L’affaire a défrayé la chronique pendant une semaine. Les commentaires ont fusé au sujet de Cheick Tidiane Diabaté, l’attaquant des Aigles du Mali. Dans un entretien accordé exclusivement à Match, le n°9 des Aigles du Mali parle à cœur ouvert. Diabaté, le goleador des Girondins de Bordeaux n’a dribblé aucune de nos questions. Une sorte de coup de gueule et de cri de cœur…
Bonjour Cheick ! Il semblerait qu’il y a un problème malgré le fait que vous soyez avec le groupe.
Tout d’abord, je tiens à adresser mes salutations à tous les Maliens. Comme vous l’avez si bien dit il y a un gros problème. Pour moi, ce qui compte le plus dans la vie, c’est le respect. Ça, je ne l’ai pas senti. On m’a appelé pour venir jouer pour le Mali. La règle veut que lorsqu’on convoque un joueur en sélection nationale, il lui faut au moins envoyer un billet d’avion. Je me rappelle après la Can 2013, lorsque je suis revenu à Bamako, on m’a dit que j’ai mon billet à l’aéroport. Aucun billet n’était disponible l’aéroport. J’ai appelé Souleymane Diallo pour lui dire que je n’ai pas eu mon billet. Ce qui n’est pas normal. Il m’a demandé de passer à la Fédération. En ce moment là, j’ai appelé Moussa Konaté pour lui faire part de cet imbroglio. Lui aussi m’a demandé d’appeler Souleymane. J’ai laissé tomber et le lendemain je me suis rendu à la Fédération après avoir rappelé Moussa qui continuait à me demandé d’appeler Souleymane. Là-bas, on me demande d’aller au Ministère des Sports. Au Ministère aussi, on me demande d’aller à la Fédération. Vous voyez ces va-et-vient interminables. J’ai parlé du problème à Adama Tamboura avec qui je m’entends bien. Adama m’a demandé d’appeler les dirigeants pour résoudre le problème. Je lui ai dit que cette tentative n’a pu rien résoudre. Je me suis arrangé à payer un billet Bamako-Paris de ma propre poche pour me rendre en France. Arrivé à Paris, j’étais bloqué là-bas parce que je n’avais pas d’argent sur moi. J’ai dû appeler Abdou Traoré pour qu’il me paye un billet pour Bordeaux pour le rembourser après. C’est comme ça que je suis retourné à Bordeaux après la Can 2013. Et je ne trouve pas cela normal. D’habitude, si la Fédération nous convoque, elle envoie également le billet au club pour nous le remettre. Cette fois-ci, on ne m’a pas remis le billet. Comme nous sommes en période des vacances, j’ai appelé mes parents pour dire que je vais venir passer les vacances avec eux.
Je tiens à préciser une chose. Je suis venu à Bamako pour passer mes vacances et non pour jouer au football. Pour moi, si on veut que je joue pour le Mali, on devrait me donner un billet d’avion comme ça se fait d’ordinaire. A ma grande surprise, j’apprends à la radio et à la télé ma convocation. Pire, j’ai apprends aussi que j’ai refusé de jouer pour le Mali. Comment les journalistes peuvent se permettre de dire une telle chose sur moi ? Etant cadet, je joue pour le Mali. Le Mali m’a tout donné et je dois en retour tout au Mali. J’ai joué presque avec toutes les différentes catégories de sélections. Et maintenant, on veut me remercier comme ça ? Je demande à tous les Maliens de chercher à comprendre d’abord si ce genre de problème se pose.
