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Cheick Boucadry Traoré, Président de C.a.re – AfrikiLakuraya : ‘’Un texte de loi qui désunit ne doit pas être validé’’

Selon le Président de la Convergence Africaine pour le Renouveau, le projet de loi constitutionnelle du Mali est incompatible avec nos valeurs, divise et discrimine volontairement certains segments de notre population. C’est comme si ses auteurs se sont sentis si puissants qu’ils ont élaboré un projet de loi pour leur propre profit et la satisfaction de leur vanité.

La révision, voire le changement de Constitution est plus que souhaitée de nos jours parce que les Maliens veulent être réconciliés avec leurs politiques de gouvernance et voir leurs institutions réformées afin de mieux les adapter aux réalités et aux besoins changeants de notre société. Il ne semble guère contestable que la Constitution de 1992 est atteinte de péremption, tant il est vrai  qu’elle-même et les institutions qu’elle épaule peinent à s’adapter aux exigences actuelles de la démocratie qu’elles sont supposées garantir. Elles doivent être adaptées et harmonisées. C’est à travers cette harmonisation qui ne saurait se faire sans être liée aux composantes de nos valeurs socioculturelles et à notre identité que nos citoyens capturent l’esprit de la loi fondamentale. Elle permettrait alors au pays de se doter d’institutions durables et un renouvellement démocratique de pratiques d’intervention sociale.

Nonobstant ces raisonnables exigences sociales, culturelles et politiques ; les auteurs du projet de loi constitutionnelle du Mali nous présentent un texte de loi non compatible avec nos valeurs, et qui divise et délibérément discrimine certains segments de notre population.

 

‘’Tentative de contrôle ou de confiscation par exclusion, apanage des usurpateurs arriérés mis en position de confiance et d’autorité’’

Il semble que les auteurs se sont sentis si puissants qu’ils ont élaboré un projet de lois pour leur propre profit et la satisfaction de leur vanité. Ils nous ont échappé parce qu’ils ont tout misé sur nous tous pour faire confiance au système de gouvernance et notre soutien aux institutions de transition. C’était notre vulnérabilité et ils en ont profité. Mais, ils ont aussi oublié que notre vie est soit définie par le système, soit par la façon dont nous le défions.

C’est à tous les égards une tentative de contrôle ou de confiscation par exclusion, ce que font toujours les usurpateurs arriérés quand on les met en position de confiance et d’autorité. S’appuyer sur le légiste pour légitimer la spoliation, c’est vieux comme le monde. Aucune LOI ne doit hypothéquer l’avenir que les dignes filles et fils du pays ne peuvent manquer d’élaborer pour la mère patrie. Exclure et sciemment discriminer certains citoyens comme ceux de certaines communautés ou de la diaspora est une hérésie. Mais encore, alors que nous parlons de panafricanisme et que nous œuvrons pour une intégration totale des pays de la sous-région, le nôtre étant la source et la racine de cette intégration, les acteurs derrière les articles dans ce texte de loi tiennent à nous désunir à jamais en pervertissant la loi à cette fin. Cela ne sera jamais acceptable.

La Constitution doit être un pacte collectif indispensable pour vivre ensemble, elle doit unir tous les citoyens, elle doit être la règle commune, elle doit montrer que le Mali est un pays de droit qui ne discrimine pas ou ne marginalise point une partie de son peuple. La Constitution, c’est la charte commune, c’est le contrat qui unit tous les citoyens d’un même pays.

Aussi, nous ne pouvons point nier le fait qu’historiquement la religion ait été un ciment de notre tissu social. Or, le texte de loi de ce projet nous parle de laïcité et de liberté religieuse sans donner un contenu réel et concret au principe ou même définir sa conception. La non-clarification du concept de cette laïcité empruntée parmi tant d’autres lacunes et omissions dans le texte de loi ne peut qu’entraîner davantage des malentendus et des conflits dans notre société.

Il est temps de comprendre que la nation et sa consolidation ne peuvent résulter que de la mise en œuvre de politiques de gouvernance adaptées et des institutions qui représentent réellement les aspirations du peuple. Et pourtant, ce texte de loi démontre une césure de plus en plus évidente entre nos populations et nos ‘élites’ venant des différentes couches : religieuse, militaire, économique et intellectuelle, ou plus largement, entre les cercles de pouvoir et la société civile. Il démontre aussi et sûrement la faillite de ces élites et le besoin sans ambiguïté en compétence ingénieuse et innovante. Et tout cela est très déconcertant, et beaucoup d’entre nous se sentent aujourd’hui envahis de honte et d’indignation devant ces faits insoutenables. Pour une fois, nous avons honte pour la Nation.

