Le 29 juillet 2024, une plainte déposée par un citoyen, Monsieur LALLOGO Daporé Souleymane, a jeté une lumière crue sur une affaire de corruption et d’abus de pouvoir au sein de la justice burkinabè. En effet, l’accusation portait sur des faits d’escroquerie, avec une valeur de préjudice de 9 millions de francs CFA, impliquant plusieurs figures de l’institution judiciaire, et notamment M. YODA Sidaty, Président du Tribunal de Grande Instance de Banfora. Ce scandale, bien plus que de simples malversations financières, soulève des questions fondamentales sur l’intégrité du système judiciaire du Burkina Faso.
Les Dérives d’un Système
Bamada.net-Les faits sont simples et choquants. Le plaignant accuse M. YODA et ses complices d’avoir manipulé le marché foncier de Banfora, en identifiant des terrains non attribués, puis en les vendant à des particuliers. Les actes de vente étaient validés par des ordonnances judiciaires que M. YODA délivrait en toute impunité. Entre 2022 et 2024, pas moins de 18 parcelles ont été vendues pour un montant estimé à plus de 108 millions de francs CFA, un véritable racket organisé sous couvert de la justice.
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Les implications sont multiples : non seulement les citoyens ont été floués, mais en plus, la confiance dans l’intégrité des juges et des magistrats est gravement ébranlée. Ce cas n’est pas un incident isolé. Il fait écho à une série de pratiques douteuses qui gangrènent certaines institutions de notre pays, notamment dans le domaine judiciaire, où des abus de pouvoir sont parfois commis par ceux censés être les garants de la loi et de l’ordre.
Une Enquête Implacable
Fort heureusement, la plainte a conduit à une enquête ouverte par le parquet près le Tribunal de Grande Instance de Banfora. L’ouverture de cette enquête par les autorités compétentes est un pas vers la justice. Cependant, elle soulève aussi des interrogations sur l’ampleur du phénomène. Comment un tel réseau a-t-il pu prospérer aussi longtemps sans que personne ne remarque la fraude ? Qui sont les complices derrière ces pratiques ? L’enquête devra répondre à ces questions et, surtout, permettre aux victimes de retrouver une forme de justice.
Le Procureur du Faso a rapidement décidé de poursuivre les mis en cause pour stellionat et blanchiment de capitaux, des accusations graves qui viennent rappeler la nécessité de renforcer la vigilance et l’intégrité dans la justice burkinabè.
La Réaction du Parquet : Une Volonté de Réparer la Confiance
Dans un communiqué, Monsieur Adama KAFANDO, Procureur Général près la Cour d’Appel de Bobo-Dioulasso, a pris soin de rassurer l’opinion publique en affirmant que la procédure contre les accusés se poursuivrait dans le strict respect des droits des prévenus. Cette déclaration est rassurante sur le papier, mais elle doit se traduire par des actes concrets. La justice doit prouver sa capacité à agir avec fermeté, et à appliquer la loi de manière égale et impartiale, peu importe la position ou l’influence des prévenus.
C’est un défi de taille, et pas seulement pour cette affaire. En effet, cette situation met en lumière un problème structurel plus large : celui de la confiance en la justice. Les Burkinabè, comme de nombreux Africains, attendent d’une institution judiciaire qu’elle soit indépendante, transparente et intègre. Chaque dossier de ce genre qui éclate au grand jour et qui reste impuni est un coup porté à cette confiance essentielle.
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Un Système à Réformer ?
L’affaire Yoda est, certes, un scandale, mais elle est aussi une opportunité. Une opportunité de remettre en question un système qui, trop souvent, laisse échapper les dérives de ceux qui exercent le pouvoir. C’est une occasion de réaffirmer la nécessité d’une réforme profonde du système judiciaire, visant à renforcer la transparence, la responsabilité et l’efficacité.
Pour que justice soit rendue, il ne suffit pas que les coupables soient punis, il faut aussi que des mécanismes de contrôle et de régulation plus rigoureux soient mis en place. Les citoyens doivent pouvoir avoir confiance en la justice, savoir que, lorsqu’ils sont victimes, ils seront protégés, et que ceux qui exploitent leur position pour commettre des actes répréhensibles seront poursuivis sans complaisance.
Conclusion : Une Justice en Mutation
L’affaire Yoda nous montre que la justice n’est pas à l’abri des tentations de l’argent facile et de l’abus de pouvoir. Mais elle nous rappelle aussi qu’il existe des mécanismes légaux pour lutter contre la corruption et l’injustice. La transparence des enquêtes, le respect des droits de la défense et la fermeté dans la répression des crimes doivent être au cœur de cette démarche.
C’est à ce prix que nous pourrons, ensemble, restaurer la crédibilité de nos institutions judiciaires. La justice n’est pas seulement l’affaire des magistrats, elle est l’affaire de tous, et il est de notre devoir à tous de veiller à ce qu’elle soit rendue de manière juste, équitable et sans corruption.
Publié sur Bamada.net
Fait au Parquet Général, le 07 février 2025
Le Procureur Général, Justice LE PROCUREUR GEKETAL, Adama KAFANDO.
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Fatoumata Bintou Y
Source: Bamada.net