Donc, vous êtes venu à Bamako à vos frais. Les mauvaises langues disent que vous êtes venu dans le même vol qu’Abdou Traoré…
Non, c’est archi faux. Je vais vous dire comment et quand je suis venu Bamako. Je suis venu ici le jeudi soir (3 jours avant le match Mali-Rwanda). Et vendredi matin, je suis allé voir ma famille. Mes parents m’ont demandé pourquoi je n’ai pas été appelé. Je leur ai répondu par la négation. Moi-même je ne sais pas pourquoi je n’ai pas été appelé. C’est après que les rumeurs ont fait le tour du pays mentionnant mon soi-disant refus de jouer pour le Mali. Mes parents m’ont encore demandé si on m’avait payé le billet pour venir ici. Vous savez, même si tu aimes ton pays, tu ne peux pas jouer si on ne t’a pas appelé de façon officielle. Il y a eu un moment où j’ai dit à mes parents que ce n’était pas une bonne idée d’aller à Kabala vendredi parce que l’équipe était en préparation. Je sais comment ça se passe et que je ne pouvais pas aller vendredi et jouer le match de dimanche (Mali-Rwanda) alors que les autres étaient là avant moi en train de préparer leur match. J’ai décidé d’attendre le prochain match pour savoir si le coach a besoin de moi. Mes parents m’ont dit : Cheick va à Kabala. Si tu n’y vas pas, les Maliens ne vont pas comprendre. C’est comme ça que je suis allé à Kabala le mardi (après le match Mali-Rwanda). Ce jour là, je me suis entraîné et j’ai trottiné. Le lendemain mercredi, l’entraîneur m’appelé et dit: Cheick, ils (Moussa Konaté, Hammadoun Kolado Cissé…) m’ont dit qu’ils ne veulent pas que tu restes à Kabala. J’ai dit ah bon ! Si vous, ne voulez pas que je reste à Kabala, je m’en vais sans problème. J’ai arrangé mes affaires, mais avant de m’en aller, j’ai appelé mes parents. Et j’ai parlé en ces termes: vous m’avez demandé de venir à Kabala et ils viennent de dire de partir. Cela s’est passé le jeudi 13 juin dernier. Ensuite, mes parents m’ont demandé de rester et que les dirigeant viendront me voir comme ce sont eux qui ont dit à l’entraîneur de me demander de partir. J’ai accepté de rester. Après j’ai dit coach : je veux m’entraîner, il m’a répondu non, ils ne veulent pas que tu t’entraînes. J’ai demandé à savoir qui ne veut pas que je m’entraîne ? J’ai répondu que ça c’est du n’importe quoi. On ne veut pas que je m’entraîne sur ce terrain ? Avant d’ajouter dites à tous les Maliens que moi Cheick Tidiane, je vais m’entraîner. Si vous ne voulez pas que je joue avec vos ballons, je vais m’acheter des ballons pour m’entraîner. Ce terrain n’appartient à personne, mais plutôt à l’Etat. Si l’Etat m’interdit de m’entraîner sur ce terrain, je m’en vais sans problème. J’ai dit à Pathé : coach est-ce que vous, vous voulez que je joue ? Il m’a répondu oui. J’ai dit si vous voulez que je joue, je reste. J’ai ajouté qu’il ne faut pas qu’on commence à mentir sur moi en disant que je ne veux pas jouer pour le Mali. Le Mali, c’est mon pays et je suis fier d’être Malien. J’adore mon pays, j’adore mes compatriotes. Mais tout ce que je veux, c’est le respect. La prochaine fois où on m’appellerait pour jouer, je veux mon billet d’avion comme ça se fait d’habitude. C’est tout ! Puisque Moussa m’a dit : Cheick si c’est comme ça tu prends ton billet et tu viens jouer avec le Mali. J’ai dit écoutez, on m’a pas habitué à faire ces genres de choses. D’habitude, on m’envoie le billet par l’intermédiaire de Bordeaux. Si je n’ai pas eu le billet, je peux me permettre de dire que je n’ai pas été appelé.
Selon nos sources, vous avez appelé Moussa Konaté avant de partir aux entraînements pour lui faire savoir le désir de vous entraîner.
Effectivement, j’ai appelé Moussa. J’ai dit : Moussa, écoutez, c’est Cheick. Je suis à Kabala, je vais chercher mes crampons et m’entraîner par force. Je ne vous demande même pas pardon avant de faire cela. J’ai accroché et je suis allé m’entraîner parce que je veux jouer avec mon pays car j’aime mon pays.
Cheick, vous avez rencontré le Ministre ce vendredi (NDLR : 14 juin dernier), l’initiative vient de qui ?
Tout ce que je sais, c’est que ce matin (NDLR : vendredi 14 juin) l’entraîneur est venu me voir et il m’a dit qu’on va voir le Ministre et cela m’a fait énormément plaisir. Dans notre entretien, il m’a beaucoup respecté. C’est ce que je veux. Alors que le ministre, il peut être comme un père pour moi. Le ministre a demandé à savoir ce qui se passe. Je lui ai dit que je suis venu à Bamako pour passer mes vacances. Il a dit pourquoi ? Je lui ai répondu que parce qu’on ne m’a pas envoyé de billet avant de lui demander s’il m’avait envoyé le billet comme Moussa me l’avait dit. Le ministre a dit que cela n’est pas son boulot. Qu’il peut acheter des billets pour les joueurs, mais ne les remet pas aux joueurs. Je lui ai encore rappelé que parce que je n’ai pas eu de billet que je ne me suis pas présenté à Kabala pour jouer car je m’étais dit qu’on ne m’a pas appelé. Et que la prochaine fois où on m’appellera pour jouer, je veux qu’on m’envoie le billet. Il m’a dit : Cheick va t’entraîner et mouiller le maillot pour ton pays.
Pensez-vous que vous pouvez jouer dimanche ?
Bien sûr, je peux jouer. Présentement, j’ai envie de jouer, faim de jouer. Ça fait longtemps que je n’ai pas joué au Stade du 26-Mars qui est mon Stade préféré. J’ai marqué à tous les matches joués dans cette enceinte même lors des matches de championnat du Mali avec mon club formateur, le CSK.
Par Baba Cissouma