La honte est plus lourde encore devant l’insouciance et l’irresponsabilité de nos leaders politiques, qui ont abdiqué tout sens de l’honneur et du patriotisme, pour des positionnements politiques ou la conquête du pouvoir. Des dirigeants politiques à l’âme si corrompue qu’ils demeurent aujourd’hui amorphes et insensibles, même devant les outrages graves et répétés contre notre peuple, notre culture, et les valeurs fondamentales de notre société ;

Nous avons mal et nous avons honte devant l’indifférence et l’apathie de nos Institutions publiques qui ont renoncé à leurs devoirs envers leur peuple et leur patrie, pour bénéficier des faveurs ou des largesses des élites et des administrateurs plus prompts à récompenser l’allégeance et l’adulation que le civisme et le mérite ;

Nous avons certes perdu nos repères face au mutisme et l’inertie de ceux qui sont supposés être nos ‘sages’ aujourd’hui ; mais aussi, de beaucoup de nos hommes de culture et hommes des médias, qui ont échangé sans état d’âme, leur devoir de vérité en communication, leur liberté d’opinion et d’expression, contre la bonne grâce de l’Administration et des hommes politiques. Nous ne pouvons taire notre déception et notre étonnement face à la manipulation et l’hypocrisie de bon nombre de nos chefs religieux qui ont troqué leur statut d’apôtres de la foi et de la morale, de la dignité et du patriotisme, contre la fonction méprisable de flatteurs attitrés des pouvoirs en place, sermonnant du haut de leur chaire ; Le mal ! c’est aussi le silence et la résignation de la majorité de notre peuple, si longtemps ignorée ou réprimée et déshéritée de sa liberté naturelle par des régimes arbitraires, qu’elle a fini par perdre la notion de civisme et de libertés publiques, et ses corollaires de droit de manifester et d’exprimer des opinions ou des revendications.

 

S’impliquer dans la recherche de vraies solutions à la crise sociopolitique dans notre pays

Nous osons espérer que cette longue et inexplicable période de silence et de résignation de notre peuple est nécessairement porteuse de vagues de réveil de la conscience populaire. Nous osons aussi espérer que cet éveil de conscience permettra à nos populations de s’impliquer dans la recherche de vraies solutions à la crise sociopolitique dans notre pays.

Notre position à ce sujet est très claire et connue de tous. Tant de générations se sont mobilisées pour de grandes causes – et la nôtre a également une belle mission : faire émerger un système politique meilleur, nourri des valeurs et des structures sociales et culturelles maliennes pour notre génération ainsi que celles qui la suivront.

A un moment où nous entrons dans une autre période de la vie de notre pays et où de terribles défis sont devant nous, nous devons tous comprendre et prendre conscience que les institutions ne sont que des bâtiments avec des personnes à l’intérieur. Ils dépendent beaucoup du type de personnes que vous y mettez. Encore, notre attention ne devrait pas porter seulement sur les lettres de la constitution, mais aussi sur son esprit.

Fort malheureusement, l’esprit de ce texte de loi est pernicieux et malveillant, et très contraire à nos principes, nos valeurs et nos rêves. Tout au long du temps de nos empires, nos royaumes et nos récentes républiques, nous trouvons des exemples qui témoignent que ceux qui ont défié nos valeurs et divisé notre peuple ont toujours été les perdants de l’histoire. Un texte de loi qui désunit ne doit pas être validé par une minorité de notre peuple et il ne doit sûrement pas être imposé par malice au peuple dans son entièreté.

La Constitution doit être un esprit clair qui nous unit à travers des institutions stables et une pratique citoyenne. Ce qui doit être commun ne doit point nous désunir.

Que Dieu assiste notre chère Nation et qu’il bénisse nos efforts partagés.

Cheick Boucadry Traoré, Président de la Convergence Africaine pour le Renouveau (CARE) – AfrikiLakuraya

Source : Le Challenger

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