Voyager est souvent une obligation pour de multiples raisons. Qu’à cela ne tienne, lorsque vous ne disposez pas de routes praticables et que ces dernières sont truffées d’embûches en tous genres, votre souffle se coupe rien qu’à y penser. Tel est le cas de la Route de l’espoir, qui relie Tombouctou à Mopti via Douentza.
La Route de l’espoir est devenue un cauchemar pour les usagers. Qu’ils soient transporteurs ou simples voyageurs, leur souffle est toujours coupé lorsqu’ils empruntent ce trajet, long de seulement 200 km. Au début, le chemin pratiqué était Tombouctou – Bambara Maoudé – Douentza – Mopti, mais aujourd’hui il ne l’est plus à cause de sa dangerosité. Depuis 2012, des attaques avec tueries d’hommes, des accidents et maintenant ces mines qu’on y enfouit. Ces derniers temps la voie a changé, on fait Tombouctou – Bambara Maoudé – Ngouma – Mopti.
Un calvaire qui dépasse l’entendement 17 passagers entassés comme des sardines dans un véhicule 4X4 au pare-brise à moitié brisé, 14 dans l’habitacle et les 3 autres sur le toit, au-dessus des bagages, dans un froid de canard nous prenons le départ de Tombouctou à 5h30mn, en direction du poste de contrôle de la gendarmerie. Après les 18 premiers kilomètres, qui nous séparent de Koriomé, où se trouve le bac pour traverser le fleuve, nous sommes contraints de prendre notre mal en patience, histoire de voir au moins 10 autres voitures se joindre à nous pour entamer la traversée.
À 8h30mn nous montons dans le bac, qui ne démarra qu’aux environs de 9h. Peut-être faut-il comprendre la lenteur du bac par le fait qu’il a perdu sa clientèle au profit de bateaux plus sécurisés. Nous souffrons le martyre sous le froid et la fatigue. Après plus d’une heure de trajet, nous accostons. Ouf, une étape en moins, nous allons proprement commencer le voyage à destination de Bamako. Les véhiculés se suivent à un intervalle de 5 à 10 minutes, question d’éviter les bains de poussière. Cheminant en convoi pendant près d’une heure, les transporteurs se séparent pour chacun emprunter la piste de son choix.
La route est quasi inexistante. Cette fois-ci, on ne fera pas l’objet d’attaque, mais on va subir beaucoup de crevaisons et faire de nombreux détours à cause de la montée des eaux. Trois heures après notre départ, voici Bambara Maoudé. Reconnaissons que l’État nous a oubliés Première halte de 5 minutes, le temps de se dégourdir les jambes et de prendre un verre de thé. Nous avons à bord du véhicule deux dames, dont une avec une petite fille d’à peine 1 an. Durant tout le trajet, incommodée, elle pleure et passe sur les genoux des différents passagers, qui tentent de la distraire pour calmer ses pleurs.
La maman, une femme d’une forte corpulence, sous un voile noir, exaspérée par les pleurs de sa fille et les secousses de la voiture et couverte de poussière, s’efforce de garder un petit sourire. Elle est affalée sur son siège et même les crevaisons ne la délogeront pas. « Je suis trop serrée mais je suis obligée, parce que je n’ai pas les moyens de prendre le bateau. Sinon, j’ai même peur, après tout ce qui se passe sur cette route. Que Dieu nous préserve des malfrats seulement.
Vous avez dû constater que j’ai vomi partout. Reconnaissons que l’État nous a oubliés, sinon comment se fait-il que depuis les années de l’indépendance nos routes sont comme cela ? », finira-t-elle par dire. De Bambara Maoudé nous contournons la contrée de Ngouma pour nous retrouver directement sur le goudron menant à Mopti, avec ses nids de poules. Très fatigués, on se retrouvera finalement à destination aux environs de 15h, tous couverts de poussière et affamés. Terminus pour les voyageurs, en espérant de la route sera dans un meilleur état pour le prochain voyage sur Tombouctou.
Nordsudjournal