L’Église malienne avait posé cette question pertinente aux Maliens, dans un «Message des évêques à l’occasion des élections 2007». Le contexte politique actuel dans notre pays mérite d’être analysé à la lumière des réponses données il y a douze ans.
Ces extraits du «Message des évêques» pourraient utilement nourrir les débats politiques contradictoires enclenchés pendant et après le Dialogue national inclusif. «…. Cela fait déjà quinze ans révolus que la «révolution de 1991» a eu lieu. Nous pouvons donc regarder un peu le chemin parcouru, faire une rétrospective. Nous verrons ainsi si dans notre façon de «faire la politique» nous avons pris en compte le «Rêve» de ce peuple. Quels ont été nos attitudes et nos comportements pendant ces quinze années (1992-2007) ? Peut-être qu’au bout du compte, nous verrons ensemble que nous devons «réhabiliter» la politique chez nous, lui redonner confiance. Du reste, nous rappelons-nous encore le «Rêve», cette aspiration qui gonflait le cœur de tous les Maliens lorsque nous nous sommes mis debout pour dire «non» à un régime, à une façon de faire la politique ?
Ce «Rêve» le voici.
Ensemble, que nous soyons de la ville ou des villages, nous proclamions à qui voulait l’entendre que nous voulions:
– Un Mali nouveau
– Un Mali nouveau où la parole était désormais donnée à tous
– Un Mali nouveau où le pouvoir serait à tous, non plus le pouvoir d’un parti unique ou d’un clan, mais un pouvoir démocratique où des partis politiques pourraient , avec des chances égales, briguer les suffrages» des électeurs,
– Un Mali nouveau où la justice serait la même pour tous ; non plus une justice à plusieurs vitesses ; bref, un Mali où la justice ne serait plus rendue au plus offrant, parce que la loi serait la même pour tous.
– Un Mali nouveau où les richesses seraient équitablement «partagées».
Le «Message des évêques» énonce «dans les grandes lignes ce que nous avons fait ensemble» depuis le «grand rêve» de la «révolution» de 1991. Qu’en avons-nous fait ? Commençons par le positif.
Nous sommes dans une démocratie de «multipartisme» intégral, ce qui nous vaut d’avoir actuellement (2007) des dizaines et des dizaines de partis politiques. Tout Malien qui en remplit les conditions peut créer son parti dans le cadre défini par la loi, nul ne peut plus l’empêcher. Notre pays est actuellement crédité d’un haut niveau de «bonne gouvernance». Un réel effort d’augmentation des salaires a été entrepris, même si cela reste encore insuffisant pour les travailleurs qui ont les yeux fixés sur les prix du marché. Bref, les acquis sont nombreux et variés, et on peut penser que le «Rêve de 1991» n’a pas été déçu.
En plus du positif, nous pouvons voir quelques points sombres… Beaucoup de nos concitoyens sont aujourd’hui perplexes vis-à-vis de la «chose politique» et des «hommes politiques». Certaines personnes, hommes et femmes, sont soupçonnées de se réfugier dans la «politique» pour se mettre à l’abri de poursuites judiciaires éventuelles. Il semblerait par les temps qui courent, qu’un poste «électif» soit plus sûr qu’un avocat.
La politique serait devenue le chemin le plus sûr et le plus direct de réussite sociale. On entre en politique pour faire «carrière» d’autant que le militantisme médiatisé ou courtisan permet d’accéder à des postes, sans avoir à justifier d’une qualification et/ou d’une compétence professionnelle…..»
Ce message de l’Église adressé au peuple malien en 2007, ne reste-t-il pas d’actualité ? Je souhaite «Bonne chance» à la commission de mise en œuvre des résolutions du Dialogue national inclusif. Elle marchera sur des œufs, jusqu’en 2023.
Sékou Oumar DOUMBIA
Source: Journal l’Essor-Mali