prime, la laitère ! Nul n’exercera une responsabilité dans l’Azawad si ce n’est sur décret ou sur proposition du tout-puissant président local.
En vue des élections, un recensement exhaustif des ressortissants de l’Azawad de l’intérieur comme de l’extérieur sera réalisé sous la supervision et avec l’appui technique et financier de l’ONU, de la CEDEAO et de l’OCI. Ce sera là l’occasion pour tous ceux qui plastronnent journellement sur les plateaux de la chaîne « France 24″ de retourner enfin au bercail: les Ag Assarid, Ag Mossa, Ag Attaher et compagnie. Les agents recenseurs ne feront sûrement pas figurer sur les listes ceux que les bandits armés considèrent comme leurs esclaves, c’est-à-dire la majorité des populations du nord. Pour s’assurer une confortable majorité sur les listes, les bandits chasseront, entre-temps, de l’Azawad les « hasidis » sonrhaïs, dogons et bambaras qui ne partageraient pas leurs vues.
Sont admis à voter pour l’élection de l’Assemblée et du chef de l’exécutif de l’Azawad les personnes d’origine azawadienne, âgées d’au moins 18 ans inscrites sur les listes électorales. Les rares Noirs qui échapperont à la purge et qui parviendront à figurer sur les listes électorales en seront exclus sur décision des tribunaux azawadiens. Les arguments ne manqueront pas puisque les cartes d’identité maliennes qui reconnaissent 18 ans à un citoyen n’ont pas de validité dans l’Etat fédéré. Et puis, le mot « origine azawadienne » ne vous rappelle-t-elle pas un peu la notion d’ivoirité qui a servi à exclure Ouattara de différents scrutins ?
12 mois après la mise en place des institutions, l’exécutif soumet au parlement de l’Azawad un plan de redécoupage administratif du territoire. Le Mali n’ayant rien à dire sur le sujet, les bandits ravaleront au rang de villages à 1 député les zones qui leur sont hostiles alors que les zones qui leur sont favorables deviendront des régions dotées de 100 élus.
L’Etat de l’Azawad aura sous sa responsabilité exclusive les domaines ci-après: l’environnement, la culture, l’administration territoriale, la sécurité intérieure, le maintien de l’ordre, la protection civile, l’aménagement du territoire, le budget, la fiscalité, le développement social et économique, la protection sociale, l’éducation, la santé, le commerce, les transports, l’agriculture, l’élevage, les mines, la pêche, les industries, l’artisanat, le tourisme, le logement, l’aménagement urbain, l’eau et l’électricité, le réseau routier et l’équipement. Eh Allah! Que restera-t-il au Mali de Ladji Bourama ? Un chapelet, une bouilloire et une natte de prière ? Ou bien un livre de grec et de latin ?
Il sera créé une fonction publique de l’Azawad dont les agents seront originaires de l’Azawad. Encore la notion d’« origine », hein?
Le président de la Fédération du Mali sera secondé dans ses fonctions par le vice-président citoyen résident de l’Azawad ou vice-versa. Moussa Mara a eu tort d’aller taquiner les bandits dans leur fief de Kidal: voilà qu’ils proposent de le remplacer par un vice-président azawadien ! Ce vice-président, quoique adjoint direct de Ladji Bourama, se méfie tellement des Maliens et des bastonneurs de « Yerewolo Ton » qu’il aura sa résidence dans l’Azawad! Lors de ses déplacements, il aura droit, bien sûr, au Boeing de Ladji et à la fanfare! Le comble, c’est que l’Azawad n’exclut pas d’occuper le poste de président fédéral dans la mesure où le Traité utilise l’expression « vice-versa ».
Les départements des Affaires Etrangères, de la Défense, de la justice et des Finances seront équitablement reparties entre les deux Entités fédérées. Je parie que l’Azawad aura les Finances pour mieux orienter nos impôts vers Kidal et les Affaires Etrangères pour mieux vilipender Ladji Bourama à l’étranger. Quant à la Défense, l’Azawad n’en a nul besoin, ayant déjà le droit d’« administrer librement » la défense et de la sécurité en vertu d’un article du Traité.
Le Gouvernement et le Parlement de l’Etat fédéral seront composés pour au moins un tiers de citoyens de l’Azawad.Bon ! Les Azawadiens gardent 100% des postes de l’Azawad tout en s’adjugeant, à titre de dessert, 30% des ministères maliens.
Les forces armées et de sécurité de l’Azawad sont constituées de combattants des mouvements de l’Azawad et ou de ressortissants de l’Azawad. Quiconque s’appelle Bourama, Ladji, Moussa ou Amadou est récalé d’office! Il n’y aura dans l’armée azawadienne que des Ag, des Ould et quelques Maiga!
Les forces armées et de sécurité de l’Azawad sont placées sous la responsabilité du chef d’état-major de l’Azawad relevant au plan hiérarchique du chef d’état-major fédéral. Jouant à l’attrape-nigauds, le Traité rattache le chef d’état-major de l’Azawad à l’autorité « hiérarchique » du chef d’état-major fédéral mais en réalité, cette autorité est vidée de tout contenu par le fait que les forces armées et de sécurité de l’Azawad sont uniquement composées de Ag et de Ould…
Le chef d’état-major de l’Azawad est nommé par le chef de l’Etat fédéral sur proposition du Chef de l’Exécutif de l’Azawad après consultation du Chef d’Etat-major fédéral. Le futur président fédéral Ladji Bourama, qui déteste pourtant qu’on le « trimbale » va devoir se laisser trimbaler un tout petit peu: pour nommer le chef d’état-major de l’Azawad, il prendra un décret dicté en langue tamackek ou arabe par l’éminent président azawadien.
