A n’en pas douter, la prochaine assemblée consulaire de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (Ccim) risque d’être très mouvementée, à moins que, d’ici-là, le président de cette institution consulaire, Youssouf Bathily, parvienne à taire les velléités affichées par les Délégations régionales, notamment en respectant ses engagements de satisfaire neuf points de revendication présentés dans le cadre d’une pétition lue par le vice-président de la Délégation régionale de la Ccim de Bamako. Mais cette pratique qui commence à être récurrente à la Ccim depuis une quinzaine d’années, laisse entrevoir l’urgence de réformes pour mieux réguler les élections consulaires et le fonctionnement de la Ccim.
Une véritable fronde, c’est ce que les délégations régionales de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali ont déclenché à travers une pétition signée par leurs membres consulaires et soumise à l’examen de la dernière assemblée consulaire tenue le samedi 24 mars dernier au Parc des expositions de Bamako.
Avant la reprise des travaux, suite à la suspension de séance pour permettre aux officiels de se retirer après l’ouverture solennelle des travaux, le président Youssouf Bathily a usé d’un intense lobbying pour faire baisser la tension, notamment en rencontrant les initiateurs de cette pétition dans les couloirs.
En prenant l’engagement de satisfaire les neuf points de revendication à lui présentés, le président de la Ccim, connaissant l’état d’esprit de l’institution consulaire dans pareils cas, grâce à l’expérience qu’il y a accumulée au fil des ans, a su donc briser les élans des uns et des autres en sachant que ce genre de pétitions, si on laisse prospérer, conduit droit vers une motion de censure, voire un blocage du fonctionnement de la Ccim.
Toujours est-il qu’entre l’acceptation des revendications et leur satisfaction, il y a un seul pas certes, mais qui n’est pas du tout facile à franchir. Il faudrait pourtant le franchir pour éviter de tomber dans la nasse des protestataires lors de la prochaine assemblée consulaire car les pétitionnaires jugent de mettre le président Youssouf Bathily à l’épreuve pour le juger sur pièce après les engagements qu’il a pris. Les points de revendication sont : donner régulièrement le budget d’activité des Délégations à la fin de chaque trimestre ; donner dans le plus bref délai les véhicules des Délégations régionales de Bamako, Tombouctou, Kidal et Gao ; Tenir régulièrement les réunions statutaires du Bureau de la Ccim avec la participation active des présidents des Délégations régionales et du district de Bamako pour une bonne gouvernance ; tenir régulièrement la formation des élus consulaires ; donner des indemnités de représentation aux présidents des Délégations régionales et du district de Bamako ; se conformer au délai de 15 jours pour la remise des documents de l’assemblée consulaire de la Ccim ; doter les délégations de subventions inscrites au budget en partageant le montant de 170 millions avec les Délégations régionales et du district de Bamako ; prévoir les membres consulaires dans toutes les missions à l’extérieur du pays ; réparer et entretenir les bâtiments des Délégations régionales de Mopti et Sikasso et les doter en meubles.
Ces points de revendication cachent mal un certain malaise dont le fondement n’est rien d’autre que le partage des ressources de la Ccim entre la Chambre nationale et les Délégations régionales qui se sentent flouées, au vu du budget colossal dont dispose désormais l’institution consulaire qui fait aussi preuve d’une bonne santé financière en s’engageant dans des projets tous azimuts d’équipements commerciaux. Avec tout ce que cela engendre comme suspicions et non-dits dans la gestion de pareils projets qui engloutissent des sommes faramineuses. C’est donc à une véritable tentative d’instauration d’une tontine que l’on assiste, les revendications n’étant en effet, pour la plupart, que d’ordre matériel et financier.
En plus, il n’a pas été étonnant d’apprendre que la Délégation régionale de Bamako est au cœur de cette pétition, elle qui vit un profond malaise de cohabitation avec la Chambre nationale, laquelle est en réalité une délégation du district de Bamako à compétence nationale.
L’urgence pour la Ccim, c’est donc de procéder à des réformes, notamment par la relecture des textes, pour adapter ses missions aux réalités du moment et aussi recadrer son fonctionnement afin de mettre fin à ce cycle de bras de fer ou de menaces de motions de censure qui jalonnent son fonctionnement ces 15 dernières années.
En effet, le procédé utilisé, notamment la pétition, n’est pas sans rappeler des actes du genre très connus à la Ccim devenu un terrain d’affrontement entre hommes d’affaires, sans que la structure s’en trouve mieux reluisante. Il est temps d’y mettre un terme. En effet, la Ccim étant un établissement public à caractère professionnel, ses membres consulaires ne doivent plus se comporter comme le feraient des étudiants réclamant le paiement d’arriérés de bourses car s’il est vrai qu’ils constituent la crème des opérateurs économiques du pays, ils doivent le prouver par leur comportement, notamment au sein de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali qui traine comme un boulet cette image de creuset d’affrontements de clans et d’intérêts sinistres.
Dans l’une de nos prochaines éditions, nous reviendrons sur des axes de réformes à envisager pour atteindre les objectifs précités.
A.B. NIANG
Aujourd’hui-Mali