Yaoundé – Une célèbre journaliste anglophone du Cameroun, Mimi Mefo, a été écrouée dans la nuit de mercredi à jeudi à Douala (sud), après avoir été inculpée par un tribunal militaire d' »atteinte à la surêté de l’Etat », a appris l’AFP auprès de son avocate.
Mimi Mefo, rédactrice en chef adjointe et présentatrice vedette à Equinoxe TV, une chaîne de télévision privée de Douala, « a été écrouée et incarcérée (…) à la prison de New-Bell », a déclaré Alice Nkom, responsable d’un collectif de onze avocats qui s’est constitué pour défendre la journaliste.
Mimi Mefo a été placée en détention provisoire par le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire de Douala, selon Me Nkom qui qualifie l’inculpation d’atteinte à la sûreté de l’Etat de « rocambolesque ».
Elle devrait être jugée par le tribunal militaire de Douala dès lundi, selon l’avocate.
Il lui est reproché d’avoir « relayé, tout en en indiquant la source, un post disant que ce sont des balles de l’armée qui ont tué le missionnaire américain Charles Trumann Wesco », qui a succombé fin octobre à ses blessures après une attaque dans la province anglophone du Nord-ouest, a expliqué Me Nkom.
« Est-ce qu’on peut nous prouver que c’est faux? On n’en sait rien, dès lors qu’on a affaire à une armée dont des soldats peuvent tirer à bout portant sur un enfant, ce que les autorités nient avant de se raviser », a-t-elle affirmé.
Dans un autre post, la journaliste avait relayé la version du ministère camerounais de la Défense, imputant la responsabilité de la mort du missionnaire américain aux séparatistes anglophones.
« Son innocence est établie et la preuve que (son) emprisonnement était planifié est cinglant », a réagi le Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) qui demande au gouvernement de la libérer « sans aucun préalable ».
Le syndicat, qui compte plus de 400 membres, a en outre décidé de boycotter « toutes les activités du gouvernement pendant 10 jours » à compter de jeudi. Il a en outre appelé à la mobilisation pour l’audience de la journaliste au tribunal militaire lundi.
Reporters sans frontières (RSF) a également demandé la libération immédiate de la journaliste d’Equinoxe TV. « Les journalistes qui couvrent la crise anglophone ne sont pas des criminels ! », a dit l’ONG.
Equinoxe TV a aussi exigé la « libération immédiate » de sa journaliste » qui « n’a commis aucun crime (…) n’ayant agi que dans le cadre de son métier ».
Anglophone, Mimi Mefo, en plus de ses responsabilités à Equinoxe TV, anime un site internet sur lequel elle rend régulièrement compte de l’actualité des deux régions anglophones du Nord-ouest et du Sud-ouest, en proie à un conflit armé avec les séparatistes depuis un an.
Depuis la tenue de la présidentielle le 7 octobre, au moins six journalistes ont été interpellés au Cameroun, dont deux restent incarcérés, selon un décompte fait par l’AFP.
Michel Biem Tong, promoteur d’un site Internet, a été arrêté le 23 octobre et restait en détention jeudi pour des faits allégués d' »apologie » de sécession.
(©AFP / 08 novembre 2018 17h06)