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Chronique du web : Les réfugiés face à l’indifférence coupable

Pour de nombreuses raisons, ce mois d’août aura été un bien triste intermède dans la vie de la communauté internationale. Il s’achève, comme il avait commencé, sur des crises majeures qui interrogent gravement notre volonté commune à leur trouver des solutions appropriées de telle sorte que, si d’aventure ces crises se reproduisaient, elles trouveraient une communauté internationale suffisamment préparée pour circonscrire leurs conséquences. Août ne détient certes pas le record de crises à répercussion internationale, mais il a le « mérite » de focaliser notre attention commune sur la plus grave crise du siècle, en l’occurrence le dérèglement climatique, dont les conséquences les plus spectaculaires sont, entre autres, le réchauffement de la température, la fonte des glaciers, la montée du niveau des océans, les agressions de l’homme contre la biodiversité, les conflits, les migrations et les graves problèmes de santé.

Ici même, la semaine dernière, nous vous entretenions des incendies spectaculaires qui ravagent la forêt amazonienne et qui, si rien n’est fait, nous menacent d’une grave asphyxie par la destruction d’une fonction respiratoire vitale pour l’espèce humaine. Cette semaine, je voudrais attirer votre attention sur autre crise tout aussi grave que quasiment structurelle : les réfugiés. Il n’est plus une seule région du monde qui échappe à la question des réfugiés ; une crise qui ne connaît aucun répit et qui oblige hommes et femmes, jeunes et vieux à vivre dans des conditions infrahumaines.

Selon l’intérêt du moment des médias, le sort des rohingyas birmans qui s’entassent au Bengladesh, des palestiniens au Liban, des somaliens tombés de Charybde en Scylla, des houthis du Yémen, des dizaines de milliers de soudanais qui ne savent plus où donner de la tête, de nos compatriotes à Mbera (Mauritanie)… fait la « Une » de l’actualité.

Outre la sécurité, l’alimentation et la santé de ces millions de réfugiés à travers le monde, la question de leur éducation préoccupe les Etats, les humanitaires et les Nations Unies dont l’organisme spécialisé, le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), a publié le 30 août dernier, un rapport alarmant intitulé« Redoubler d’efforts: l’éducation des réfugiés en crise ».

Selon ce rapport qui a toutes les raisons de faire froid dans le dos, plus de 7,1 millions d’enfants réfugiés vivant dans des camps éparpillés à travers le monde sont en âge d’être scolarisés. Mais plus de la moitié de ces enfants, soit 3,7 millions, ne vont pas à l’école pour d’évidentes raisons que chacun peut aisément imaginer. Ainsi, seulement 63% des enfants réfugiés fréquentent-ils l’école primaire, contre 91% en moyenne dans le monde, lit-on dans le rapport.

Là où le bât blesse, « plus les enfants grandissent, plus les obstacles qui les empêchent d’accéder à l’éducation deviennent difficiles à surmonter », précise le rapport du HCR. Conséquence : seulement 24% des réfugiés ont accès aux études secondaires pour un ratio mondial de l’ordre de 84%.

Pour Filippo Grandi, Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, « l’école accorde une deuxième chance aux réfugiés ». Et le fonctionnaire onusien de pointer un doigt accusateur : « Nous manquons à notre devoir à l’égard des réfugiés en ne leur donnant pas la possibilité de développer les compétences et les connaissances qui leur sont nécessaires pour préparer leur avenir ».

En cause, le manque de financements pour l’éducation des réfugiés qui est le parent pauvre de la mobilisation internationale. D’où cet appel pressant lancé par Filippo Grandi aux gouvernements, au secteur privé, aux organisations éducatives et aux donateurs afin qu’ils accordent leur soutien financier à une nouvelle initiative visant à relancer l’éducation secondaire pour les enfants réfugiés. Le fonctionnaire onusien dont on imagine l’état d’esprit ne s’arrête pas sur un simple appel à la générosité ; il va au-delà du rappel à son devoir à la communauté internationale : « Nous devons investir dans l’éducation des réfugiés. Le cas échéant, nous devrons supporter le coût d’une génération de jeunes condamnés à grandir sans pouvoir s’assumer, trouver du travail ou contribuer pleinement à leurs communautés ».

On apprend de ce rapport que le HCR a élaboré toute une initiative visant à faciliter l’accès à l’éducation secondaire aux réfugiés. Elle repose notamment sur la construction et la restauration de bâtiments scolaires, la formation d’enseignants et l’apport d’un soutien financier aux familles réfugiées afin qu’elles puissent couvrir les dépenses liées à la scolarisation de leurs enfants. Mais la clé de voûte de la crise serait la fin du ghetto dans lequel sont maintenus les refugiés. Le HCR en appelle donc au courage des gouvernements afin que les réfugiés soient inclus dans les systèmes nationaux d’éducation plutôt que de les cantonner dans des écoles parallèles informelles. Mieux, le HCR recommande d’autoriser les réfugiés à suivre les programmes d’enseignement officiels et reconnus dans l’enseignement pré-primaire, primaire et secondaire. C’est à ce seul prix que les réfugiés pourront ainsi acquérir des qualifications reconnues leur facilitant l’accès à l’université ou à la formation professionnelle supérieure, estime le rapport du HCR.

Enfin, le HCR recommande la levée de toutes les restrictions administratives qui constituent des sauts d’obstacles pour les réfugiés désireux d’accéder aux établissements d’enseignement supérieur. Ces restrictions portent notamment sur les certificats de scolarisation et d’examens ainsi que les papiers d’identité que les réfugiés ne peuvent produire au moment de leur inscription.

Le rapport conclut sur l’urgence d’apporter une éducation aux enfants réfugiés à travers le monde. Il indique enfin que sur les 25,9 millions de réfugiés dans le monde recensés à la fin 2018, 20,4 millions relèvent de la compétence du HCR. La moitié environ était âgée de moins de 18 ans et ils étaient des millions dans des situations de crise prolongée, avec peu d’espoir de retour dans leur pays dans un avenir proche.

Le HCR est déterminé à mobiliser des soutiens en vue de son initiative pour l’éducation secondaire, un des axes clés du premier Forum mondial sur les réfugiés prévu du 17 au 18 décembre 2019 au Palais des Nations à Genève.

Serge de MERIDIO

Source: Infosept

 

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