Il sera institué des corps spécialisés de sécurité intérieure de l’Azawad dont la nature, les missions et les effectifs sont fixés par les organes élus de l’Azawad en concertation avec l’Etat fédéral. Ces corps sont constitués des combattants des mouvements de l’Azawad et ou de ressortissant de l’Azawad. Ces « corps de sécurité » seront assurément chargés de vider le territoire de l’Azawad des citoyens noirs et d’interdire l’accès de l’Azawad à tout Malien dépourvu de visa.
L’exécutif fédéré définit et perçoit les recettes fiscales, douanières et foncières collectées sur le territoire de l’Azawad qui sont versées intégralement au trésor de l’Azawad. L’Azawad mangera tout seul son gâteau alors que nous devrons, nous autres Maliens, assurer le gîte et le couvert aux 30% de ministres azawadiens placés d’office dans le gouvernement fédéral!
L’Etat de l’Azawad autorise les recherches minières, négocie et signe les permis de recherches ainsi que les contrats d’exploitation sur toutes les ressources minières et pétrolières sur le territoire de l’Azawad.Les ressources générées dans le cadre de l’extraction minière et pétrolière sur le territoire de l’Azawad sont réparties à raison de 75% pour l’Azawad et 25% pour l’Etat fédéral. Comme le Mali a l’habitude de mendier son pain, les 25% d’aumône minière azawadienne s’annoncent tout à fait généreux!
L’Azawad dispose du pouvoir discrétionnaire d’établir ses propres politiques de coopération environnementale, culturelle, sécuritaire, économique, industrielle, touristique, commerciale, sociale, financière, avec tout autre Etat ou organisation internationale. Le ministres fédéraux (maliens) des Affaires étrangères, du Commerce, de la Sécurité, du Tourisme, de l’Industrie, de l’Economie et de l’Environnement seront donc payés pour contempler les murs jour et nuit!
L’Etat de l’Azawad dispose dispose de Délégations propres auprès d’Etats, institutions ou organisations internationales dans de toutes les chancelleries du Mali, représentants directement les intérêts politiques, sécuritaires, économiques, sociaux, culturels et environnementaux de l’Azawad. L’Azawad établira des Délégations dans tout Etat où il n’y a pas de chancellerie malienne. L’Azawad a donc sa propre diplomatie et un co-ambassadeur qui traitera librement de ses « intérêts » à l’étranger.
L’Etat de l’Azawad perçoit directement toute aide budgétaire octroyée dans le cadre de la coopération bilatérale ou multilatérale. Cette « perception directe » vise à éviter que le Mali profite des fonds des amis de l’Azawad: Qatar, Suisse, Belgique…
L’Etat fédéral autorise des représentants de l’Azawad à se joindre, en tant que membres, aux délégations diplomatiques que l’Etat fédéral envoie à des réunions internationales sur des questions qui présentent un intérêt direct pour l’Azawad. Ladji Bourama et ses ministres ont désormais interdiction de quitter le territoire fédéral sans prendre, dans leurs valises, des bandits enturbannés gardiens des intérêts supérieurs de l’Azawad! Lesdits bandits ne quitteront l’avion présidentiel que quand Ladji Bourama voudra s’entretenir en privé avec son viel ami, le Chérif de Nioro!
Le droit de défendre l’intégrité territoriale de la fédération ne saurait être invoqué pour empêcher, réprimer ou entraver l’exercice pacifique du droit au débat, à l’expression d’opinions, à la dénonciation d’actes de violations massives des droits de peuples autochtones, de marginalisation, d’exclusion et de discrimination de personnes ou de groupes communautaires. Traduction: l’Etat fédéral, sous prétexte de défense, ne saurait empêcher les « peuples autochtones » touaregs et arabes à proclamer leur indépendance le moment venu. Le Traité consacre textuellement le droit de révolte et de sécession!
Le drapeau, la monnaie de l’Etat fédéral s’appliquent à l’Etat de l’Azawad.Maintenant que les Azawadiens ont tout pris, ils font l’Etat fédéral l’immense faveur de reconnaître son drapeau et sa monnaie !
Pour les fonctions fédérales convenues dans le Traité, l’Etat fédéral est habilité à nommer des représentants qui les exerceront pour lui dans l’Azawad. Bref, l’Etat fédéral n’aura plus que des ampbassadeurs dans l’Azawad!
Il est affecté durant une période de 15 ans, à compter de l’entrée en vigueur du Traité, 33% du budget de l’Etat fédéral à l’Azawad pour son fonctionnement et son développement.Ce taux connaîtra une dégression de 5% tous les dix ans. Comme, pour l’instant, l’Azawad n’a que du sable et du soleil pour toutes ressources, il vivra légalement sur le dos du Mali pendant 15 bonnes années. Puis, une fois devenu économiquement puissant avec l’appui de ses amis étrangers, il proclamera son indépendance !
Tiékorobani